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Conseil d’Etat, 16 juin 2004, n° 254172, Société Laboratoire de biologie végétale Yves Rocher

Les dispositions de l’article L. 600-4-1 du code de l’urbanisme ont pour objet de permettre que les parties à un litige mettant en cause un acte intervenu en matière d’urbanisme soient éclairées sur l’ensemble des vices susceptibles d’entacher la légalité de cet acte.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N°s 254172, 264448

SOCIETE LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER

Mlle Courrèges
Rapporteur

M. Stahl
Commissaire du gouvernement

Séance du 26 mai 2004
Lecture du 16 juin 2004

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 1ère et 6ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 1ère sous-section de la Section du contentieux

Vu 1°), sous le n° 254172, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 février et 13 juin 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la SOCIETE LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER, dont le siège est La Croix des Archers à La Gacilly (56200), représentée par ses représentants légaux en exercice ; la SOCIETE LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt du 13 décembre 2002 par lequel la cour administrative d’appel de Paris a annulé le jugement du tribunal administratif de Paris du 28 mars 2002 annulant le permis de construire délivré le 21 septembre 2000 par le préfet des Hauts-de-Seine au Syndicat mixte central de traitement des ordures ménagères de l’agglomération parisienne en vue de l’édification d’un centre de tri et de valorisation des déchets quai Franklin Roosevelt à Issy-les-Moulineaux ;

2°) de rejeter l’appel formé par le Syndicat mixte mentionné ci-dessus et par le ministre de l’équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer contre le jugement du 28 mars 2002 ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement d’une somme de 6 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°), sous le n° 264448, la requête, enregistrée le 11 février 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour la SOCIETE LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER ; la SOCIETE LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER demande au Conseil d’Etat de prononcer le sursis à exécution de l’arrêt du 13 décembre 2002 de la cour administrative d’appel de Paris ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la note en délibéré présentée pour la SOCIETE LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER ;

Vu la note en délibéré présentée pour le Syndicat mixte central de traitement des ordures ménagères ;

Vu le code de l’urbanisme ;

Vu le code de la construction et de l’habitation ;

Vu le code de l’environnement ;

Vu le décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Courrèges, Auditeur,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la SOCIETE LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER et de Me Foussard, avocat du Syndicat mixte central de traitement des ordures ménagères de l’agglomération parisienne,
- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, sous le n° 254172, la SOCIETE LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER demande l’annulation de l’arrêt du 13 décembre 2002 par lequel la cour administrative d’appel de Paris, faisant droit aux requêtes du Syndicat mixte central de traitement des ordures ménagères (SYCTOM) et du ministre de l’équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, a annulé le jugement du 28 mars 2002 du tribunal administratif de Paris et rejeté la demande qu’elle avait présentée devant ce tribunal tendant à l’annulation de l’arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 21 septembre 2000 accordant au SYCTOM un permis de construire un centre de tri et de valorisation des ordures ménagères à Issy-les-Moulineaux ; que, sous le n° 264448, la société requérante demande qu’il soit sursis à l’exécution de cet arrêt ; que les deux requêtes présentent à juger les mêmes questions ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant que, dans un mémoire en défense devant la cour administrative d’appel, la société requérante avait invoqué un moyen tiré de ce que l’étude d’impact jointe à la demande de permis de construire, en application de l’article 2 du décret du 12 octobre 1977, était insuffisante faute de mentionner les raisons pour lesquelles le projet, parmi les autres partis envisagés, avait été retenu ; que la cour administrative d’appel a omis de répondre à ce moyen ; que son arrêt doit, par suite, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, être annulé ;

Considérant qu’il y a lieu, par application des dispositions de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l’affaire au fond ;

Considérant que les requêtes présentées devant la cour administrative d’appel par le SYCTOM et par le ministre de l’équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sont dirigées contre le même jugement du tribunal administratif de Paris du 28 mars 2002 ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur la recevabilité de l’appel du ministre :

Considérant, d’une part, que la circonstance que le ministre a intitulé son mémoire d’appel " recours en cassation " n’est pas de nature à rendre son recours irrecevable ; que, d’autre part, le ministre produit le rapport d’émission, portant la date, non contestée, du 4 juin 2002, de la télécopie par laquelle il a saisi la cour de son appel du jugement qui lui avait été notifié le 4 avril précédent ; que son envoi par télécopie ayant été régularisé, son appel n’était donc pas tardif ; qu’il suit de là que les fins de non-recevoir opposées par la SOCIETE LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER doivent être écartées ;

Sur les interventions :

Considérant que le SYCTOM, titulaire du permis de construire litigieux, a intérêt à l’annulation du jugement qui a annulé ce permis et dont il interjette d’ailleurs lui-même appel ; qu’il en va de même du ministre de l’équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; que, par suite, les interventions présentées respectivement, d’une part, par le SYCTOM à l’appui de l’appel du ministre, lequel n’était pas irrecevable et, d’autre part, par le ministre à l’appui de l’appel du syndicat, doivent être admises ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 600-4-1 du code de l’urbanisme : " Lorsqu’elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d’urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l’ensemble des moyens de la requête qu’elle estime susceptibles de fonder l’annulation ou la suspension, en l’état du dossier " ; que ces dispositions ont pour objet de permettre que les parties à un litige mettant en cause un acte intervenu en matière d’urbanisme soient éclairées sur l’ensemble des vices susceptibles d’entacher la légalité de cet acte ;

Considérant que si le tribunal administratif a retenu plusieurs moyens pour fonder l’annulation du permis de construire litigieux, le jugement précise que cette annulation intervient " sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête " ; que, par cette motivation, le tribunal administratif laisse entendre que d’autres moyens invoqués auraient éventuellement pu conduire à l’annulation de la décision attaquée ; que, dès lors, il a méconnu l’obligation que lui imposaient les dispositions précitées de l’article L. 600-4-1 du code de l’urbanisme ; que son jugement doit, par suite, être annulé ;

Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SOCIETE LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER ;

Sur la légalité du permis de construire attaqué :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant, en premier lieu, que les articles R. 510-1 et R. 510-2 du code de l’urbanisme, pris en application de l’article L. 510-1 du même code, prévoient que, dans la région Ile-de-France, la construction d’installations servant à des activités industrielles ne relevant pas de l’Etat ou de son contrôle doit être soumise à un agrément, délivré par le préfet dans le cas où une convention relative aux modalités locales de respect des objectifs d’aménagement et de développement du territoire et de la politique de la ville a été conclue entre la commune intéressée et l’Etat ; que l’article R. 510-8 dispose par ailleurs que " dans le cas où l’agrément est requis, le permis de construire ne peut être délivré que sur production de la décision d’agrément " ; qu’il en résulte que si le permis litigieux devait être précédé de cet agrément, intervenu le 20 mars 2000, sa légalité n’était pas pour autant subordonnée à celle de ce dernier acte, faute d’être pris pour son application ; que les moyens, tirés de ce qu’il n’est pas établi que le préfet était compétent pour accorder l’agrément faute de certitude sur la régularité de la convention conclue entre la commune d’Issy-les-Moulineaux et l’Etat et de ce que l’agrément aurait été délivré au vu d’un dossier incomplet, ne peuvent donc être utilement invoqués à l’encontre du permis de construire ;

Considérant, en deuxième lieu, que, compte tenu de leur teneur, les documents complémentaires versés au dossier de demande de permis de construire le 5 septembre 2000 et qui concernaient des autorisations d’occupation du domaine public, n’étaient pas de nature à remettre en cause l’appréciation que le service gestionnaire de la voirie, conformément aux dispositions de l’article R. 421-15 du code de l’urbanisme, avait portée le 3 juillet 2000 sur les effets de la construction envisagée sur les accès à la voie publique ; que le moyen tiré de l’irrégularité de la consultation de ce service doit donc être écarté ; que, de la même façon, ces documents n’étaient pas de nature à exercer une influence sur l’avis porté par la sous-commission départementale pour la sécurité quant aux risques d’incendie et de panique ; que l’avis rendu par cette instance le 13 juillet 2000 n’était donc pas entaché d’irrégularité ;

Considérant, en troisième lieu, qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 421-3 et R. 421-38-20 du code de l’urbanisme et L. 111-7, R. 111-19-7 et suivants, R. 123-38 et R. 123-39 du code de la construction et de l’habitation, que la sous-commission départementale pour l’accessibilité doit se prononcer sur les demandes de permis concernant, notamment, les établissements recevant du public tels que le centre de tri et de valorisation des déchets en cause dans le présent litige ; qu’il n’est pas contesté que cette sous-commission a rendu son avis le 7 juin 2000, au vu d’un dossier qui contenait les éléments suffisants pour lui permettre de porter une appréciation sur l’accessibilité des personnes handicapées au bâtiment projeté ; que si la SOCIETE LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER critique la composition et le fonctionnement de la commission communale d’accessibilité, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette commission, dont la consultation n’était pas obligatoire, se soit prononcée sur la demande de permis de construire ; qu’enfin, la circonstance que la direction départementale de l’équipement ait été consultée alors que les textes applicables en la matière n’en prévoient pas l’intervention est sans incidence sur la légalité de la décision préfectorale attaquée ; que, par suite, les moyens tirés de ce que la consultation au titre de l’accessibilité aurait été irrégulière doivent être écartés ;

Considérant, en quatrième lieu, qu’une consultation, même facultative, n’est régulière que si l’organisme consulté a été destinataire de l’ensemble des éléments lui permettant d’émettre un avis en toute connaissance de cause ; que tel était le cas en l’espèce du dossier transmis au Service de navigation de la Seine saisi pour avis ; que, dès lors, la circonstance que ce service a demandé des études complémentaires sur l’impact du projet de construction en termes hydrauliques et a finalement rendu un avis défavorable faute, selon lui, d’avoir été plus complètement éclairé, n’est pas de nature à rendre sa consultation irrégulière ;

Considérant, en cinquième lieu, qu’aux termes du A de l’article R. 421-2 du code de l’urbanisme : " Le dossier joint à la demande de permis de construire comporte : / 5° Deux documents photographiques au moins permettant de situer le terrain respectivement dans le paysage proche et lointain et d’apprécier la place qu’il y occupe. Les points et les angles de prise de vue seront reportés sur le plan de situation et le plan de masse. / 7° Une notice permettant d’apprécier l’impact visuel du projet. A cet effet, elle décrit le paysage et l’environnement existants et expose et justifie les dispositions prévues pour assurer l’insertion dans ce paysage de la construction, de ses accès et de ses abords " ; qu’il ressort des pièces du dossier que l’étude d’impact accompagnant le projet de construction du centre de tri et de valorisation comportait une notice architecturale et une autre intitulée " espaces verts ", ainsi que des documents photographiques, graphiques et de synthèse permettant de situer le terrain dans son environnement et d’apprécier l’impact visuel de la construction et d’évaluer les dispositions prises pour assurer l’insertion de l’ouvrage dans cet environnement ; que si les points et angles de prise de vue n’ont pas été reportés sur les plans de situation et de masse, les documents photographiques sont accompagnés de légendes indiquant les endroits d’où les clichés ont été pris ; que, dans ces conditions, les insuffisances du dossier ne sont pas telles qu’elles auraient empêché le préfet de se prononcer en connaissance de cause ;

Considérant, en sixième lieu, que la société requérante fait valoir que la construction projetée aurait dû, préalablement à la délivrance du permis de construire, être autorisée en vertu de l’article 10 de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l’eau désormais codifié aux articles L. 214-1 à L. 214-3 du code de l’environnement ; que, toutefois, la construction projetée est une installation classée, catégorie qui n’est pas soumise à l’autorisation prévue à l’article 10 précité de la loi sur l’eau ; que, par ailleurs, si l’article R. 421-3-2 du code de l’urbanisme prévoit que la demande de permis de construire doit être accompagnée de la justification du dépôt de la demande d’autorisation au titre de la législation sur les installations classées, aucun texte n’impose que cette autorisation soit délivrée préalablement au permis de construire ; que le moyen doit, dès lors, être écarté ;

Considérant, enfin, qu’aux termes de l’article 2 du décret du 12 octobre 1977 pris pour l’application de l’article 2 de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, désormais codifiée aux articles L. 122-1 et suivants du code de l’environnement : " Le contenu de l’étude d’impact doit être en relation avec l’importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l’environnement./ L’étude d’impact présente successivement : / 1° Une analyse de l’état initial du site et de son environnement, portant notamment sur les richesses naturelles et les espaces naturels agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, affectés par les aménagements ou ouvrages ; 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur l’environnement (.) ; / 3° Les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue des préoccupations d’environnement, parmi les partis envisagés, le projet présenté a été retenu " ;

Considérant que la société requérante fait valoir que l’étude d’impact jointe au dossier de demande de permis est insuffisante quant à l’analyse du sous-sol ; qu’il ressort toutefois des pièces du dossier que l’étude rend compte de recherches sur l’état de pollution de ce sous-sol et de sondages effectués jusqu’à 35 et 45 mètres de profondeur ; que si une paroi moulée sera enfouie plus profondément encore, le bâtiment lui-même est enterré à moins de 35 mètres ; que, dans ces conditions, si elle ne repose pas sur une analyse exhaustive du sous-sol, l’étude comporte des informations suffisantes pour respecter les prescriptions du décret précité ; qu’il en va de même de l’analyse du trafic routier, fondée, contrairement à ce que prétend la société requérante, sur des comptages récents et étalés dans le temps ; que l’étude d’impact indique les incidences de la construction projetée sur le stockage et l’écoulement des crues sans que la mention d’études complémentaires sur la gestion du risque d’inondation ne révèle, en l’espèce, de lacunes telles qu’elles remettraient en cause la régularité de la procédure ; que l’étude précise l’ampleur des déblais à évacuer et les incidences de cette évacuation sur l’environnement, rendant ainsi sans conséquence le défaut de mention de l’auto-pont comme modalité technique finalement retenue pour cette évacuation ; qu’enfin, l’étude d’impact indique, dans un chapitre intitulé " description du centre de valorisation et raisons des choix techniques et géographiques ", les raisons pour lesquelles, parmi les trois implantations envisagées pour le centre, celle présentée dans la demande avait finalement été retenue ; que le moyen tiré de l’insuffisance de l’étude d’impact doit, par suite, être rejeté en ses différentes branches ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article R. 421-1-1 du code de l’urbanisme : " La demande de permis de construire est présentée soit par le propriétaire du terrain ou son mandataire, soit par une personne justifiant d’un titre l’habilitant à construire sur le terrain (.) " ; qu’il ressort des pièces du dossier que le SYCTOM était, à la date de délivrance du permis litigieux, titulaire d’une promesse de vente datée du 16 juin 1999 conclue avec la Société immobilière pour l’automobile et la mécanique (SIAM), dont il n’était pas contesté devant le préfet qu’elle était propriétaire de l’intégralité du terrain d’assiette ;

Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme : " Le permis de construire peut être refusé ou n’être accordé que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation ou leurs dimensions, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. Il en est de même si les constructions projetées, par leur implantation à proximité d’autres installations, leurs caractéristiques ou leur situation, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique " ; que les installations du centre de tri et de valorisation des ordures ménagères seront partiellement enterrées, des matériaux absorbants prévus et les sources de vibration équipées de dispositifs en diminuant l’ampleur ; que les émissions sonores seront ainsi limitées ; que, de la même façon, des dispositions, dont le bâchage des bennes, ont été prises pour réduire les nuisances olfactives ; qu’il ne ressort pas des éléments techniques versés au dossier que les risques d’explosion du coke de lignite seraient avérés ; qu’enfin, des mesures ont été prises afin de cantonner la crue à une partie des installations, et limiter les conséquences d’une éventuelle inondation en termes de pollution hydraulique ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le permis serait entaché d’erreur manifeste d’appréciation au regard des dispositions de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que si la société requérante fait valoir que la révision du plan d’occupation des sols de la commune d’Issy-les-Moulineaux aurait été illégale faute de convocation régulière du conseil municipal, elle n’assortit pas ce moyen des précisions suffisantes permettant d’en apprécier le bien-fondé ;

Considérant, en quatrième lieu, qu’aux termes du § 3 de l’article UFc2 du règlement du plan d’occupation des sols : " Le secteur étant situé en zone inondable, toute surface de plancher fonctionnel doit être située au dessus de la cote NGF31, 84./ Au dessous de cette cote ne peuvent être réalisées que les surfaces répondant aux prescriptions ci-dessous : / elles sont affectées à un usage de stationnement de véhicules, / elles constituent les accès aux immeubles, / elles sont affectées à des équipements d’intérêt général, qui, pour des raisons fonctionnelles, doivent être situés près du fleuve " ; que, d’une part, il n’est pas contesté que le centre de tri et de valorisation des ordures ménagères, dont le site de construction est situé dans cette zone inondable, constitue un équipement d’intérêt général ; que, d’autre part, il ressort des pièces du dossier que l’ampleur des besoins en eau industrielle de l’installation, pour les besoins du système de réfrigération et de production de vapeur, nécessitait l’implantation de l’usine à proximité immédiate du fleuve, ce qui permettait également qu’une partie du transport soit réalisée par voie fluviale ; que, dès lors, les dispositions de l’article UFc2 du règlement du plan d’occupation des sols n’ont pas été méconnues ;

Considérant, en cinquième lieu, que l’article UFc3 de ce règlement prévoit que " Toute construction ou installation doit être desservie par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l’importance et à la destination de l’immeuble (.). Les accès ne doivent pas présenter un risque anormal pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant les accès, ni une gêne au regard de l’intensité du trafic sur les voies concernées " et l’article UFc12 que " Toutes dispositions devront être prises pour réserver sur chaque propriété les dégagements nécessaires au stationnement et manœuvres, de façon à ce que les chargements et déchargements des véhicules s’effectuent à l’intérieur de la propriété " ; qu’il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de la possibilité d’un transport par voie fluviale et du non-franchissement du quai Roosevelt, le nouveau centre induira un moindre trafic routier que le centre auquel il est destiné à se substituer, implanté à proximité immédiate ; que, par ailleurs, la création d’un circuit souterrain de circulation des bennes garantit le déroulement dans l’enceinte du site des opérations de chargement et déchargement ; que, dès lors, les dispositions précitées des articles UFc3 et UFc12 n’ont pas été méconnues ;

Considérant, en sixième lieu, que l’article UFc13 du règlement du plan d’occupation des sols dispose que "25 pour cent au moins de la surface du terrain doivent être traités en surfaces végétales dont 25 pour cent minimum comportant une épaisseur de terre de 1 m minimum " ; qu’il ressort des pièces du dossier que 10 240 m² sur 36 872 m² seront traités en surfaces végétales ; que les documents y figurant permettent également de vérifier la condition tenant à l’épaisseur de terre ;

Considérant, enfin, que la circonstance que, selon la société requérante, d’autres lieux d’implantation du centre de tri et de valorisation des ordures ménagères auraient été préférables à celui retenu est sans incidence sur la légalité du permis de construire délivré ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêté préfectoral du 21 septembre 2000 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a autorisé le Syndicat mixte central de traitement des ordures ménagères de l’agglomération parisienne à construire un centre de tri et de valorisation des ordures ménagères quai Roosevelt à Issy-les-Moulineaux ;

Considérant que la présente décision statue sur la requête en annulation de l’arrêt attaqué ; que les conclusions de la requête n° 264448 tendant au sursis à exécution de cet arrêt sont, par suite, devenues sans objet ;

Considérant que, par application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de mettre à la charge de la SOCIETE LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER la somme de 10 000 euros à verser au Syndicat mixte central de traitement des ordures ménagères au titre des frais exposés par lui devant le tribunal administratif, la cour administrative d’appel et le Conseil d’Etat et non compris dans les dépens ; qu’en revanche, ces mêmes dispositions font obstacle à ce que ce syndicat ou l’Etat, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, versent à la société requérante la somme qu’elle demande au même titre ;

D E C I D E :

Article 1er : L’arrêt du 13 décembre 2002 de la cour administrative d’appel de Paris est annulé.

Article 2 : Il n’y a pas lieu de statuer sur la requête n° 264448 tendant au sursis à exécution de l’arrêt du 13 décembre 2002.

Article 3 : Les interventions présentées par le Syndicat mixte central de traitement des ordures ménagères et le ministre de l’équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer devant la cour administrative d’appel de Paris sont admises.

Article 4 : Le jugement du 28 mars 2002 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 5 : Les demandes présentées par la SOCIETE LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER devant le tribunal administratif de Paris sont rejetées.

Article 6 : La SOCIETE LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER versera au Syndicat mixte central de traitement des ordures ménagères la somme de 10 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le surplus des conclusions présentées par le Syndicat mixte central de traitement des ordures ménagères devant le tribunal administratif, la cour administrative d’appel et le Conseil d’Etat est rejeté.

Article 8 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER, au Syndicat mixte central de traitement des ordures ménagères de l’agglomération parisienne et au ministre de l’équipement, des transports, de l’aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.

 


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