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Conseil d’Etat, 30 septembre 2002, n° 220127, M. Camille P.

L’agent nommé en qualité de stagiaire dans un corps de fonctionnaires doit accomplir une période probatoire durant laquelle il n’est pas titularisé dans un grade de la hiérarchie afférente à ce corps. Le classement de cet agent dans la hiérarchie du corps concerné ne peut intervenir que lors de la titularisation qui donne seule un caractère définitif à la nomination.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N°s 220127-220128,220131-220132

M. P.

M. El Nouchi
Rapporteur

M. Bachelier
Commissaire du gouvernement

Séance du 9 septembre 2002
Lecture du 30 septembre 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 8ème et 3ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 8ème sous-section de la Section du contentieux

Vu 1°) sous le numéro 220127, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 avril 2000 et 31 juillet 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Camille P. ; M. P.demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt du 16 mars 2000 par lequel la cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l’annulation du jugement du 23 février 1996 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a rejeté sa demande tendant à l’annulation, d’une part, de la décision implicite du chef d’établissement du lycée Julien de Rontaunay rejetant sa demande du 21 février 1994 tendant à l’exécution de l’arrêté ministériel du 2 juin 1992 le nommant dans cet établissement en qualité de professeur de lycée professionnel de deuxième grade à compter du 26 août 1992 et, d’autre part, de l’arrêté ministériel du 23 février 1994 rapportant les arrêtés des 2 juin et 6 juillet 1992 relatifs à son affectation audit lycée ainsi que l’arrêté du 4 novembre 1993 relatifs à la régularisation de sa situation de professeur stagiaire ;

2°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 8 000 F au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°) sous le n° 220128, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 avril 2000 et 31 juillet 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Camille P. ; M. P.demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt du 20 janvier 2000 par lequel la cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l’exécution dû jûgement du 23 février 199E du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion annulant l’arrêté du 29 septembre 1993 di ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’insertion professionnelle prolongeant le stage du requérant à compter du 1’septembre 1993, à ce que soi déclaré illégal l’arrêté du 10 avril 1996 prononçant son licenciement et à ce que ledit ministre reconstitue sa carrière, sous astreinte ;

2°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 8 000 F au titre de l’articlE L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 3°) sous le n° 220131, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 avril 2000 et 31 juillet 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Camille P. ; M. P.demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt du 20 janvier 2000 par lequel la cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l’annulation du jugement du 6 mars 1996 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a rejeté ses demandes tendant, d’une part, à l’annulation de la décision implicite du recteur de l’académie de la Réunion rejetant sa demande du 14 novembre 1994 tendant à ce qu’il soit réintégré dans son emploi de professeur de lycée professionnel de deuxième grade au lycée professionnel commercial Julien de Rontaunay de Sainte-Clotilde et, d’autre part, à la condamnation de l’Etat à lui verser une indemnité de 600 000 F au titre du préjudice subi ;

2°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 8 000 F au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 4°) sous le n° 220132, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 avril 2000 et 31 juillet 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Camille P. ; M. P. demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt du 20 janvier 2000 par lequel la cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l’annulation du jugement du 18 juin 1997 du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion en ce qu’il a enjoint au ministre, après avoir annulé l’arrêté du 17 décembre 1993 mettant fin à ses fonctions, -de statuer à nouveau avant le ter septembre 1997 sur la situation administrative du requérant -et à ce qu’il soit enjoint à l’administration de procéder à la reconstitution de sa carrière et à sa titularisation au deuxième grade du corps des professeurs de lycée professionnel ;

2°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 8 000 F au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu l’article 20 de la loi n° 92-678 du 20 juillet 1992, ensemble le décret n° 85-1524 du 31 décembre 1985 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. El Nouchi, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. P.,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées concernent la situation du même fonctionnaire ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant qu’il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond que M. P. a été reçu en 1990 au concours externe de professeur de lycée professionnel du deuxième grade ; qu’il a été nommé professeur stagiaire et affecté à l’institut universitaire de formation des maîtres de Saint-Denis de la Réunion, à compter du 1" septembre 1991, pour y suivre au cours de l’année scolaire 1991-1992 la formation conduisant au certificat d’aptitude au professorat de lycée professionnel ; que par arrêtés des 2 juin et 6 juillet 1992, le ministre de l’éducation nationale l’a affecté, dans l’attente de la validation de son stage, au lycée de Rontaunay à Sainte-Clotilde à compter du 26 août 1992, en qualité de professeur de lycée professionnel de deuxième grade ; que, toutefois, par une délibération du 26 juin 1992, le jury académique a refusé de valider cette année de stage ;

Considérant que l’agent nommé en qualité de stagiaire dans un corps de fonctionnaires doit accomplir une période probatoire durant laquelle il n’est pas titularisé dans un grade de la hiérarchie afférente à ce corps ; que le classement de cet agent dans la hiérarchie du corps concerné ne peut intervenir que lors de la titularisation qui donne seule un caractère définitif à la nomination ;

Considérant, en premier lieu, que si M. P. a soutenu devant la cour administrative d’appel de Bordeaux, qu’il avait été affecté et installé en qualité de professeur de lycée professionnel de deuxième grade à compter du 26 août 1992, sa titularisation était subordonnée à l’obtention du certificat d’aptitude au professorat de lycée professionnel de deuxième grade validant le stage ; que faute d’avoir obtenu ce certificat, le requérant conservait nécessairement la qualité de professeur stagiaire ; qu’ainsi, par l’arrêt attaqué du 16 mars 2000, la cour administrative d’appel a pu, sans dénaturer les pièces du dossier ni commettre d’erreur de droit, juger que ni l’arrêté d’affectation du 2 juin 1992, ni le procès-verbal d’installation du 3 septembre 1992, ne pouvaient être regardés, en l’absence de mesure expresse de titularisation, comme ayant conféré à M. P. le grade de professeur titulaire de lycée professionnel de deuxième grade au 26 août 1992 ; que la cour n’a pas davantage commis d’erreur de droit, par son arrêt du 20 janvier 2000, en relevant que le jugement du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion du 23 février 1996 annulant l’arrêté du ministre de l’éducation du 29 septembre 1993 qui prolongeait la durée de son stage, n’avait pas pour conséquence d’obliger ledit ministre à le titulariser et à le réintégrer sur un emploi au lycée professionnel commercial Julien de Rontaunay à compter du 26 août 1992 ; que c’est également sans commettre d’erreur de droit que la cour a, par un arrêt du même jour, rejeté les conclusions dirigées contre la décision implicite née du silence gardé par le recteur de l’académie de la Réunion sur la demande de réintégration que le requérant lui- avait présentée le 14 novembre 1994 ;

Considérant, en deuxième lieu, qu’ainsi qu’il a été dit ci-dessus, les arrêtés des 2 juin et 6 juillet 1992 affectant M. P. au lycée de Rontaunay à compter du 26 août 1992 étaient assortis d’une condition dont il est constant qu’elle ne s’est pas réalisée ; que, par suite, ces arrêtés ne constituaient pas des décisions créatrices de droit devenues définitives que le ministre n’aurait pu légalement retirer par l’arrêté du 23 février 1994 ; que ce motif de pur droit, qui répond à un moyen invoqué devant les juges du fond et ne comporte l’appréciation d’aucune circonstance de fait, doit être substitué au motif retenu dans l’arrêt attaqué du 16 mars 2000 dont il justifie légalement, sur ce point, le dispositif ;

Considérant, en troisième lieu que, par un jugement rendu le 18 juin 1997, le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a annulé l’arrêté du 17 décembre 1993 par lequel le ministre de l’éducation nationale a mis fin aux fonctions de professeur de lycée professionnel stagiaire du deuxième grade de M. P. et enjoint au ministre de statuer à nouveau avant le 1er septembre 1997 sur la situation administrative du requérant ; que ce jugement ayant été frappé d’appel par le ministre, M. P. a, de son côté, saisi la cour administrative d’appel de conclusions tendant à ce que, pour en assurer l’exécution, l’administration procède à une reconstitution de sa carrière comportant sa titularisation à compter du 26 août 1992 ; que, pour rejeter ces conclusions, la cour a jugé que ni la décision du 2 juin 1992 l’affectant au lycée de Rontaunay, ni le procès-verbal d’installation du 3 septembre 1992 n’impliquaient la titularisation de M. P. et que, en l’absence de mesure expresse de titularisation, l’intéressé avait conservé la qualité de stagiaire ; qu’il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la cour n’a, ce faisant, ni dénaturé les pièces du dossier, ni commis une erreur de droit ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. P. n’est pas fondé à demander l’annulation des arrêts attaqués ;

Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions des requêtes susvisées, n’appelle aucune mesure d’exécution ;

Sur les conclusions de M. P. tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. P. la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. P. sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Camille P. et au ministre de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche.

 


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