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Conseil d’Etat, 14 juin 2004, n° 249465, Commune d’Ecouflant et Société des courses d’Angers

L’article L. 600-3 du code de l’urbanisme n’a ni pour objet ni pour effet de frapper d’irrecevabilité un recours contentieux qui, même s’il a été précédé d’un recours administratif non assorti des formalités de notification, a été introduit dans le délai de recours contentieux de droit commun de deux mois.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N°s 249465, 249545

COMMUNE D’ECOUFLANT
SOCIETE DES COURSES D’ANGERS

M. Verclytte
Rapporteur

M. Séners
Commissaire du gouvernement

Séance du 17 mai 2004
Lecture du 14 juin 2004

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 3ème et 8ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 3ème sous-section de la Section du contentieux

Vu 1°, sous le n° 249465, la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 8 août et 6 décembre 2002 et le 9 mai 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la COMMUNE D’ECOUFLANT, représentée par son maire en exercice ; la COMMUNE D’ECOUFLANT demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt du 23 avril 2002 par lequel la cour administrative d’appel de Nantes a, à la demande de M. G., annulé le jugement du 24 février 2000 du tribunal administratif de Nantes ayant rejeté la requête de M. G. aux fins d’annulation de l’arrêté du 4 novembre 1997 du maire d’Ecouflant accordant à la SOCIETE DES COURSES D’ANGERS un permis de construire pour l’édification de trente boxes à chevaux et d’un local de bureau pour le service vétérinaire, et annulé cet arrêté ;

Vu 2°, sous le n° 249545, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 août et 12 décembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la SOCIETE DES COURSES D’ANGERS, dont le siège est chemin Chabolais, B.P. 3024 à Angers Cedex 01 (49017) ; la SOCIETE DES COURSES D’ANGERS demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt du 23 avril 2002 par lequel la cour administrative d’appel de Nantes a annulé le jugement du 24 février 2000 du tribunal administratif de Nantes ayant rejeté la requête de M. G. aux fins d’annulation de l’arrêté du 4 novembre 1997 du maire d’Ecouflant accordant à la société exposante un permis de construire pour l’édification de trente boxes à chevaux et d’un local de bureau pour le service vétérinaire, et annulé cet arrêté ;

2°) de condamner M. G. à lui verser la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de l’urbanisme ;

Vu l’arrêté préfectoral du 20 novembre 1985 fixant le règlement sanitaire départemental du Maine-et-Loire ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Verclytte, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Ricard, avocat de la COMMUNE D’ECOUFLANT, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la SOCIETE DES COURSES D’ANGERS et de Me Luc-Thaler, avocat de M. Marcel G.,
- les conclusions de M. Séners, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par les requêtes susvisées, la COMMUNE D’ECOUFLANT et la SOCIETE DES COURSES D’ANGERS demandent au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt par lequel la cour administrative d’appel de Nantes, après avoir annulé le jugement du 24 février 2000 du tribunal administratif de Nantes, a annulé l’arrêté du 4 novembre 1997 par lequel le maire de la COMMUNE D’ECOUFLANT a délivré à la SOCIETE DES COURSES D’ANGERS un permis de construire pour l’édification de trente boxes à chevaux et d’un local de bureau pour le service vétérinaire ; que ces requêtes présentant à juger les mêmes questions, il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant que, saisi par l’effet dévolutif de l’appel, le juge d’appel doit répondre notamment aux moyens opérants invoqués en première instance par le défendeur, alors même que ce dernier, sans pour autant les abandonner, ne les aurait pas expressément repris dans un mémoire en défense devant lui ; que, par suite, la cour administrative d’appel de Nantes devait examiner les fins de non-recevoir présentées par la COMMUNE D’ECOUFLANT et la SOCIETE DES COURSES D’ANGERS tirées de ce que la demande de M. G. devant le tribunal administratif était irrecevable ; que la cour ayant omis de répondre à ces moyens, qui étaient opérants, les requérantes sont fondées à demander l’annulation de l’arrêt attaqué, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de leurs requêtes ;

Considérant qu’il y a lieu, en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l’affaire au fond ;

Sur les fins de non-recevoir soulevées en première instance :

Considérant, en premier lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que le moyen tiré par la COMMUNE D’ECOUFLANT de ce que la demande présentée par M. G. était irrecevable faute d’être revêtue d’un timbre fiscal manque en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, qu’il appartient à la COMMUNE D’ECOUFLANT et à la SOCIETE DES COURSES D’ANGERS de faire la preuve de la date à laquelle le permis litigieux a été affiché sur le terrain en application de l’article R. 490-7 du code de l’urbanisme ; qu’à défaut de tout constat ou attestation en ce sens, elles ne peuvent être regardées comme établissant que les exigences posées par cet article auraient été satisfaites dès le 1er septembre 1998, comme elles le soutiennent, et non seulement en novembre 1998, comme le soutient M. G. ; que, par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que M. G. ne peut être regardé comme ayant formé un recours gracieux contre le permis litigieux que le 17 novembre 1998, la lettre adressée par lui le 25 octobre 1998 au maire d’Ecouflant ne constituant pas un tel recours gracieux et ne pouvant donc être regardée comme valant connaissance acquise de l’arrêté litigieux ; qu’il s’ensuit que la commune et la société ne sont pas fondées à soutenir que la demande de M. G., enregistrée au greffe du tribunal administratif le 30 décembre 1998, était tardive ;

Considérant, en troisième lieu, que l’article L. 600-3 du code de l’urbanisme n’a ni pour objet ni pour effet de frapper d’irrecevabilité un recours contentieux qui, même s’il a été précédé d’un recours administratif non assorti des formalités de notification, a été introduit dans le délai de recours contentieux de droit commun de deux mois ; que, par suite, la COMMUNE D’ECOUFLANT et la SOCIETE DES COURSES D’ANGERS ne sont pas fondées à soutenir que la demande de M. G. serait irrecevable faute pour ce dernier d’avoir notifié à la société le recours gracieux qu’il avait formé le 17 novembre 1998 ;

Sur la légalité du permis de construire :

Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article L. 421-2 du code de l’urbanisme : " . - le projet architectural précise, par des documents graphiques ou photographiques, l’insertion dans l’environnement et l’impact visuel des bâtiments ainsi que le traitement de leur accès et de leurs abords. " ; qu’aux termes du A de l’article **R. 421-2 du même code : " Le dossier joint à la demande de permis de construire comporte : . 5° Deux documents photographiques au moins permettant de situer le terrain respectivement dans le paysage proche et lointain et d’apprécier la place qu’il y occupe. Les points et les angles des prises de vue seront reportés sur le plan de situation et le plan de masse. 6° Un document graphique au moins permettant d’apprécier l’insertion du projet de construction dans l’environnement, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et des abords. Lorsque le projet comporte la plantation d’arbres de haute tige, les documents graphiques devront faire apparaître la situation à l’achèvement des travaux et la situation à long terme ; 7° Une notice permettant d’apprécier l’impact visuel du projet. A cet effet, elle décrit le paysage et l’environnement existants et expose et justifie les dispositions prévues pour assurer l’insertion dans ce paysage de la construction, de ses accès et de ses abords. " ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier, d’une part, que le terrain d’assiette du projet ayant fait l’objet du permis de construire litigieux n’est séparé que par une haie plantée d’arbres d’un lotissement comprenant de nombreuses maisons d’habitation, dont certaines situées à une vingtaine de mètres seulement de la construction projetée et, d’autre part, que la présence de ce lotissement n’était signalée ni par la notice ni par le document graphique joints à la demande de permis en application des dispositions précitées du code de l’urbanisme ; que, dans ces conditions, et alors même que, d’une part, l’une des photographies jointes à la demande de permis laisse deviner la présence derrière les arbres d’une ou deux habitations et que, d’autre part, l’administration avait une bonne connaissance des lieux, cette omission d’un élément important de l’environnement immédiat du projet constitue une méconnaissance de ces dispositions ;

Considérant, en second lieu, qu’aux termes de l’article 153-5 du règlement sanitaire départemental de Maine-et-Loire, tel qu’arrêté par le préfet le 20 novembre 1985 : " Sans préjudice de l’application des documents d’urbanisme existant dans la commune, des cahiers des charges de lotissement, l’implantation des bâtiments renfermant des animaux ne doit pas être source de nuisance pour le voisinage. Sont autorisées, sans autres contraintes vis-à-vis du voisinage, les implantations réalisées dans les conditions suivantes : / - les élevages porcins à lisier implantés à plus de 100 m des immeubles d’habitation habituellement occupés par des tiers, des zones de loisirs et de tout établissement recevant du public ; / - les autres élevages (à l’exception des élevages de type familial et de ceux de volailles et de lapins) implantés à plus de 50 m des immeubles d’habitation habituellement occupés par des tiers, des zones de loisirs et de tout établissement recevant du public à l’exception des installations de camping à la ferme ; . / Cependant, en cas d’impossibilité technique ou contrainte économique très importante, des dérogations pourront être accordées après avis du conseil départemental d’hygiène. ." ; qu’aux termes de l’article 153-1 du même règlement : " Le terme ’élevage’ s’entend à la fois pour les élevages professionnels ou pour l’entretien d’animaux " ; qu’aux termes de l’article 154-1 de ce règlement : " Tous les locaux visés à l’article 153-1 destinés au logement, même temporaire, des animaux, sont efficacement ventilés. " ; qu’il résulte de l’ensemble de ces dispositions que les locaux ayant vocation à héberger des animaux, même de manière temporaire, doivent être regardés comme destinés à l’entretien de ces animaux et comme constituant donc un élevage au sens et pour l’application du règlement sanitaire départemental de Maine-et-Loire ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que les boxes litigieux ont pour destination d’accueillir les chevaux à l’occasion des courses ; que, dans ces conditions, ces bâtiments, alors même que l’hébergement auquel ils pourvoient ne serait que temporaire, doivent être regardés comme destinés à l’entretien d’animaux au sens des dispositions précitées du règlement sanitaire de Maine-et-Loire ; qu’il est constant que ces boxes sont situés à moins de 50 mètres de plusieurs maisons d’habitation ; que la COMMUNE D’ECOUFLANT et la SOCIETE DES COURSES D’ANGERS ne soutiennent pas qu’elles auraient sollicité et obtenu la dérogation dont la possibilité est prévue à l’article 154-1 de ce règlement ; que, par suite, le permis de construire litigieux doit être regardé comme ayant été accordé en méconnaissance des dispositions de ce règlement ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. G. est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 4 novembre 1997 par lequel le maire d’Ecouflant a délivré ce permis de construire à la SOCIETE DES COURSES D’ANGERS ;

Considérant, pour l’application de l’article L. 600-4-1 du code de l’urbanisme, qu’en l’état du dossier aucun autre moyen ne paraît susceptible de fonder l’annulation prononcée par la présente décision ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que M. G. n’étant pas la partie perdante dans la présente instance, ces dispositions font obstacle à ce que soient mises à sa charge les sommes que la SOCIETE DES COURSES D’ANGERS et la COMMUNE D’ECOUFLANT demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; qu’en application de ces dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la SOCIETE DES COURSES D’ANGERS la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. G. en cassation et à la charge de la société et de la commune, solidairement, la somme de 1 000 euros au titre des frais qu’il a exposés en appel ;

D E C I D E :

Article 1er : L’arrêt du 23 avril 2002 de la cour administrative d’appel de Nantes est annulé.

Article 2 : Le jugement du 24 février 2000 du tribunal administratif de Nantes et l’arrêté du 4 novembre 1997 du maire d’Ecouflant sont annulés.

Article 3 : La SOCIETE DES COURSES D’ANGERS versera à M. G. la somme de 1 500 euros ainsi que, solidairement avec la COMMUNE D’ECOUFLANT, la somme de 1 000 euros, en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la COMMUNE D’ECOUFLANT et de la SOCIETE DES COURSES D’ANGERS est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE D’ECOUFLANT, à la SOCIETE DES COURSES D’ANGERS et à M. Marcel G.. Une copie en sera adressée pour information au ministre de l’équipement, des transports, de l’aménagement du territoire, du tourisme et de la mer et au ministre de la santé et de la protection sociale.

 


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