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Cour administrative d’appel de Nantes, 23 mars 2004, n° 01NT01986, Commune de Loctudy

Il résulte des termes mêmes des dispositions de l’article R. 361-19 du code des communes, actuellement reprises à l’article R. 2223-10 du code général des collectivités territoriales, que les obligations mises à la charge de la commune, en cas de translation de cimetières, ne valent qu’à l’égard des concessionnaires. Si les dispositions de l’article R. 361-19 du code des communes imposaient à la commune de prendre à sa charge les frais de transfert des sépultures faisant l’objet d’une concession, ces dispositions ne faisaient pas obstacle à ce que le maire, chargé par l’article L. 2213-7 du code général des collectivités territoriales de la police des cimetières imposât, en cas de translation de cimetières et malgré l’opposition de la famille, la libération d’un emplacement, au demeurant occupé sans que la famille ait obtenu une concession dans l’ancien cimetière.

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE NANTES

N° 01NT01986

Commune de Loctudy

M. DUPUY
Président de chambre

Mme WEBER-SEBAN
Rapporteur

M. COËNT
Commissaire du gouvernement

Séance du 24 février 2004
Lecture du 23 mars 2004

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE NANTES

Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés au greffe de la Cour, respectivement, le 17 et le 22 octobre 2001, présentés pour la commune de Loctudy, représentée par son maire en exercice à ce dûment habilité par délibération du 7 décembre 2001 du conseil municipal et dont le siège est Hôtel de ville 29750 Loctudy, par Me BOIS, avocat au barreau de Rennes ;

La commune de Loctudy demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 00-1188 du 29 juin 2001 du Tribunal administratif de Rennes en tant qu’il a, d’une part, annulé, à la demande de Mme Marie-Claude R., les décisions des "22/26 octobre 1999" et 17 janvier 2000 par lesquelles le maire lui a enjoint de libérer l’emplacement n° 14 de l’ancien cimetière communal occupé par la sépulture familiale, d’autre part, l’a condamnée à payer à l’intéressée la somme de 6 000 F au titre de l’article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme R. devant le Tribunal administratif de Rennes ;

3°) de condamner Mme R. à lui verser une somme de 1 524,49 euros au titre des frais exposés en première instance et non compris dans les dépens ; 4°) de condamner Mme R. à lui verser une somme de 1 524,49 euros au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des communes ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 24 février 2004 :
- le rapport de Mme WEBER-SEBAN, premier conseiller,
- les observations de Me COLLET, substituant Me BOIS, avocat de la commune de Loctudy,
- et les conclusions de M. COËNT, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par arrêté du 3 novembre 1969, le préfet du Finistère a autorisé la commune de Loctudy à créer un nouveau cimetière rue du général de Penfentenyo, lequel a été mis en service le 1er janvier 1974 ; que, par arrêté du 30 septembre 1993, le préfet a ordonné la fermeture de l’ancien cimetière communal contigu à l’église de Loctudy ; que, par délibération du 6 juin 1997, le conseil municipal a approuvé le projet de réaménagement de l’ancien cimetière et décidé, dans le cadre de ce projet, de n’y maintenir que 48 sépultures et de transférer les autres tombes dans le nouveau cimetière ; que dans le cadre de cette opération de translation de cimetière, le maire de Loctudy a, par décision du 26 octobre 1999 confirmée le 17 janvier 2000 sur recours gracieux, enjoint à Mme R. de libérer l’emplacement n° 14 de l’ancien cimetière où sont inhumés ses parents ; que la commune interjette appel du jugement du 29 juin 2001 du Tribunal administratif de Rennes en tant qu’il a, à la demande de Mme R., annulé lesdites décisions du 26 octobre 1999 et du 17 janvier 2000 ;

Sur la légalité des décisions contestées :

Sans qu’il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué et sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Loctudy à la demande de première instance :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 2223-6 du code général des collectivités territoriales : "En cas de translation de cimetières, les cimetières existants sont fermés dès que les nouveaux emplacements sont disposés à recevoir les inhumations. Ils restent dans l’état où ils se trouvent, sans que l’on en puisse faire usage pendant cinq ans. Toutefois, les inhumations peuvent continuer à être faites dans les caveaux de famille édifiés dans les cimetières désaffectés, à concurrence du nombre de places disponibles au moment de la fermeture de ces cimetières, à condition que ceux-ci satisfassent aux prescriptions légales d’hygiène et de salubrité et que l’affectation du sol à un autre usage ne soit pas reconnue d’utilité publique." ; qu’aux termes de l’article L. 2223-7 du même code : "Passé le délai de cinq ans, les cimetières désaffectés peuvent être affermés par les communes auxquelles ils appartiennent, mais à condition qu’ils ne soient qu’ensemencés ou plantés, sans qu’il puisse être fait aucune fouille ou fondation pour des constructions de bâtiment jusqu’à ce qu’il en soit autrement ordonné." ; qu’aux termes de l’article R. 361-19 du code des communes alors en vigueur : "En cas de translation d’un cimetière, les concessionnaires sont en droit d’obtenir, dans le nouveau cimetière, un emplacement égal en superficie au terrain qui leur avait été concédé. Conformément au 14° de l’article L. 221-2, les restes qui y avaient été inhumés sont transportés aux frais de la commune." ;

Considérant qu’il résulte des termes mêmes des dispositions précitées de l’article R. 361-19 du code des communes, actuellement reprises à l’article R. 2223-10 du code général des collectivités territoriales, que les obligations mises à la charge de la commune, en cas de translation de cimetières, ne valent qu’à l’égard des concessionnaires ; que si Mme R., a produit un titre de concession pour trois tombes correspondant à l’emplacement n° 80, ensuite reconduit aux emplacements n° 27, n° 28 et n° 29, il est constant que ce titre ne concerne pas l’emplacement n° 14 litigieux ; que, par suite, Mme R., qui ne saurait utilement faire valoir que ses parents auraient dû bénéficier d’un des emplacements ainsi reconduits, ne peut être regardée comme ayant la qualité de concessionnaire au sens des dispositions précitées de l’article R. 361-19 du code des communes alors en vigueur ; qu’il suit de là, qu’il n’incombait pas à la commune de Loctudy de procéder au transport à ses frais des restes inhumés dans l’emplacement n° 14 ; que, par suite, en annulant les décisions du 26 octobre 1999 et du 17 janvier 2000 par lesquelles le maire de Loctudy a demandé à Mme R. de libérer ledit emplacement, au motif qu’une telle obligation incombait à la commune, le Tribunal administratif de Rennes a commis une erreur de droit ; qu’il y a lieu, dès lors, d’annuler le jugement attaqué ;

Considérant, toutefois, qu’il appartient à la Cour, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par Mme R. devant le Tribunal administratif de Rennes ;

Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de l’illégalité, au regard des dispositions de l’article L. 2223-6 du code général des collectivités territoriales lesquelles, d’ailleurs, n’étaient pas en vigueur de l’arrêté du 30 septembre 1993 du préfet du Finistère ordonnant la fermeture de l’ancien cimetière, de même arrêté en tant qu’il a interdit toute inhumation dans ledit cimetière, est inopérant à l’égard des décisions contestées dont l’objet est de prononcer, non une interdiction d’inhumation, mais une injonction de transférer une sépulture ; que, de même, la circonstance que, postérieurement audit arrêté préfectoral du 30 septembre 1993, des inhumations aient été autorisées dans l’ancien cimetière est, en tout état de cause, sans influence sur la légalité des décisions contestées ;

Considérant, en second lieu, que si les dispositions précitées de l’article R. 361-19 du code des communes imposaient à la commune de prendre à sa charge les frais de transfert des sépultures faisant l’objet d’une concession, ces dispositions ne faisaient pas obstacle à ce que le maire, chargé par l’article L. 2213-7 du code général des collectivités territoriales de la police des cimetières imposât, en cas de translation de cimetières et malgré l’opposition de la famille, la libération d’un emplacement, au demeurant occupé sans que la famille ait obtenu une concession dans l’ancien cimetière ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la commune de Loctudy est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de Mme R., la décision du 26 octobre 1999, confirmée le 17 janvier 2000, par laquelle le maire a enjoint à l’intéressée de libérer l’emplacement n° 14 de l’ancien cimetière occupé par la sépulture familiale ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d’une part, que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Loctudy, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer à Mme R. la somme que cette dernière demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, d’autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, en application de ces mêmes dispositions, de condamner Mme R. à payer à la commune de Loctudy, d’une part, une somme de 1 000 euros au titre des frais de même nature exposés par cette dernière en première instance, d’autre part, une même somme de 500 euros au titre desdits frais qu’elle a exposés en appel ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 29 juin 2001 du Tribunal administratif de Rennes est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme R. devant le Tribunal administratif de Rennes est rejetée.

Article 3 : Mme R. versera à la commune de Loctudy (Finistère), une somme totale de 1 500 euros (mille cinq cent euros) au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Loctudy, à Mme Marie-Claude R. et au ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

 


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