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Conseil d’Etat, 29 juillet 2002, n° 239368, Ville de Marseille c/ M. Daniel C.

Il appartient au tribunal administratif statuant en la forme administrative et au Conseil d’Etat, saisi d’un recours de pleine juridiction dirigé contre la décision du tribunal administratif, lorsqu’ils examinent une demande présentée par un contribuable sur le fondement des dispositions de l’article L. 2132-5 du Code général des collectivités territoriales, de vérifier, sans se substituer au juge de l’action et au vu des éléments qui leur sont fournis, que l’action envisagée présente un intérêt suffisant pour la commune et qu’elle a une chance de succès.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 239368

VILLE DE MARSEILLE
c/ M. C.

M. Boulouis, Rapporteur
Mme Boissard, Commissaire du gouvernement

Séance du 3 juillet 2002
Lecture du 29 juillet 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 1ère et 2ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 1ère sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire rectificatif, enregistrés les 25 et 26 septembre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la VILLE DE MARSEILLE, représentée par son maire en exercice ; la VILLE DE MARSEILLE demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler la décision en date du 20 septembre 2001 par laquelle le tribunal administratif de Marseille a autorisé M. Daniel C., en sa qualité de contribuable de la VILLE DE MARSEILLE, à déposer au nom de celle-ci, à ses frais et risques, une plainte avec constitution de partie civile des chefs d’escroquerie, abus de confiance, usurpation de fonction et délit de favoritisme qui auraient été commis au détriment de la ville dans le cadre de la concession qu’elle a consentie à la société d’économie mixte "Marseille Habitat" pour l’aménagement du « périmètre de restauration immobilière du Panier-Vieille Charité » ;

2°) de condamner M. C. à lui verser une somme de 15 000 F au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code pénal ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Boulouis, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Coutard, Mayer, avocat de la VILLE DE MARSEILLE et de la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de M. C.,
- les conclusions de Mme Boissard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 2132-5 du code général des collectivités territoriales : « Tout contribuable inscrit au rôle de la commune a le droit d’exercer, tant en demande qu’en défense, à ses frais et risques, avec l’autorisation du tribunal administratif, les actions qu’il croit devoir appartenir à la commune et que celle-ci, préalablement appelée à en délibérer, a refusé ou négligé d’exercer » ; qu’il appartient au tribunal administratif statuant en la forme administrative et au Conseil d’Etat, saisi d’un recours de pleine juridiction dirigé contre la décision du tribunal administratif, lorsqu’ils examinent une demande présentée par un contribuable sur le fondement de ces dispositions, de vérifier, sans se substituer au juge de l’action et au vu des éléments qui leur sont fournis, que l’action envisagée présente un intérêt suffisant pour la commune et qu’elle a une chance de succès ;

Considérant que, par une décision en date du 20 septembre 2001, le tribunal administratif de Marseille a autorisé M. C. , en sa qualité de contribuable de la VILLE DE MARSEILLE, à déposer au nom de celle-ci, à ses frais et risques, une plainte avec constitution de partie civile du chef de délits qui auraient été commis au détriment de la ville dans le cadre de la concession que celle-ci a consentie à la société d’économie mixte « Marseille Habitat » pour l’aménagement du « périmètre de restauration immobilière du quartier du Panier » ; que la VILLE DE MARSEILLE demande l’annulation de cette décision ;

Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant que s’il résulte de l’instruction, en particulier des différents rapports produits par les parties, que la gestion de l’opération s’est révélée peu rigoureuse et a pu donner lieu à des dépenses injustifiées, ce qui a d’ailleurs conduit la commune à saisir la chambre régionale des comptes, M. C. se borne à faire état de simples soupçons, sans apporter d’éléments précis, à propos des infractions pénales qui auraient pu être commises au détriment de la ville par des agents de la société d’économie mixte ou des prestataires de service extérieurs ; que, par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que le dépôt d’une plainte avec constitution de partie civile envisagée par M. C. présenterait des chances de succès ; que la VILLE DE MARSEILLE est, dès lors, fondée à demander l’annulation de la décision du 20 septembre 2001 par laquelle le tribunal administratif de Marseille a autorisé M. C. à engager au nom de la ville une telle action à raison de ces faits ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la VILLE DE MARSEILLE, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à M. C. la somme qu’il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu’il n’y a pas davantage lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner M. C. à payer à la VILLE DE MARSEILLE la somme qu’elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La décision du tribunal administratif de Marseille en date du 20 septembre 2001 est annulée.

Article 2 : La demande d’autorisation de plaider présentée par M. C. est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la VILLE DE MARSEILLE et de M. C. tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la VILLE DE MARSEILLE, à M. Daniel C. et au ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

 


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