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Conseil d’Etat, Avis, 16 février 2004, n° 261652, Association familiale Les papillons blancs de Denain et environs

Les dispositions du III de l’article L. 314-7 du code de l’action sociale et des familles issues de l’article 55 de la loi du 2 janvier 2002, qui définissent les conditions dans lesquelles l’autorité compétente en matière de tarification peut modifier les prévisions de charges ou de produits, sont suffisamment précises pour être applicables en l’absence de dispositions réglementaires, dont la loi ne prévoit d’ailleurs pas l’intervention, précisant notamment les indicateurs de comparaison des coûts des établissements fournissant des prestations comparables. Elles sont donc entrées en vigueur immédiatement.

CONSEIL D’ETAT

N° 261652

ASSOCIATION FAMILIALE LES PAPILLONS BLANCS DE DENAIN ET ENVIRONS

Mme de Salins
Rapporteur

M. Stahl
Commissaire du Gouvernement

Séance du 26 janvier 2004
Lecture du 16 février 2004

REPUBLIQUE FRANÇAISE

Le Conseil d’Etat

(Section du contentieux, 1ère et 6ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 1ère sous-section de la Section du contentieux

Vu le jugement du 17 octobre 2003, enregistré le 10 novembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, par lequel le tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale de Nancy, avant de statuer sur la demande de l’ASSOCIATION FAMILIALE LES PAPILLONS BLANCS DE DENAIN ET ENVIRONS tendant, d’une part, à l’annulation de l’arrêté du 1er juillet 2002 du préfet du Nord fixant les prix de journée applicables à la maison d’accueil spécialisée de Denain pour l’année 2002 et, d’autre part, à ce que soient rétablies ses autorisations de dépenses au montant de 4 088 171, 99 euros, a décidé, par application des dispositions de l’article R. 351-7 du code de l’action sociale et des familles qui rendent applicables aux juridictions de la tarification sanitaire et sociale les dispositions de l’article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d’Etat en soumettant à son avis les questions suivantes :

1°) L’abrogation, par la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002, des dispositions de l’article L. 315-3 du code de l’action sociale et des familles s’applique-t-elle à la fixation pour l’exercice 2002 du montant global des dépenses autorisées ainsi que des tarifs des établissements et services mentionnés au I de l’article L. 312-1 du même code, en l’absence du décret d’application des dispositions du II de l’article L. 314-7 de ce code ?

2°) Si cette abrogation fait obstacle à ce que les propositions budgétaires d’un établissement soumis à ce régime peuvent être regardées comme ayant fait l’objet d’une approbation tacite, nonobstant l’absence d’engagement, par le préfet, de la procédure contradictoire avant le 1er mars 2002, les dispositions du III de l’article L. 314-7 issues de la loi du 2 janvier 2002 étaient-elles applicables en l’absence de décret définissant notamment les indicateurs de comparaison des coûts des établissements fournissant des prestations comparables ?

Vu les autres pièces du dossier transmis par le tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale de Nancy ;

Vu le code de l’action sociale et des familles, modifié notamment par les articles 55 et 59 de la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale ;

Vu le décret n° 88-279 du 24 mars 1988 relatif à la gestion budgétaire et aux modalités de financement de certains établissements sociaux et médico-sociaux à la charge de l’Etat de l’assurance maladie ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme de Salins, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;

REND L’AVIS SUIVANT :

Jusqu’à l’intervention de la loi du 2 janvier 2002, il résultait des dispositions combinées des articles L. 315-3 et L. 315-8 du code de l’action sociale et des familles et du décret du 24 mars 1988 que les prévisions budgétaires des établissements et services sociaux et médico-sociaux étaient considérées comme tacitement approuvées si l’autorité compétente, à qui elles devaient être soumises, n’avait pas fait connaître sa décision avant le 1er mars de l’année à laquelle elles se rapportaient. L’article 55 de la loi du 2 janvier 2002 a inséré à l’article L. 314-7 de ce code des dispositions modifiant les règles budgétaires applicables à ces organismes. Le I de ce nouvel article dispose désormais que : " (.) sont soumis à l’accord de l’autorité compétente en matière de tarification : / 1° Les emprunts dont la durée est supérieure à un an ; / 2° Les programmes d’investissement et leurs plans de financement ; / 3º Les prévisions de charges et de produits d’exploitation permettant de déterminer les tarifs des prestations prises en charge par l’Etat, les départements ou les organismes de sécurité sociale, ainsi que les affectations de résultats qui en découlent (.) Un décret en Conseil d’Etat précise les conditions dans lesquelles ces charges, produits et résultats sont retracés dans des comptes distincts, en fonction de la nature des prestations, de leur tarification et de leur financement ". Selon le II du même article : " Le montant global des dépenses autorisées ainsi que les tarifs des établissements et services mentionnés au I de l’article L. 312-1 sont notifiés par l’autorité compétente en matière de tarification, au terme d’une procédure contradictoire, au plus tard soixante jours à compter de la date de notification des dotations mentionnées, selon le cas, aux articles L. 313-8, L. 314-3 et L. 314-4, selon des modalités fixées par décret en Conseil d’Etat./ Les décisions mentionnées aux 1° et 2° du I sont opposables à l’autorité compétente en matière de tarification si celle-ci n’a pas fait connaître son opposition dans un délai fixé par décret en Conseil d’Etat. Il en va de même des décisions modificatives concernant les prévisions de charges ou de produits mentionnées au 3º du I qui interviennent après la fixation des tarifs ". Enfin, aux termes du III du même article L. 314-7 : " L’autorité compétente en matière de tarification ne peut modifier que : / 1° Les prévisions de charges ou de produits insuffisantes ou qui ne sont pas compatibles avec les dotations de financement fixées dans les conditions prévues, selon le cas, aux articles L. 313-8, L. 314-3 et L. 314-4 ; / 2° Les prévisions de charges qui sont manifestement hors de proportion avec le service rendu ou avec les coûts des établissements et services fournissant des prestations comparables en termes de qualité de prise en charge ou d’accompagnement (.) ".

Sur la première question :

En n’étendant pas le mécanisme d’approbation tacite, prévu au second alinéa du II du nouvel article L. 314-7 du code de l’action sociale et des familles, aux prévisions initiales de charges et de produits d’exploitation mentionnées au 3° du I du même article qui sont notifiées à l’autorité compétente en matière de tarification, les dispositions précitées de l’article 55 de la loi du 2 janvier 2002 mettent fin à la procédure d’approbation tacite qui s’appliquait, en vertu des articles L. 315-3 et L. 315-8 du même code dans sa rédaction antérieure à la publication de cette loi, aux prévisions annuelles de dépenses et recettes d’exploitation des mêmes établissements. L’application de la règle ainsi fixée par la loi nouvelle, d’où il découle que les prévisions budgétaires de ces établissements ne peuvent être considérées comme approuvées aussi longtemps que l’autorité compétente en matière de tarification ne s’est pas prononcée en ce sens, n’est pas manifestement impossible en l’absence de dispositions réglementaires en précisant les modalités ; en outre, la substitution de l’exigence d’une décision expresse au mécanisme d’approbation tacite auparavant prévu par la loi est dissociable des autres modifications apportées au régime budgétaire de ces établissements et services par le nouvel article L. 314-7, notamment celles dont l’entrée en vigueur doit être regardée comme subordonnée à l’intervention du décret en Conseil d’Etat qu’elles prévoient. Il suit de là que, en tant qu’elles mettent fin à la procédure d’approbation tacite des prévisions budgétaires, les dispositions de l’article 55 de la loi du 2 janvier 2002 sont entrées en vigueur dans les conditions du droit commun, un jour franc après la publication de cette loi au Journal officiel, soit le 5 janvier 2002.

S’agissant des procédures d’approbation des prévisions budgétaires relatives à l’année 2002, qui étaient en cours lors de l’entrée en vigueur de la loi, les organismes en cause ne pouvaient se prévaloir à cette date d’aucune situation juridiquement constituée. En conséquence, la suppression du régime de l’approbation tacite s’est appliquée immédiatement à ces procédures.

Sur la seconde question :

Les dispositions du III de l’article L. 314-7 du code de l’action sociale et des familles issues de l’article 55 de la loi du 2 janvier 2002, qui définissent les conditions dans lesquelles l’autorité compétente en matière de tarification peut modifier les prévisions de charges ou de produits, sont suffisamment précises pour être applicables en l’absence de dispositions réglementaires, dont la loi ne prévoit d’ailleurs pas l’intervention, précisant notamment les indicateurs de comparaison des coûts des établissements fournissant des prestations comparables. Elles sont donc entrées en vigueur immédiatement.

Le présent avis sera notifié au tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale de Nancy, à l’ASSOCIATION FAMILIALE LES PAPILLONS BLANCS DE DENAIN ET ENVIRONS et au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

Il sera publié au Journal officiel de la République française.

 


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