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Conseil d’Etat, 19 octobre 2001, n° 214112, M. G.

Eu égard à la nature des contestations portées devant la section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins, aux conditions de désignation des assesseurs ainsi qu’aux modalités d’exercice de leurs fonctions qui les soustraient à toute subordination hiérarchique, les membres de cette juridiction bénéficient de garanties leur permettant de porter, en toute indépendance, une appréciation personnelle sur le comportement professionnel des médecins poursuivis devant la section des assurances sociales.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 214112

G

Mme Picard, Rapporteur

M Schwartz, Commissaire du gouvernement

Lecture du 19 Octobre 2001

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 4 novembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour M Olivier G ; M G demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler la décision en date du 7 septembre 1999 par laquelle la section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins lui a infligé la sanction de l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant huit semaines, dont six semaines assorties du sursis, avec prise d’effet le 3 janvier 2000 ;

2°) de renvoyer l’affaire devant la section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins autrement composée ;

3°) de décider qu’il sera sursis à exécution de ladite décision ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de la sécurité sociale et notamment ses articles L 145-1 à L 145-9 et R 145-4 à R 145-29 ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 95-884 du 3 août 1995 ;

Vu le décret n° 48-1671 du 26 octobre 1948 modifié ;

Vu le décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995 portant code de déontologie médicale ;

Vu la nomenclature générale des actes professionnels des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux fixée par l’arrêté du 27 mars 1972 modifié ;

Vu le code de justice administrative et notamment son article L 761-1 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Picard, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Peignot, avocat de M G et de la SCP Rouvière, Boutet, avocat de la caisse primaire d’assurance maladie de Grenoble,

- les conclusions de M Schwartz, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le premier paragraphe de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales stipule : "Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial établi par la loi, qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle" ;

Considérant qu’aux termes de l’article L 145-7 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 : "La section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins est présidée par un conseiller d’Etat (...). Elle comprend un nombre égal d’assesseurs membres de l’Ordre et d’assesseurs représentant des organismes de sécurité sociale, nommés par l’autorité compétente de l’Etat sur proposition de la caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés" ; qu’aux termes de l’article R 145-7 du même code dans sa rédaction issue du décret n° 96-1053 du 6 décembre 1996 : "La section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins comprend, outre son président, quatre assesseurs. (...) Deux assesseurs représentent les organismes d’assurance maladie. Ils sont nommés par le ministre chargé de la sécurité sociale : 1° Le premier, sur proposition du médecin-conseil national du régime général de sécurité sociale, parmi les médecins-conseils chefs de service ou régionaux ; / 2° Le second, sur proposition conjointe des responsables des services médicaux des régimes de protection sociale agricole et du régime d’assurance maladie des travailleurs non salariés des professions non agricoles, parmi les médecins-conseils chefs de service ou régionaux chargés du contrôle médical" ;

Considérant qu’eu égard à la nature des contestations portées devant la section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins, aux conditions de désignation des assesseurs ainsi qu’aux modalités d’exercice de leurs fonctions qui les soustraient à toute subordination hiérarchique, les membres de cette juridiction bénéficient de garanties leur permettant de porter, en toute indépendance, une appréciation personnelle sur le comportement professionnel des médecins poursuivis devant la section des assurances sociales ; qu’en outre les règles générales de procédure s’opposent à ce qu’un membre d’une juridiction administrative puisse participer au jugement d’un recours relatif à une décision dont il est l’auteur et à ce que l’auteur d’une plainte puisse participer au jugement rendu à la suite du dépôt de celle-ci ; qu’il suit de là qu’alors même que les caisses de sécurité sociale et les médecins-conseils ont la faculté de saisir, par la voie de l’appel, la section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins, M G n’est pas fondé à soutenir que la section des assurances sociales ne satisfait pas à l’exigence d’impartialité et d’indépendance des juridictions rappelée au premier paragraphe de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales en ce qui concerne les juridictions appelées à décider soit de contestations sur des droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation pénale dirigée contre une personne ;

Considérant qu’aux termes de l’article L 145-1 du code de la sécurité sociale : "Les fautes, abus, fraudes et tous faits intéressant l’exercice de la profession relevés à l’encontre des médecins (...) à l’occasion des soins dispensés aux assurés sociaux, sont soumis en première instance à une section du conseil régional de discipline des médecins (...) et en appel à une section distincte de la section disciplinaire du Conseil national de l’Ordre des médecins (...) dite section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins" ;

Considérant qu’en jugeant que des manquements aux dispositions des articles 5 des dispositions générales et 7 du chapitre V du titre VII de la deuxième partie de la nomenclature générale des actes professionnels, constituaient des fautes au sens de l’article L 145-1 du code de la sécurité sociale, et en interprétant à cet effet la portée desdites dispositions, la section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins n’a pas excédé les limites de sa compétence ; Considérant qu’en estimant que si les constatations de fait retenues au soutien d’une décision d’un juge pénal s’imposent au juge disciplinaire avec l’autorité de la chose jugée, l’existence d’une ordonnance de non-lieu fondée sur l’absence de charges suffisantes pour engager des poursuites du chef du délit d’escroquerie n’interdisait pas au juge disciplinaire de prononcer une condamnation si les éléments recueillis au dossier étaient propres à établir que les faits reprochés étaient matériellement exacts et de nature à justifier une sanction, la section des assurances sociales n’a ni commis une erreur de droit ni méconnu l’autorité de la chose jugée ;

Considérant qu’aux termes de l’article 5 des dispositions générales de la nomenclature générale des actes professionnels : "Seuls peuvent être pris en charge ou remboursés par les caisses d’assurance maladie : a) Les actes effectués personnellement par un médecin (...)" et que "(...) Sauf cas expressément prévus par la présente nomenclature, un acte ne peut être coté par un praticien et donner lieu à remboursement que si, pendant la durée de son exécution, ce praticien (...) s’est consacré exclusivement au seul malade qui en a été l’objet (...)" ; que l’article 7 du chapitre V du titre VII de la deuxième partie de la nomenclature générale des actes professionnels prévoit de coter KC 150 le supplément pour renforcement de l’équipe chirurgicale par un second chirurgien dans le cadre d’une intervention sous circulation extra-corporelle ;

Considérant qu’au soutien de la décision attaquée, la section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins a interprété l’article 7 du chapitre V du titre VII de la deuxième partie de la nomenclature, qui autorise le supplément de rémunération KC 150, comme impliquant la disponibilité, pendant toute la durée de l’intervention chirurgicale sous circulation extracorporelle, d’un chirurgien de renfort se tenant dans la salle d’opération ou à proximité immédiate de celle-ci, dans des conditions qui lui permettent d’intervenir sans délai en vue de faire face à toute situation d’urgence comportant un risque pour le malade nécessitant l’intervention d’un second chirurgien aux côtés de celui qui a la charge principale de l’opération ; qu’elle en a déduit que la circonstance que M G avait apporté son concours à un moment de l’intervention ne lui permettait pas d’appliquer la cotation KC 150, dès lors que pendant le reste de la durée de cette intervention il effectuait d’autres actes de chirurgie qui le rendaient indisponible ; qu’en statuant ainsi, la section des assurances sociales n’a entaché sa décision ni d’une erreur de droit ni d’une dénaturation des pièces du dossier ;

Considérant qu’en estimant que les faits reprochés constituaient un manquement à la probité, la section des assurances sociales n’a pas fait une inexacte application de la loi du 3 août 1995 portant amnistie ;

Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la requête de M G ne peut qu’être rejetée ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M G est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M Olivier G au Conseil national de l’Ordre des médecins, à la caisse primaire d’assurance maladie de Grenoble et au ministre de l’emploi et de la solidarité.

 


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