CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
N° 305279
SOCIETE SCHERING SAS
Mme Jeannette Bougrab
Rapporteur
M. Luc Derepas
Commissaire du gouvernement
Séance du 10 octobre 2008
Lecture du 29 octobre 2008
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 1ère et 6ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 1ère sous-section de la Section du contentieux
Vu la requête, enregistrée le 4 mai 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour la SOCIETE SCHERING SAS, dont le siège est Z.I. de Roubaix-Est, rue de Toufflers à Lys-lez-Lannoy (59390), représentée par ses représentants légaux ; la SOCIETE SCHERING SAS demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler les décisions des 9 mars et 6 avril 2007 du Comité économique des produits de santé mettant à sa charge le versement d’une somme de 692 125 euros au titre de la ristourne due pour la spécialité Androtardyl, en application de la convention signée le 21 juillet 2003 ;
2°) de mettre à la charge du Comité économique des produits de santé le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de Mme Jeannette Bougrab, Maître des Requêtes,
les observations de la SCP Monod, Colin, avocat de la SOCIETE SCHERING SAS,
les conclusions de M. Luc Derepas, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 162-16-4, L. 162-17-3 et L. 162-17-4 du code de la sécurité sociale que le Comité économique des produits de santé peut conclure avec une entreprise pharmaceutique une convention, afin de fixer le prix d’un médicament et, le cas échéant, prévoir une évolution de ce prix en fonction du volume global des ventes de l’ensemble des spécialités appartenant à la classe thérapeutique de ce médicament ;
Considérant qu’en application de ces dispositions, le Comité économique des produits de santé a conclu une convention le 21 juillet 2003 avec la SOCIETE SCHERING SAS qui exploite la spécialité Androtardyl, pour laquelle elle a obtenu une autorisation de mise sur le marché et qui est inscrite sur la liste des spécialités remboursables ; que cette convention fixe, dans son article 1er, le prix de vente de cette spécialité à un montant hors taxes de 7 euros par boîte ; qu’elle précise dans son article 2 que ce prix est fixé pour une quantité inférieure à 185 000 boîtes remboursées par an, le nombre de boîtes remboursées étant " constaté, tous les ans en février, sur la base des statistiques de remboursement de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), dites " MEDIC’Assurance maladie " et que, en cas de dépassement de ce chiffre, le laboratoire sera redevable d’une ristourne de 7 euros par boîte supplémentaire ;
Considérant que l’article 2 de la convention du 21 juillet 2003 prévoit que le nombre de boîtes remboursées est déterminé à partir des statistiques établies par la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés dites " MEDIC’Assurance maladie " ; que le Comité économique des produits de santé ne pouvait, dès lors, sans méconnaître les termes de cette convention, déterminer le montant de la ristourne due par la SOCIETE SCHERING SAS au titre de 2006 en se fondant sur une autre référence que la base statistique " MEDIC’Assurance maladie " ; que, par suite, la SOCIETE SCHERING SAS est fondée à soutenir que les décisions attaquées, par lesquelles le Comité économique des produits de santé a mis à sa charge une ristourne de 692 125 euros au titre de 2006, ont été prises en méconnaissance de la convention du 21 juillet 2003 ; qu’il appartient au Conseil d’Etat, juge de pleine juridiction en vertu de l’article L. 162-17-4 du code de la sécurité sociale, de fixer le montant des sommes qui peuvent légalement être mises à la charge de la SOCIETE SCHERING SAS :
Considérant qu’il résulte de l’instruction et qu’il n’est pas contesté que le nombre de boîtes remboursées d’Androtardyl s’élève, selon la base " MEDIC’Assurance maladie ", à 205 847 en 2006 ; qu’ainsi, la ristourne due en application de la convention du 21 juillet 2003 pour l’année 2006 est de 145 929 euros ; qu’il y a lieu, en conséquence, de décharger la SOCIETE SCHERING SAS de l’obligation de payer la somme qui lui a été réclamée par le Comité économique des produits de santé à hauteur de la différence entre cette somme et le montant de 145 929 euros et de réformer dans cette mesure les décisions des 9 mars et 6 avril 2007 ;
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société requérante et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La SOCIETE SCHERING SAS est déchargée de l’obligation de payer la somme qui lui a été réclamée au titre de l’année 2006 par le Comité économique des produits de santé en application de la convention du 21 juillet 2003 à hauteur de la différence entre cette somme et le montant de 145 929 euros.
Article 2 : Les décisions des 9 mars et 6 avril 2007 du Comité économique des produits de santé sont réformées en ce qu’elles ont de contraire à la présente décision.
Article 3 : L’Etat versera la somme de 1 500 euros à la SOCIETE SCHERING SAS en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE SCHERING SAS, au Comité économique des produits de santé et à la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.