LE CONSEIL DE LA CONCURRENCE,
Vu la lettre en date du 23 octobre 1985 par laquelle le ministre de
l’économie, des finances et du budget a saisi la Commission de la
concurrence de pratiques relevées dans le secteur de la messagerie-groupage
;
Vu les ordonnances nos 45-1483 et 45-1484 du 30 juin 1945 modifiées
relatives respectivement aux prix et à la constatation, la poursuite
et la répression des infractions à la législation
économique ;
Vu l’ordonnance n°86-1243 du 1er décembre 1986 relative à
la liberté des prix et de la concurrence, modifiée, ensemble
le décret n°86-1309 du 29 décembre 1986 modifié
pris pour son application ;
Vu les observations présentées par les parties ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Les rapporteurs, le rapporteur général, le commissaire
du Gouvernement et les parties entendus ;
Retient les constatations (I) et adopte la décision (II) ci-après
exposées.
I.- CONSTATATIONS
A. - Le secteur de la messagerie-groupage
Définition et caractéristiques
Les entreprises intervenant dans le secteur de la messagerie-groupage
ont pour mission de réunir les envois de marchandises en provenance
de plusieurs expéditeurs ou à l’adresse de plusieurs destinataires
et de réaliser les opérations de transport des lots ainsi
constitués par des transporteurs Ferroviaires ou routiers.
Ainsi, le rôle du groupeur est de constituer, à partir d’envois
multiples collectés par ses soins, des charges complètes
aptes à remplir des équipements de transport routiers ou
ferroviaires et le rôle de l’entreprise de messagerie est de mettre
en oeuvre un parc de véhicules et des infrastructures de plate-forme
et autres équipements de manutention. Selon les cas, les opérations
de groupage - ou de dégroupage - sont effectuées par une
ou plusieurs entreprises ; en cas de nécessité, le commissionnaire
groupeur a toujours la possibilité de sous-traiter différentes
opérations comme l’enlèvement de la marchandise à
domicile, la manutention des colis, l’expédition des lots, la livraison
terminale. Occasionnellement, le commissionnaire groupeur peut assurer
lui-même, avec des moyens de transport qui lui sont propres, le transport
des marchandises qui lui sont confiées.
Le marché de la messagerie-groupage compte différentes
catégories d’opérateurs : des groupeurs nationaux assurant
le groupage sur une zone plus ou moins vaste du territoire mais réalisant
la distribution des marchandises sur l’ensemble du pays , des transporteurs
régionaux spécialisés dans l’exploitation de lignes
précises ; des réseaux nationaux intervenant sur l’ensemble
du territoire et sur lequel le Sernam et la Compagnie générale
Calberson, respectivement service et filiale de la S.N.C.F., jouent un
rôle prééminent.
A la fin de l’année 1983, le secteur de la messagerie-groupage
comportait 1 104 entreprises employant près de 60 000 salariés.
Ces différentes entreprises se distinguent tant en raison du
fait qu’elles assurent ou non la fonction de transport et qu’elles offrent
ou non une gamme de services plus ou moins étendue. Les services
proposés se différencient en effet selon trois critères
principaux : délai de livraison, poids et dimension des envois,
destinations desservies. S’agissant des délais de livraison,
des entreprises se sont attachées à offrir des services «
Express ».
Si le décret n°61-619 du 30 juin 1961 a prévu dans
son article 12.1 que les tarifs de messagerie-groupage devaient être
« approuvés par le ministre des travaux publics et des transports
selon la procédure fixée par arrêté du ministre
», cette tarification réglementaire n’a jamais vu le jour.
Dans les faits, les prix des services de messagerie-groupage ont, en revanche,
été par le passé « encadrés » et
tel a été le cas au cours de la période du 1 1 juin
1982 au 31 décembre 1983. Ultérieurement, des engagements
de lutte contre l’inflation ont été conclus entre les organisations
représentatives de la profession et la direction générale
de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.
Au 1er janvier 1985, les entreprises ont obtenu la liberté de fixer
elles-mêmes leurs prix.
Les entreprises de messagerie-groupage sont représentées
par la Fédération nationale de la messagerie (F.N.M.) ; elle
regroupe les dix-sept associations professionnelles des entreprises de
messageries (A.P.E.M.). Cette fédération participe au Conseil
national des commissionnaires de transports (C,N.C.T.) instauré
par l’article 40 du décret du 14 novembre 1949, modifié par
le décret n°61-676 du 30 juin 1961 , ce conseil a, pour partie,
un pouvoir réglementaire.
En application des textes régissant la profession, le groupeur,
titulaire d’une licence de commissionnaire de transport, est tenu de se
conformer aux « conditions générales de transport des
envois de détail », émanant du C.N.C.T. et régissant
les rapports entre le groupeur et ses clients. Ces conditions prévoient
en particulier la perception par le commissionnaire de transport d’un prélèvement
dénommé « droit d’enregistrement et de timbre »
s’ajoutant au prix du transport résultant du tarif applicable.
Ce « droit d’enregistrement et de timbre » comporte deux
éléments. En premier lieu, il s’agit d’une ressource
fiscale reversée au Trésor public. Perçu en
application des dispositions du code général des impôts
(art. 925 et suivants), le droit de timbre a été fixé
à 3 francs par la loi de finances pour 1984. En second lieu,
pour le surplus, le droit d’enregistrement entre, selon les usages professionnels,
dans la rémunération de l’entreprise elle-même.
Selon ces usages ce droit perçu, quel que soit le type ou l’importance
de l’envoi, est destiné à couvrir les charges fixes de l’entreprise
qui se rattachent directement à l’opération de transport
, il est, en principe, déterminé librement par le groupeur
dans le respect des limites supérieures fixées par le C.N.C.T.
B. - Les pratiques relevées
1. L’accord conclu le 1er octobre 1984 entre la Compagnie générale
Calberson et Danzas S.A.
La Compagnie général Calberson a créé un
service « express » dénommé « Calexpress
» permettant d’acheminer dans un délai maximal de 48 heures
des envois de détail. En application de J’accord conclu le
1er octobre 1984, la société Danzas a accès au réseau
« Calexpress » de Calberson pour une période de cinq
ans. L’article 3 g du contrat conclu (pièce n°4) stipule
que le groupe Calberson s’engage à ne pas consentir à d’autres
entreprises les avantages accordés à Danzas et, en application
des articles 3 a et 3 b, il est prévu que la société
Danzas applique les tarifs de Calberson et que les parties s’engagent «
au respect de leur clientèle respective ».
2. Les hausses de prix relevées les 1er janvier et 1er
juillet 1985
S’agissant de la hausse du 1er janvier 1985, de multiples pièces
versées au dossier témoignent de la réalité
d’une concertation visant à promouvoir des hausses uniformes de
tarifs (pièces n°22 à 29). Ces pièces révèlent
que la concertation a été engagée par la F.N.M. et
que le Sernam et Calberson y ont apporté leur concours. Lors
d’une réunion entre le président de la F.N.M. et le président
de la Compagnie générale Calberson, tenue le 22 octobre 1984,
une hausse de prix de 5 p. 100 est envisagée si la liberté
des prix est octroyée (pièce n°22).
Dans une lettre du 22 novembre 1984 adressée par le président
de Calberson à son directeur commercial on peut lire qu’«
à partir du début de 1985, nous pourrions engager par la
voie professionnelle une action de relèvement qui reprendrait somme
toute les projets que nous avions formés, c’est-à-dire 5
p. 100 le 1er janvier et 4 p. 100 le 1er juillet. Il va sans dire
qu’à ce moment-là nous devrons être très vigilants
pour faire une fourchette... en différenciant par entreprise car,
sans cela, nous nous trouverons sous le coup des « ententes »
(pièce n°23). La lettre du 3 décembre 1984 du président
de Calberson à son directeur commercial enseigne pour sa part que
le Sernam « est derrière nous, à partir du 1er janvier,
pour promouvoir, au même niveau, les hausses tarifaires de janvier
et de juillet » et que la « dernière circulaire »
du président de la F.N.M. du 30 novembre 1984 ne serait « pas
très bien rédigée puisque, en particulier, elle n’évite,
nullement le risque d’entente et ne formule aucun conseil et aucune recommandation
dans ce sens » (pièce n°25). La participation du
Sernam à l’accord tarifaire conclu est corroborée par les
indications reportées sur la pièce n°27 (cahier de réunion
du directeur administratif de la F.N.M.) où l’on relève,
à la suite d’une réunion du 1 1 décembre 1984, les
mentions « Il faut modifier prix dès 1.1. Le Sernam nous suit
dans cet accord. Niveau majoration. » La preuve de la concertation
professionnelle est encore rapportée par les pièces n°28
(compte rendu de la réunion du conseil d’administration de l’A.P.E.M.
d’Ile-de-France du 12 décembre 1984) et n°29 (circulaire du
Sernam aux directeurs de succursales datée du 26 décembre
1984) où l’on note respectivement les mentions qui suivent : «
A titre d’information, sur proposition de la fédération,
l’augmentation de la sous-traitance sera plafonnée à 5 p.
1 00 »... « Le tarif de référence est majoré
d’un taux moyen équivalent à celui recommandé à
ses adhérents par la Fédération nationale de messagerie.
»
Dans les faits, au 1er janvier 1985, la hausse du tarif messagerie a
été de 5,5 p. 100 en moyenne pour le Sernam, de 5 p. 100
pour Calberson, de 6 p. 100 pour Danzas, de 5 à 7 p. 100 pour Mory-T.N.T.E.
La hausse constatée le 1er juillet 1985 a également donné
lieu à des concertations (pièces nos 32 à 39).
Les comptes rendus manuscrits des réunions du 14 mai 1985 de la
commission économique de la F.N.M. et du conseil d’administration
de cette fédération font ainsi état de projets de
hausse se situant entre 2,5 et 3 p. 100 au 1er juillet 1985, certes accompagnés
d’un relèvement significatif des limites de responsabilité
des entreprises (pièces nos 32 et 33). Après avoir
envisagé une hausse de 3,8 p. 100 pour août lors d’une réunion
tenue à la fin de mai 1985 avec la F.N.M. (pièce n°34)
et après concertation avec la F.N.M., le Sernam préconise
le 1 1 juin 1985 des hausses de 3 p. 100 dès juillet pour l’«
express » et de 2,5 à 3,5 p. 100 « pour la messagerie
selon les coupures de poids ». Les hausses envisagées à
la même date pour Calberson et Mory-T.N.T.E. s’établissent
alors respectivement à 3 et 2,8 p. 100 (pièce n°37).
Les augmentations ainsi avancées sont conformes aux souhaits de
la profession appelant, dès mai 1985, à la faveur d’un «
tour de table » une augmentation de 2,5 à 3 p. 100 « si
le Sernam et l’Express augmentent » (pièce n°35).
L’engagement du Sernam sur la hausse espérée (pièce
n°39) conduit alors le directeur administratif de la F.N.M. à
répercuter l’information quant aux augmentations de prix à
pratiquer dès juillet à différentes associations professionnelles
régionales.
En moyenne, les hausses de prix constatées en juillet 1985 se
sont établies à 2,8 p. 100 pour le Sernam, 2,9 p. 100 pour
Calberson, 2,5 p. 100 pour Danzas et 3 p. 100 pour Mory-T.N.T.E.
3. La fixation du niveau du prélèvement dit «
droit d’enregistrement et de timbre »
Comme il a été déjà indiqué, la fixation
du droit de timbre est définie par la voie législative, le
maximum du « droit d’enregistrement et de timbre » est déterminée
par le C.N.C.T. Au 1er janvier 1985, ce maximum a été fixé
à 16,50 F (envoi en port payé). Les pièces versées
au dossier montrent l’importance que des entreprises attachent à
ce « droit » qui constitue « une part non négligeable
de leurs recettes » (pièces nos 26 et 41). A la date
du 1er janvier 1985, les sociétés Compagnie générale
Calberson, Danzas S.A. et Mory-T.N.T.E. se sont alignées sur ce
tarif plafond.
La question de l’application du tarif plafond a été évoquée
par le président de la Compagnie générale Calberson
auprès de la F.N.M. en décembre 1984 : « je pense que
cette fois-ci, nous devons à nouveau être homogènes
avec la profession... » (pièce n°26). « En vue de
décisions à prendre » (pièce n°42), la F.N.M.
a élaboré une série de tableaux à la date de
décembre 1984 indiquant sur la base d’un « montant actuel
» différentes évaluations de « droits et taxes
» en fonction de différentes hypothèses de hausses
comprises entre 4 et 7 p. 100.
II - A LA LUMIERE DES CONSTATATIONS QUI PRECEDENT, LE CONSEIL DE
LA CONCURRENCE
Sur les textes applicables :
Considérant que, dans le cas où les faits constatés
sont antérieurs à l’entrée en vigueur de l’ordonnance
du 1er décembre 1986, l’absence de vide juridique résulte
de l’application des règles de fond contenues dans l’ordonnance
du 30 juin 1945 dans la mesure où les qualifications énoncées
par celle-ci sont reprises par le nouveau texte ; que l’ordonnance du 1er
décembre 1986 dispose que les pouvoirs de qualification des pratiques
anticoncurrentielles et de décision, antérieurement dévolus
au ministre chargé de l’économie, sont confiés au
Conseil de la concurrence ; qu’en vertu des dispositions du dernier alinéa
de l’article 50 de cette ordonnance demeurent valables les actes de constatation
et de procédure établis conformément aux dispositions
de l’ordonnance du 30 juin 1945 ; qu’enfin les pratiques, qui étaient
visées par les dispositions du premier alinéa de l’article
50 de cette dernière ordonnance et auxquelles les dispositions de
son article 51 n’étaient pas applicables, sont identiques à
celles qui sont prohibées par l’article 7 de l’ordonnance du 1er
décembre 1986 ;
En ce qui concerne l’accord conclu le 1er octobre 1984 entre la Compagnie
générale Calberson et Danzas S.A. :
Considérant que les parties ne contestent pas le contenu de l’accord
conclu le 1er octobre 1984 ; qu’elles en soulignent le caractère
technique devant en particulier permettre à la Compagnie générale
Calberson de mieux assurer l’amortissement de sa flotte et à Danzas
S.A. de consolider sa place sur le marché sans avoir à investir
à perte ; qu’elles s’efforcent par ailleurs de réduire la
portée des clauses incriminées au motif, en particulier,
que l’accord conclu « ne liait pas deux concurrents, mais une entreprise
(Calberson) qui offrait un service spécifique, dont l’activité
était déjà assise et performante sur le plan national,
à une autre entreprise demanderesse » ;
Considérant que la clause 3 b de cet accord prescrit le respect
des clientèles respectives des parties et que par la clause 3 g
la Compagnie générale Calberson « s’interdit dorénavant
de concéder à un autre transporteur ou à un groupe
de transporteurs d’importance nationale les mêmes avantages que ceux
consentis au groupe Danzas dans le cadre du trafic Calexpress » ;
que ces deux clauses ont pour objet et peuvent avoir pour effet de limiter
l’exercice de la libre concurrence par d’autres entreprises, au sens de
l’article 50 susmentionné ,
Mais considérant que la Compagnie générale Calberson
et Danzas S.A. font valoir que l’accord conclu le 1er octobre 1984 constitue
un accord de productivité à l’origine d’une rationalisation
et d’une amélioration de la qualité des services proposés
; qu’il apparaît en effet que ledit accord a permis à Calberson
de mieux assurer l’amortissement de sa flotte et à Danzas de fournir
une prestation d’une qualité supérieure à celle qu’elle
aurait pu fournir à défaut de l’accord conclu, notamment
en assurant un accès plus large de la clientèle au réseau
Calexpress ;
Considérant que les dispositions du 2o de l’article 51 de l’ordonnance
du 30 juin 1945 susmentionnée peuvent être appliquées
à des pratiques prohibées par son article 50, dès
lors que le progrès économique allégué est
la conséquence de ces pratiques et dès lors qu’un tel progrès
n’aurait pu être obtenu en l’absence de ces pratiques ; qu’il ressort
de l’examen des pièces du dossier et des explications fournies par
les entreprises en cause que ledit accord n’aurait pas été
conclu à défaut des clauses qui font l’objet des articles
3 b et 3 g et qui sont indissociables entre elles ; qu’il y a lieu, dès
lors, de faire application des dispositions du 2o de l’article 51 de l’ordonnance
susvisée ;
En ce qui concerne les hausses de tarifs des 1er janvier et 1er juillet
1985 :
Sur l’application de l’article 50 de l’ordonnance n°45-1483 du
30 juin 1945 :
Considérant que, si la Fédération nationale de
la messagerie n’est pas expressément citée dans la conclusion
du rapport définitif qui lui a été notifié,
il résulte clairement des énonciations de la page 12 du rapport
que « la Fédération nationale de la messagerie a mis
en oeuvre des pratiques visées par l’article 50 de l’ordonnance
du 30 juin 1945 (au titre des majorations intervenues les 1er janvier et
1er juillet 1985) auxquelles les sociétés Calberson, Danzas
et Mory-T.N.T.E. ont apporté leur concours » , que ce grief
est annoncé à la page 9 dudit rapport comme étant
définitivement retenu , qu’il résulte de ce qui précède
qu’il ne saurait être utilement soutenu par ladite fédération
que le rapport ne fait mention d’aucun grief à son endroit ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier, et notamment
des pièces 22 à 29 et 32 à 39, qu’à propos
des hausses de tarifs prenant respectivement effet le 1er janvier 1985
et le 1er juillet 1985 la Fédération nationale de la messagerie
a pris l’initiative d’une concertation à laquelle ont participé,
avec elle, le Sernam, service de la S.N.C.F., les sociétés
Compagnie générale Calberson, Danzas S.A. et Mory-T.N.T.E.
; que ces concertations ont porté effectivement sur les hausses
de tarifs à intervenir ; qu’en agissant ainsi les entreprises se
sont livrées à une action concertée ayant pour l’objet
de restreindre et de fausser le jeu de la concurrence, en violation des
dispositions de l’article 50 de l’ordonnance susvisée de 1945 ;
Considérant, d’une part, que certaines des entreprises ayant
participé à cette concertation tentent d’expliquer l’entente
tarifaire par la situation particulière du Sernam sur le marché
de la messagerie-groupage, compte tenu à la fois de son rôle,
qui serait celui d’« entreprise-leader », et du caractère
structurellement déficitaire de ses comptes , que cette situation,
même à la supposer établie, ne saurait justifier une
entente tarifaire entre les entreprises ;
Considérant, d’autre part, que la S.N.C.F. soutient que la législation
relative aux ententes ne saurait être opposée aux pratiques
du Sernam et de la Compagnie générale Calberson au motif
que ces deux entités dépendent du même groupe ; que
cet argument est, en tout état de cause, inopérant dès
lors que le grief retenu par le conseil est non pas la réalisation
d’une entente entre le Sernam et la Compagnie générale Calberson,
mais la participation des services de la S.N.C.F. et de cette entreprise
à une concertation à laquelle ont également pris part
deux autres entreprises et la Fédération nationale de la
messagerie ;
Sur l’application du 2° de l’article 51 de l’ordonnance n°45-1483
du 30 juin 1945 :
Considérant qu’en ce qui concerne le grief ci-dessus précisé
la Fédération nationale de la messagerie et les sociétés
Compagnie générale Calberson, Danzas S.A. et Mory-T.N.T.E.,
qui nient l’existence de toute entente tarifaire, ne se prévalent
pas, dans les réponses qu’elles ont formulées à la
suite de la communication du rapport, des dispositions du 2° de l’article
51 de l’ordonnance du 30 juin 1945 ; qu’en revanche, pour le compte du
Sernam, fa S.N.C.F. invoque le bénéfice de ces dispositions
;
Considérant que le Sernam se borne à invoquer la situation
de son compte d’exploitation (pièce n°295 et à se prévaloir
des dispositions statutaires qui lui sont propres, notamment en matière
de tarification ; que l’argumentation ainsi présentée ne
démontre pas que les hausses de tarifs auraient été
supérieures en- l’absence de concertation ; qu’au contraire les
concertations constatées ont eu pour objet de restreindre la concurrence
alors que la liberté tarifaire recouvrée aurait dû
autoriser une amélioration du processus concurrentiel ; que, dès
lors, les pratiques relevées ne sauraient entrer dans le champ d’application
du 2° de l’article 51 de l’ordonnance du 30 juin 1945 ;
En ce qui concerne la fixation du niveau du prélèvement
dénommé « droit d’enregistrement et de timbre »
:
Considérant que, si des entreprises de messagerie-groupage ont
pratiqué le même taux de prélèvement au titre
du « droit d’enregistrement et de timbre », les pièces
versées au dossier n’établissent pas que cet alignement résulte
d’une concertation ; qu’en l’espèce les conditions d’application
de l’article 50 de l’ordonnance n°45-1483 du 30 juin 1945 ne sont donc
pas réunies sur ce point ;
Sur les suites à donner :
Considérant qu’il résulte de ce qui précède
que l’entente en matière tarifaire, mise en oeuvre par la Fédération
nationale de la messagerie, la S.N.C.F. par son service dénommé
Sernam, la Compagnie générale Calberson et les sociétés
Danzas S.A. et Mory-T.N.T.E., qui tombent ’sous le coup des dispositions
de l’article 50 de l’ordonnance n°45-1483 du 30 juin 1945 sans pouvoir
bénéficier de celles du 20 de son article 51, sont également
visées par les dispositions de l’article 7 de l’ordonnance du 1er
décembre 1986 ; qu’il y a lieu de faire application des dispositions
de l’article 13 de ladite ordonnance , que ces entreprises et la fédération
ne sauraient utilement invoquer à décharge les initiatives
qui ont pu être prises par l’administration à l’occasion de
la cessation de l’encadrement des prix, alors d’ailleurs que ces initiatives
avaient pour objet de tenter de limiter les hausses de tarifs,