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Conseil d’Etat, 11 juin 2004, n° 248443, Commune de Saint-Maure-des-Fossés et autres

Aucune disposition ne limite la compétence du Premier ministre au règlement des affaires courantes entre les deux tours d’une élection présidentielle.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N°s 248443, 248452, 251470, 251484

COMMUNE DE SAINT-MAUR-DES-FOSSES et autres

Mme von Coester
Rapporteur

Mme Prada Bordenave
Commissaire du gouvernement

Séance du 17 mai 2004
Lecture du 11 juin 2004

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 2ème et 7ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 2ème sous-section de la Section du contentieux

Vu 1°/, sous le numéro n° 248443, la requête enregistrée le 5 juillet 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par la COMMUNE DE SAINT-MAUR-DES-FOSSES, représentée par son maire ; la COMMUNE DE SAINT-MAUR-DES-FOSSES demande au Conseil d’Etat d’annuler le décret n° 2002-775 du 3 mai 2002 relatif aux valeurs limites d’exposition du public aux champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunication ou par les installations radioélectriques ;

Vu 2°/, sous le numéro n° 248452, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 5 juillet 2002 et 15 novembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés par l’ASSOCIATION DE DEFENSE DE L’ENVIRONNEMENT ET DU CADRE DE VIE DU QUARTIER "EPI-D’OR", dont le siège est 5 bis rue Jean Forest, à Saint-Cyr-L’Ecole (78210) ; l’ASSOCIATION DE DEFENSE DE L’ENVIRONNEMENT ET DU CADRE DE VIE DU QUARTIER "EPI-D’OR" demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler le décret n° 2002-775 du 3 mai 2002 relatif aux valeurs limites d’exposition du public aux champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunication ou par les installations radioélectriques ;

2°) d’enjoindre au Premier ministre, d’une part, d’édicter dans un délai de trois mois un nouveau décret et, d’autre part, de faire établir et publier une étude épidémiologique relative aux risques liés à l’exposition du public aux champs électromagnétiques ;

Vu 3°/, sous le numéro n° 251470, la requête enregistrée le 5 novembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par la COMMUNE DE SAINT-CYR-L’ECOLE, représentée par son maire ; la COMMUNE DE SAINT-CYR-L’ECOLE demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler le décret n° 2002-775 du 3 mai 2002 relatif aux valeurs limites d’exposition du public aux champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunication ou par les installations radioélectriques ;

2°) d’enjoindre au Premier ministre, d’une part, d’édicter dans un délai de trois mois un nouveau décret fixant à 1V/m la valeur limite d’émission de champs électromagnétiques et, d’autre part, de faire établir et publier une étude épidémiologique relative aux risques liés à l’exposition du public aux champs électromagnétiques ;

Vu 4°/, sous le numéro n° 251484, la requête enregistrée le 5 novembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par l’ASSOCIATION PRIARTEM, dont le siège est 9, rue Jean-François-Gerbillon, à Paris (75006) ; l’ASSOCIATION PRIARTEM demande au Conseil d’Etat d’annuler le décret n° 2002-775 du 3 mai 2002 relatif aux valeurs limites d’exposition du public aux champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunication ou par les installations radioélectriques ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la Constitution ;

Vu la directive 1999/5/CE du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 1999 concernant les équipements hertziens et les équipements terminaux de télécommunication ;

Vu la directive 89/336/CEE du Conseil du 3 mai 1989 concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives à la compatibilité électromagnétique ;

Vu le code des postes et télécommunications ;

Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;

Vu la loi n° 2001-1 du 3 janvier 2001 ;

Vu l’ordonnance n° 2001-670 du 25 juillet 2001 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme von Coester, Auditeur,
- les conclusions de Mme Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées tendent à l’annulation du même décret ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur la requête de l’ASSOCIATION DE DEFENSE DE L’ENVIRONNEMENT ET DU CADRE DE VIE DU QUARTIER "EPI-D’OR" :

Considérant qu’aux termes de l’article R. 611-22 du code de justice administrative : " Lorsque la requête ou le recours mentionne l’intention du requérant ou du ministre de présenter un mémoire complémentaire, la production annoncée doit parvenir au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat dans un délai de quatre mois à compter de la date à laquelle la requête a été enregistrée./ Si ce délai n’est pas respecté, le requérant ou le ministre est réputé s’être désisté à la date d’expiration de ce délai, même si le mémoire complémentaire a été ultérieurement produit. Le Conseil d’Etat donne acte de ce désistement " ;

Considérant que, par une requête sommaire enregistrée le 5 juillet 2002, l’ASSOCIATION DE DEFENSE DE L’ENVIRONNEMENT ET DU CADRE DE VIE DU QUARTIER "EPI-D’OR" a exprimé l’intention de produire un mémoire complémentaire ; qu’à la date du 5 novembre 2002, ce mémoire n’avait pas été déposé au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat et qu’ainsi le délai de quatre mois imparti pour cette production par les dispositions précitées de l’article R. 611-22 du code de justice administrative était expiré ; que l’ASSOCIATION DE DEFENSE DE L’ENVIRONNEMENT ET DU CADRE DE VIE DU QUARTIER "EPI-D’OR" doit par suite être réputée s’être désistée de sa requête ; qu’il y a lieu de donner acte de ce désistement ;

Sur la requête de la COMMUNE DE SAINT-CYR-L’ECOLE :

Considérant que, si la COMMUNE DE SAINT-CYR-L’ECOLE a demandé au Premier ministre, par un recours gracieux en date du 8 juillet 2002, de retirer le décret du 3 mai 2002, il ressort des pièces du dossier que ce décret avait fait l’objet d’une publication régulière au Journal officiel de la République française le 5 mai 2002 ; qu’ainsi, le délai de recours contentieux contre ce décret était expiré à la date de la demande soumise par la COMMUNE DE SAINT-CYR-L’ECOLE au Premier ministre ; que, dès lors, la requête de la COMMUNE DE SAINT-CYR-L’ECOLE est tardive et, par suite, irrecevable ;

Sur les autres requêtes :

Considérant qu’aux termes du 12° ajouté à l’article L. 32 du code des postes et télécommunications par l’article 20 de l’ordonnance du 25 juillet 2001 susvisée : "Un décret définit les valeurs limites que ne doivent pas dépasser les champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunication ou par les installations mentionnées à l’article L. 33-3, lorsque le public y est exposé" ; qu’en application de ces dispositions, le Premier ministre a pris, le 3 mai 2002, un décret relatif aux valeurs limites d’exposition du public aux champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunication ou par les installations radioélectriques ;

Considérant qu’aucune disposition ne limite la compétence du Premier ministre au règlement des affaires courantes entre les deux tours d’une élection présidentielle ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le Premier ministre n’avait pas compétence pour signer le décret susvisé entre les deux tours de l’élection présidentielle et le faire publier le jour du deuxième tour de l’élection présidentielle ne saurait être accueilli ;

Considérant qu’il ne résulte ni du décret attaqué, ni d’aucune autre disposition que l’exécution de ce décret nécessite, par elle-même, l’intervention de mesures réglementaires ou individuelles que le ministre chargé de l’éducation nationale, le ministre chargé de l’outre-mer ou le ministre chargé de l’environnement et de l’aménagement du territoire auraient compétence pour signer ; que la COMMUNE DE SAINT-MAUR-DES-FOSSES n’est dès lors pas fondée à soutenir que, faute d’avoir été contresigné par ces ministres, le décret attaqué aurait été pris en méconnaissance des dispositions de l’article 22 de la Constitution ;

Considérant qu’aux termes de l’article 12 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication : " Le Conseil supérieur de l’audiovisuel est consulté sur tout projet visant à rendre obligatoires les normes relatives aux matériels et techniques de diffusion ou de distribution par câble des services de communication audiovisuelle. Il peut formuler toute recommandation concernant ces normes " ; que le décret attaqué, relatif aux valeurs limites d’exposition du public aux champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunication ou par les installations radioélectriques, ne fixe pas de normes relatives aux matériels et techniques de diffusion ou de distribution par câble des services de communication audiovisuelle et n’est donc pas au nombre des projets pour lesquels la consultation du Conseil supérieur de l’audiovisuel est obligatoire au terme des dispositions précitées ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de consultation du Conseil supérieur de l’audiovisuel doit être écarté ;

Considérant que, ainsi qu’il a été dit précédemment, le décret attaqué a été pris sur le fondement de l’article 20 de l’ordonnance du 25 juillet 2001 susvisée, laquelle a été prise en application de la loi du 3 janvier 2001 portant habilitation du gouvernement à transposer par ordonnances des directives communautaires, au nombre desquelles figure la directive 1999/5/CE du Parlement européen et du Conseil en date du 9 mars 1999 concernant les équipements hertziens et les équipements terminaux de télécommunication ; que, dès lors que cette directive prévoit, au a) de l’article 3-1, que lesdits équipements devront satisfaire à des exigences essentielles au nombre desquelles est citée " la protection de la santé et de la sécurité des utilisateurs ", l’ASSOCIATION PRIARTEM n’est pas fondée à soutenir que les dispositions du décret attaqué, fixant les valeurs limites d’exposition du public aux champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunication ou par les installations radioélectriques, seraient sans lien avec celles de cette directive ; qu’en outre, rien ne faisait obstacle à ce que ces valeurs soient fixées par décret ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de la portée de l’habilitation donnée par la loi du 3 janvier 2001 au gouvernement ne peut qu’être écarté ;

Considérant que, si l’ASSOCIATION PRIARTEM soutient que le décret attaqué serait incompatible avec les objectifs de la directive n° 89/336/CEE du Conseil concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives à la compatibilité électromagnétique, elle n’apporte aucun élément probant au soutien de ses allégations ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier, notamment de la recommandation du Conseil de l’Union européenne en date du 12 juillet 1999 relative à l’exposition du public aux champs électromagnétiques et du rapport d’expertise remis au gouvernement en janvier 2001, d’une part, qu’en l’état des connaissances scientifiques, il n’apparaît pas que les ondes électromagnétiques auraient des effets dits "non thermiques" dangereux pour la santé publique et, d’autre part, que les limites d’exposition imposées par le décret attaqué, qui correspondent à celles préconisées par la recommandation du Conseil de l’Union européenne, tiennent compte de marges de sécurité destinées à protéger le public contre tout effet, y compris à long terme, de l’exposition aux ondes électromagnétiques émises par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunication ou par les installations radioélectriques, dans l’ensemble des gammes de fréquence ; que, dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le Premier ministre aurait commis une erreur manifeste dans l’appréciation des risques auxquels le public est soumis du fait de son exposition aux champs électromagnétiques ; qu’il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le Premier ministre aurait pris des mesures qui ne seraient pas proportionnées aux précautions qui s’imposent en cette matière ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE SAINT-MAUR-DES-FOSSES et l’ASSOCIATION PRIARTEM ne sont pas fondées à demander l’annulation du décret attaqué ;

D E C I D E :

Article 1er : Il est donné acte du désistement de la requête de l’ASSOCIATION DE DEFENSE DE L’ENVIRONNEMENT ET DU CADRE DE VIE DU QUARTIER "EPI-D’OR".

Article 2 : Les requêtes de la COMMUNE DE SAINT-MAUR-DES-FOSSES, de la COMMUNE DE SAINT-CYR-L’ECOLE et de l’ASSOCIATION PRIARTEM sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE SAINT-MAUR-DES-FOSSES, à l’ASSOCIATION DE DEFENSE DE L’ENVIRONNEMENT ET DU CADRE DE VIE DU QUARTIER "EPI-D’OR", à la COMMUNE DE SAINT-CYR-L’ECOLE, à l’ASSOCIATION PRIARTEM, au Premier ministre, au ministre de la santé et de la protection sociale, au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie et à l’Autorité de régulation des télécommunications.

 


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