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Conseil d’Etat, 30 avril 2003, n° 183110, Société Sovico

Si le produit est considéré comme importé lorsque les formalités douanières de mise à la consommation dans le pays tiers ont été accomplies, il appartient à la société exportatrice d’établir la preuve de l’accès effectif des produits au marché du pays de destination en produisant l’un des documents visés au 3° de l’article 20, qui peut être notamment un certificat de dédouanement, ou, si ces documents sont considérés comme insuffisants, les documents mentionnés au 4° du même article.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 183110

SOCIETE SOVICO

M. Logak
Rapporteur

M. Olson
Commissaire du gouvernement

Séance du 19 mars 2003
Lecture du 30 avril 2003

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 5ème et 7ème sous-section réunies)

Sur le rapport de la 5ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 octobre 1996 et 3 février 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la SOCIETE SOVICO, dont le siège est route de la petite vitesse - Abattoirs à Coutances (50200) ; la SOCIETE SOVICO demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt du 12 septembre 1996 par lequel la cour administrative d’appel de Paris a, à la demande de l’Office national interprofessionnel des viandes, de l’élevage et de l’agriculture (OFIVAL), annulé le jugement du 23 juin 1993 du tribunal administratif de Paris et a rejeté la demande présentée par elle devant ce tribunal dirigée contre le titre de recettes émis à son encontre et rendu exécutoire par le directeur de l’OFIVAL le 11 décembre 1990 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement (CEE) n° 2730/79 de la commission du 29 novembre 1979, portant modalités communes d’application du régime des restitutions à l’exportation pour les produits agricoles ;

Vu le code des douanes ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Logak, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Celice, Blancpain, Soltner, avocat de la SOCIETE SOVICO et de la SCP Ancel, Couturier-Heller, avocat de l’Office national interprofessionnel des viandes de l’élevage et de l’aviculture,
- les conclusions de M. Olson, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SOCIETE SOVICO a exporté en 1985 et 1986 environ 200 tonnes de viande bovine destinées à l’Afrique du Sud ; qu’elle a bénéficié, après avoir produit des certificats de dédouanement établis par les services des douanes de ce pays, de restitutions à l’exportation en application du règlement CEE n° 2730/79 du 29 novembre 1979, pour un montant de 1 951 729,80 F ; qu’à la suite d’enquêtes administratives, l’Office national interprofessionnel des viandes de l’élevage et de l’aviculture (OFIVAL), a demandé le 27 septembre 1988 à la SOCIETE SOVICO le remboursement des sommes perçues, puis a émis à l’encontre de cette société, le 11 décembre 1990, un état exécutoire destiné à obtenir le reversement de ces sommes ; que, par un jugement du 23 juin 1993, le tribunal administratif de Paris a annulé le titre de recettes émis à l’encontre de la société ; que, saisie par l’OFIVAL, la cour administrative d’appel de Paris a annulé ce jugement par un arrêt en date du 12 septembre 1996 ;

Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu’en réponse à la requête d’appel formée par l’OFIVAL, la SOCIETE SOVICO a fait valoir que l’OFIVAL ne lui a pas exposé en quoi il avait des doutes motivés sur la réalité des exportations de la société à destination de l’Afrique du Sud et qu’ainsi il ne l’a pas mise en mesure de présenter ses observations à ce sujet ; que la cour n’a pas répondu à ce moyen, par lequel la société entendait faire valoir que les droits de la défense n’avaient pas été respectés ; que, par suite, l’arrêt attaqué doit être annulé ;

Considérant qu’en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu de régler l’affaire au fond ;

Considérant qu’aux termes de l’article 10 du règlement CEE n° 2730/79 du 29 novembre 1979 : "Le paiement de la restitution est subordonné, en sus de la condition que le produit ait quitté le territoire géographique de la communauté, à la condition que le produit ait été, sauf s’il a péri en cours de transport par suite d’un cas de force majeure, importé dans un pays tiers et, le cas échéant, dans un pays tiers déterminé : a) lorsque des doutes sérieux existent quant à la destination réelle du produit. / (...) les services compétents des Etats membres peuvent exiger des preuves supplémentaires de nature à démontrer à la satisfaction des autorités compétentes que le produit a été effectivement mis en l’état, sur le marché du pays tiers d’importation" ; qu’aux termes de l’article 20 du même règlement du 29 novembre 1979 : "1. Dans le cas de la différenciation du taux de la restitution selon la destination, le paiement de la restitution pour les exportations vers les pays tiers est subordonné (...) à la condition que le produit ait été importé dans le pays tiers (...). 2. Le produit est considéré comme importé lorsque les formalités douanières de mise à la consommation dans le pays tiers ont été accomplies. 3. La preuve de l’accomplissement de ces formalités est apportée : a) par la production du document douanier ou de sa copie (...) ; b) ou par la production du "certificat de dédouanement" établi sur un formulaire conforme au modèle figurant à l’annexe II (...). 4. Toutefois, si aucun des documents visés au § 3 ne peut être produit par suite de circonstances indépendantes de la volonté de l’exportateur ou s’ils sont considérés comme insuffisants, la preuve de l’accomplissement des formalités douanières de mise à la consommation peut être considérée comme apportée par la production de l’un ou plusieurs des documents suivants : a) copie du document de déchargement émis ou visé dans le pays tiers (...) ; b) attestation de déchargement délivrée par les services officiels d’un des Etats membres établis dans le pays de destination ; c) attestation de déchargement établie par des sociétés spécialisées sur le plan international en matière de contrôle et de surveillance et agréées par l’Etat membre où les formalités douanières d’exportation ont été accomplies (...)" ;

Considérant qu’il résulte clairement des dispositions précitées des articles 10 et 20 du règlement CEE n° 2730/79 du 29 novembre 1979, telles que la Cour de justice des communautés les a interprétées, notamment par son arrêt en date du 31 mars 1993, que si le produit est considéré comme importé lorsque les formalités douanières de mise à la consommation dans le pays tiers ont été accomplies, il appartient à la société exportatrice d’établir la preuve de l’accès effectif des produits au marché du pays de destination en produisant l’un des documents visés au 3° de l’article 20, qui peut être notamment un certificat de dédouanement, ou, si ces documents sont considérés comme insuffisants, les documents mentionnés au 4° du même article ; qu’ainsi, en jugeant que la SOCIETE SOVICO avait accompli les formalités douanières établissant la commercialisation effective des marchandises dans le pays pour lequel des restitutions ont été octroyées, dès lors que cette société avait produit un certificat de dédouanement émanant des services douaniers de la République d’Afrique du Sud, le tribunal administratif s’est fondé sur une interprétation erronée des prescriptions du règlement CEE du 29 novembre 1979 ; que, par suite, l’OFIVAL est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris s’est fondé sur cette interprétation pour annuler le titre de recettes émis à l’encontre de la SOCIETE SOVICO ;

Considérant, toutefois, qu’il appartient au Conseil d’Etat, saisi de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens présentés par la SOCIETE SOVICO devant le tribunal administratif de Paris, la cour administrative d’appel de Paris et le Conseil d’Etat ;

Considérant que l’OFIVAL, après avoir octroyé des restitutions à la SOCIETE SOVICO sur le fondement des éléments que cette société avait déclarés et des certificats de dédouanement qu’elle avait produits, a demandé à cette société, à l’issue d’une enquête réalisée par la direction générale des douanes révélant des éléments différents de ceux ressortant des déclarations et des éléments produits, de rembourser les sommes perçues, puis a émis à cet effet un titre exécutoire à l’encontre de cette société ; qu’en exigeant le reversement des restitutions octroyées sur le fondement d’autres éléments que ceux déclarés par la société requérante, sans avoir mis préalablement cette dernière à même de présenter ses observations, conformément au principe général des droits de la défense, l’OFIVAL a méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure ; que l’état exécutoire, émis à l’issue d’une procédure irrégulière, doit, par suite, être annulé ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’Office national interprofessionnel des viandes de l’élevage et de l’aviculture n’est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé l’état exécutoire pris à l’encontre de la SOCIETE SOVICO le 11 décembre 1990 ;

Sur les conclusions incidentes présentées par la SOCIETE SOVICO tendant à l’octroi de dommages-intérêts :

Considérant que ces conclusions présentent à juger un litige distinct de celui sur lequel porte l’appel principal et ne sont par suite, pas recevables ;

Sur les conclusions tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la SOCIETE SOVICO qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à l’OFIVAL la somme qu’il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu, en revanche de condamner l’OFIVAL à verser à la SOCIETE SOVICO une somme de 750 euros au titre des frais de même nature qu’elle a exposés ;

D E C I D E :

Article 1er : L’arrêt en date du 12 septembre 1996 de la cour administrative d’appel de Paris est annulé.

Article 2 : La requête présentée par l’Office national interprofessionnel des viandes de l’élevage et de l’aviculture (OFIVAL) devant la cour administrative d’appel de Paris est rejetée.

Article 3 : Les conclusions incidentes présentées en appel par la SOCIETE SOVICO sont rejetées.

Article 4 : L’Office national interprofessionnel des viandes de l’élevage et de l’aviculture (OFIVAL) versera à la SOCIETE SOVICO une somme de 750 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE SOVICO, à l’Office national interprofessionnel des viandes de l’élevage et de l’aviculture (OFIVAL), au ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche et des affaires rurales et au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

 


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