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Tribunal administratif de Lyon, 11 décembre 2003, n° 0200103, M. Franck W.

Les vexations auxquelles le requérant a été exposé et l’indifférence de l’administration sont constitutives, dans les circonstances de l’espèce, d’une faute de nature à engager la responsabilité de l’Etat.

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE LYON

N° 0200103

M. Franck W.

M. DURAND
Rapporteur

M. BESSON
Commissaire du gouvernement

Audience du 27 novembre 2003
Lecture du 11 décembre 2003

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Le Tribunal administratif de LYON
(3ème Chambre)

LE LITIGE

M. Franck W. a saisi le tribunal administratif d’une requête présentée par Me DEYGAS, avocat au barreau de Paris, enregistrée au greffe du tribunal le 9 janvier 2002, sous le n° 0200103 ;

M. W. demande au tribunal :

- de condamner l’Etat (recteur de l’académie de LYON) à lui payer à titre de dommages et intérêts une somme de 200 000 Francs (30 489,80 euros), à parfaire ou à diminuer, outre intérêts de droit à compter de la réception de son recours préalable soit le 7 juillet 2001 ;

- de condamner l’Etat (recteur de l’académie de Lyon) à lui payer une somme de 1500 euros par application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;

Par un mémoire enregistré le 16 décembre 2002, le recteur de l’académie de LYON conclut au rejet de la requête ;

Par un mémoire enregistré le 15 octobre 2003, M. W. conclut aux mêmes fins que la requête ;

Par un mémoire enregistré le 10 novembre 2003, le recteur de l’académie de LYON conclut aux mêmes fins que précédemment ;

Par un mémoire enregistré le 21 novembre 2003, M. W. conclut aux mêmes fins que précédemment ;

L’INSTRUCTION DE L’AFFAIRE

En application de l’article R.612-3 du code de justice administrative, une mise en demeure a été adressée au recteur de l’académie de LYON par ordonnance en date du 24 octobre 2002 ;

En application de l’article R.613-1 du code de justice administrative, la clôture de l’instruction a été fixée au 16 octobre 2003 par ordonnance en date du 25 septembre 2003 ;

En application de l’article R.613-4 du code de justice administrative, l’instruction a été rouverte par ordonnance en date du 13 novembre 2003 ;

L’AUDIENCE

Les parties ont été régulièrement averties de l’audience publique qui a eu lieu le 27 novembre 2003 ;

Au cours de cette audience, le Tribunal assisté de Mme JARDIN, greffière, a entendu :
- le rapport de M. DURAND, premier conseiller,
- les observations de Me DURET, substituant Me DEYGAS, avocat de M. W.,
- les conclusions de M. BESSON, commissaire du gouvernement ;

LA DECISION

Après avoir examiné la requête de M. W., sa demande préalable en date du 13 juillet 2001 ainsi que les mémoires et les pièces produits par les parties avant la clôture de l’instruction et vu les textes suivants :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée,
- le code de justice administrative ;

LE TRIBUNAL

Considérant que M. Franck W. a, entre le mois de janvier 1988 et le mois d’août 1992, occupé un poste de surveillant au lycée hôtelier François Rabelais à DARDILLY ; que, du 1er septembre 1993 au 31 août 1994, il a exercé les fonctions "d’agents de contrôle chargé de la coordination et de la surveillance et du contrôle des absences" au centre de formation d’apprentis (CFA) du lycée précité ; que suivant contrat du 1er septembre 1994, il a été recruté en qualité de "professeur chargé d’animation pédagogique et de coordination de la vie scolaire au service éducation" et rémunéré à l’indice nouveau majoré 331 ; que ce contrat a été renouvelé pour l’année scolaire 1995-1996 ; que pour les années 1996-1997 et 1997-1998, l’intéressé s’est vu confier successivement les fonctions d’agent administratif "coordination vie scolaire" puis "d’agent administratif de surveillance et de contrôle" rémunérées à l’indice nouveau majoré 339 ; que M. W. n’a pas souhaité renouveler le contrat qui lui a été proposé pour l’année scolaire 1998-1999 aux mêmes conditions financières comme "agent administratif de contrôle" ; que l’intéressé a demandé, par lettre en date du 13 juillet 2001, au recteur de l’académie de LYON de lui verser une indemnité de 30489,80 euros en réparation des préjudices matériels et moral que lui a causé le comportement du proviseur adjoint du CFA du lycée François Rabelais et la carence de l’administration à assurer sa protection ; que cette demande a fait l’objet d’une décision implicite de rejet ;

Sur la responsabilité et le préjudice :

Considérant, d’une part, qu’il ressort des pièces du dossier et notamment des nombreux témoignages circonstanciés qu’il produit, qui ne sont pas utilement contredits par les quatre attestations fournies par le recteur de l’académie de LYON, que M. W. a fait l’objet de brimades et de marques d’irrespect de la part du proviseur adjoint du CFA du lycée François Rabelais ; que, si M. W. n’a jamais explicitement demandé la protection prévue par les dispositions de l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée, il n’est pas contesté qu’il a sollicité l’intervention du recteur par lettres en date des 4 mai et 15 juillet 1998 qui n’ont pas donné lieu à réponse ; que les vexations auxquelles le requérant a été exposé et l’indifférence de l’administration sont constitutives, dans les circonstances de l’espèce, d’une faute de nature à engager la responsabilité de l’Etat ; que l’argument tiré de ce que la plainte pénale déposée par M. W., le 23 avril 2001, pour harcèlement moral ait été classée sans suite est sans incidence à cet égard ;

Considérant, d’autre part, qu’en raison de cette situation, M. W. a présenté une asthénie psychogène et des troubles anxieux importants, constatés par deux certificats médicaux et nécessitant un traitement psychotrope ; que M. W. a éprouvé une douleur morale et subi des troubles de toute nature dans ses conditions d’existence ; qu’il sera fait une juste appréciation de l’ensemble de ces chefs de préjudice en condamnant l’Etat à lui verser la somme de 7500 euros à titre de réparation ;

Sur les intérêts :

Considérant que M. W. a droit aux intérêts sur la somme de 7500 euros à compter du 17 juillet 2001, date de réception de sa demande préalable ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’aux termes de l’article L.761-1 du code de justice administrative qui a repris les dispositions de l’article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation" ; que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de condamner l’Etat à payer à M. W. une somme de 750 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : l’Etat (recteur de l’académie de LYON) est condamné à payer à M. Franck W., la somme de 7500 euros (sept mille cinq cents euros). Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2001.

Article 2 : L’Etat (recteur de l’académie de LYON) versera à M. W. une somme de 750 euros (sept cent cinquante euros) au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. W. est rejeté.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié conformément aux dispositions de l’article R.751-3 du code de justice administrative

 


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