CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
N° 300780
MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE
c/ M. A.
Mme Catherine Chadelat
Rapporteur
Mme Béatrice Bourgeois-Machureau
Commissaire du gouvernement
Séance du 15 octobre 2008
Lecture du 19 novembre 2008
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 2ème et 7ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 2ème sous-section de la Section du contentieux
Vu le pourvoi, enregistré le 19 janvier 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’arrêt du 28 novembre 2006 par lequel la cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant à l’annulation du jugement du 6 novembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Pau a annulé la décision du 15 octobre 2002 par laquelle le directeur général de la comptabilité publique a refusé à M. Christian A. le bénéfice du congé de fin d’activité qu’il sollicitait à compter du 31 décembre 2002 ;
2°) de régler l’affaire au fond et de rejeter les conclusions de M. A. tendant à l’annulation de la décision qui lui a refusé le bénéfice du congé de fin d’activité ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le traité de Rome instituant la Communauté économique européenne devenue la Communauté européenne ;
Vu le traité sur l’Union européenne et les protocoles qui y sont annexés ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu la loi n° 96-1093 du 16 décembre 1996 modifiée relative à l’emploi dans la fonction publique et à diverses mesures d’ordre statutaire ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de Mme Catherine Chadelat, Conseiller d’Etat,
les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité de l’arrêt attaqué :
Considérant que le moyen tiré du défaut de signature par le président de la formation de jugement et par le greffier d’audience de la minute de la décision attaquée manque en fait ;
Considérant que l’arrêt attaqué vise les mémoires produits, analyse les moyens invoqués devant la cour administrative d’appel et cite les textes de droit interne et de droit communautaire sur lesquels la cour a fondé sa décision ; que la cour n’avait pas à répondre au simple argument, invoqué par le ministre, de la conformité au principe d’égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et féminins, des dispositions de l’article 15 de la loi du 16 décembre 1996 relative à la fonction publique et à diverses mesures d’ordre statutaire ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de l’arrêt attaqué ne peut qu’être écarté ;
Sur le bien-fondé de l’arrêt attaqué :
Considérant qu’aux termes de l’article 13 de la loi du 16 décembre 1996, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les fonctionnaires de l’Etat . peuvent accéder, sur leur demande et sous réserve des nécessités de la continuité et du fonctionnement du service, au congé de fin d’activité s’ils remplissent les unes ou les autres des conditions suivantes : (.) 2°) soit être né entre le 1er janvier 1943 et le 31 décembre 1946 et justifier de quarante années de cotisation ou de retenue au titre du code des pensions civiles et militaires de retraite, ou d’un ou plusieurs autres régimes de base obligatoires d’assurance vieillesse, et avoir accompli au moins quinze années de services militaires ou civils effectifs en qualité de fonctionnaire ou d’agent public (.). La durée d’assurance est réduite pour les femmes fonctionnaires dans les conditions prévues pour les bonifications pour enfants accordées pour la liquidation de la pension par le b de l’article 12 du code des pensions " ; qu’aux termes de l’article 15 de la même loi : " Le fonctionnaire bénéficiaire du congé de fin d’activité perçoit un revenu de remplacement de 75 % du traitement brut afférent à l’emploi, grade, classe, échelon ou chevron, effectivement détenu depuis six mois au moins à la date de départ en congé de fin d’activité. " ;
Considérant qu’aux termes de l’article 119 du traité instituant la Communauté économique européenne, devenu l’article 141 du traité instituant la Communauté européenne : " 1. Chaque Etat membre assure l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et féminins pour un même travail ou un travail de même valeur. 2. Aux fins du présent article, on entend par rémunération, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum et tous autres avantages payés directement ou indirectement en espèces ou en nature par l’employeur au travailleur en raison de l’emploi de ce dernier " ;
Considérant qu’il résulte des dispositions précitées de la loi du 16 décembre 1996 que le congé de fin d’activité, qui constitue une forme de sortie du service, ouvre droit à un revenu de remplacement qui tient compte du niveau, de la durée et de la nature des services accomplis ; que ce revenu, qui est ainsi versé en raison de l’emploi, entre dans le champ d’application de l’article 141 du traité instituant la Communauté européenne tel qu’il a été interprété par la Cour de justice des Communautés européennes ; que, par suite, le principe de l’égalité des rémunérations défini à cet article lui est applicable ; que cette égalité ne s’entend pas seulement du niveau de la rémunération perçue mais également des conditions posées pour l’obtention de cet avantage, au nombre desquelles figure le nombre d’années de services effectifs pour pouvoir y prétendre ; que, dès lors, en jugeant que le principe de l’égalité des rémunérations s’opposait à ce que seules les femmes fonctionnaires puissent bénéficier d’une durée réduite des annuités exigées pour ouvrir droit à ce congé, la cour administrative d’appel de Bordeaux n’a pas entaché sa décision d’une erreur de droit ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ;
D E C I D E :
Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L’ECONOMIE, DE L’INDUSTRIE ET DE L’EMPLOI et à M. Christian A..