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Conseil d’Etat, référé, 12 mai 2003, n° 256164, Fédération nationale des syndicats libres de la Poste et de France Telecom

Les décisions qui reconnaissent ou qui refusent à un syndicat le caractère d’organisation syndicale représentative, qui n’ont pas de portée réglementaire, doivent être regardées comme ne recevant application qu’au lieu où le syndicat concerné a son siège. Ces décisions ne sont donc pas au nombre des actes administratifs dont le champ d’application s’étend au-delà du ressort d’un seul tribunal administratif. Par suite, elles ne relèvent pas de la compétence du Conseil d’Etat en premier ressort. Il en va nécessairement de même des décisions par lesquelles l’administration accorde ou refuse à un syndicat des avantages ou des moyens dont l’octroi dépend de son caractère d’organisation syndicale représentative.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 256164

FÉDÉRATION NATIONALE DES SYNDICATS LIBRES DE LA POSTE ET DE FRANCE TÉLÉCOM

Ordonnance du 12 mai 2003

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le juge des référés

Vu la requête, enregistrée le 18 avril 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour LA FÉDÉRATION NATIONALE DES SYNDICATS LIBRES DE LA POSTE ET DE FRANCE TÉLÉCOM dont le siège est 37, rue Lucien SAMPAIX à PARIS (75010), représentée par son secrétaire général en exercice ; la Fédération nationale des syndicats libres de la Poste et de France Télécom demande au juge des référés du Conseil d’Etat, sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative :

1° d’ordonner la suspension de la décision, en date du 23 janvier 2003, par laquelle le directeur des relations sociales de la Poste a mis fin aux décharges d’activités de service et aux autorisations d’absence qui lui avaient été accordées ;

2° d’enjoindre à la Poste de lui réattribuer, sous astreinte de 152 euros par jour de retard, ces décharges de service et ces autorisations d’absence ;

3° de condamner la Poste à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient qu’en se fondant, pour prendre les décisions dont la suspension est demandée, sur la cessation de l’affiliation de la fédération requérante à la Confédération des syndicats libres (CSL), la Poste a commis une erreur de fait, car le caractère de syndicat représentatif était reconnu à la fédération requérante elle-même, et une erreur de droit car cette cessation n’était pas de nature à permettre de revenir, avant de nouvelles élections, sur l’appréciation qui avait été portée sur la représentativité de cette fédération ; qu’en outre le directeur des relations sociales de la Poste n’était pas compétent pour prendre les mesures critiquées ; que ces mesures ne pouvaient être arrêtée en dehors de la procédure électorale ; qu’eu égard aux conséquences des décisions critiquées, la condition d’urgence est remplie ; que la gravité de ces conséquences justifie également la demande d’injonction ;

Vu les décisions dont la suspension est demandée ;

Vu la copie de la requête à fin d’annulation présentée à l’encontre de ces décisions ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 mai 2003, présenté par la Poste, dont le siège est 44, boulevard de Vaugirard, 75757, PARIS, Cedex 15 ; la Poste conclut au rejet de la requête et à ce que la fédération requérante soit condamnée à lui verser 1000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que la requête en annulation formée devant le Conseil d’Etat n’est pas recevable dès lors qu’elle est identique à la requête tendant aux mêmes fins présentée par la fédération requérante devant le tribunal administratif de Paris ; que la demande de suspension ne peut par suite être accueillie ; que, subsidiairement, la condition d’urgence n’est pas remplie ; que la Poste était fondée, en droit comme en fait, à tirer les conséquences de la cessation de l’affiliation de la fédération requérante à la CSL ; que le directeur des relations sociales de la Poste était compétent pour prendre les mesures contestées ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 9 mai 2003, présenté pour la Fédération nationale de la Poste et de France Télécom, qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens et ajoute que rien ne s’opposait à ce qu’elle saisît le Conseil d’Etat tout en maintenant une requête devant le tribunal administratif, dont elle soutient que le juge des référés a dénié à tort la compétence de premier ressort ;

Vu le nouveau mémoire enregistré le 12 mai 2003, présenté par la Poste ; la Poste reprend les conclusions et les moyens de ses précédents mémoires, elle ajoute que la requête est présentée par un représentant de la fédération requérante qui ne justifie pas d’une habilitation pour agir au nom de celle-ci ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d’une part la Fédération nationale des syndicats libres de la poste et de France Télécom, et d’autre part, la Poste ;

Vu le procès verbal de l’audience publique du 12 mai 2003 à 11 heures à laquelle ont été entendus :
- Me Vier, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, représentant la fédération requérante ;
- M. Jean-Yves PETIT, représentant la Poste ;
- M. Dominique JACQUOT, représentant la fédération requérante ;

Considérant qu’en vertu de l’article R. 522-8-1 du code de justice administrative, par dérogation aux règles du titre V du livre III de ce code qui régissent le règlement des conflits de compétence au sein de la juridiction administrative, le juge des référés rejette par ordonnance les conclusions dont il est saisi lorsqu’il entend décliner la compétence de sa juridiction ;

Considérant que les décisions qui reconnaissent ou qui refusent à un syndicat le caractère d’organisation syndicale représentative, qui n’ont pas de portée réglementaire, doivent être regardées comme ne recevant application qu’au lieu où le syndicat concerné a son siège ; que ces décisions ne sont donc pas au nombre des actes administratifs dont le champ d’application s’étend au-delà du ressort d’un seul tribunal administratif ; que, par suite, elles ne relèvent pas de la compétence du Conseil d’Etat en premier ressort ; qu’il en va nécessairement de même des décisions par lesquelles l’administration accorde ou refuse à un syndicat des avantages ou des moyens dont l’octroi dépend de son caractère d’organisation syndicale représentative ; que la requête de la fédération requérante, qui tend à la suspension de la décision par laquelle le directeur des relations sociales de la Poste a mis fin, en raison de la modification de l’appréciation de son caractère d’organisation syndicale représentative qui résultait de la cessation de son affiliation à la Confédération des syndicats libres, aux décharges d’activités de service et aux autorisations d’absence qui lui avaient été antérieurement accordées, ne relève donc pas de la compétence du Conseil d’Etat en premier ressort ; que cette requête doit, par suite, être rejetée ;

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Poste, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à verser à la fédération requérante les sommes que celle-ci demande en application de cet article ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner cette fédération à verser à la Poste les sommes que celle-ci demande au même titre ;

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de FÉDÉRATION NATIONALE DES SYNDICATS LIBRES DE LA POSTE ET DE FRANCE TÉLÉCOM est rejetée.

Article 2. Les conclusions de la Poste tendant à l’application de l’article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la FÉDÉRATION NATIONALE DES SYNDICATS LIBRES DE LA POSTE ET DE FRANCE TÉLÉCOM, à la poste.

Copie pour information en sera adressée au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

 


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