A la suite de la suspension de l’arrêté ministériel d’expulsion d’Abdelkader Bouziane par ordonnances du Tribunal administratif de Lyon des 23 et 26 avril 2004, le Gouvernement est en train de procéder à la modification au régime juridique applicable en matière d’expulsion.
Aux termes de l’article 26 de l’ordonnance du 2 novembre 1945, l’expulsion d’un étranger ne peut être prononcé lorsque certaines situations sont constatées : réside en France depuis au plus l’âge de 13 ans, réside en France depuis 20 ans, marié, sous certaines conditions, avec un ressortissant français ou pour des raisons médicales.
A ce principe existe une exception. L’expulsion pourra être prononcée lorsque l’étranger a des comportements de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l’Etat, ou liés à des activités à caractère terroriste, ou constituant des actes de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à raison de l’origine ou de la religion des personnes.
Suite à l’affaire Bouziane, une proposition de loi qui sera examinée en première lecture par le Sénat a été déposée au Parlement tendant à étendre le champ d’application de cette exception. Ainsi, l’expulsion pourra avoir lieu pour les personnes ayant des comportements constituant des "actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes".
Complétant ce dispositif juridique, le Gouvernement envisage également de modifier la compétence juridictionnelle en la matière. D’abord prévu d’être remis au Conseil d’Etat, statuant en premier et dernier ressort, un projet de décret tend à attribuer la compétence, en la matière, en première instance au seul Tribunal administratif de Paris.
En effet, le texte tend à modifier l’article R. 312-8 du Code de justice administrative qui précise que "les litiges relatifs aux décisions individuelles prises à l’encontre de personnes par les autorités administratives dans l’exercice de leurs pouvoirs de police relèvent de la compétence du tribunal administratif du lieu de résidence des personnes faisant l’objet des décisions attaquées à la date desdites décisions".
Selon le projet de décret, un second alinéa serait ajouté indiquant que "toutefois, cette disposition n’est pas applicable aux litiges relatifs aux décisions ministérielles prononçant l’expulsion d’un ressortissant étranger, fixant le pays de renvoi de celui-ci ou assignant à résidence l’étranger qui a fait l’objet d’une décision ministérielle d’expulsion""
Ces nouvelles dispositions, créant un pôle juridictionnel administratif spécialisé au sein du TA de Paris, devraient concerner les recours enregistrés à compter du 1er octobre 2004.
Le projet de décret a été transmis au Conseil d’Etat pour être examiné lors de la prochaine séance du Conseil supérieur des TA-CAA prévue le 6 juillet 2004. (BT)