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Conseil d’Etat, 5 mai 2008, n° 293913, Ministre de l’économie, des finances et de l’industrie c/ Société anonyme Moteurs Leroy Somer

Ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d’éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée en fonction de laquelle sont plafonnées les cotisations de taxe professionnelle. Pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l’une de ces catégories, il y a lieu de se reporter aux dispositions du plan comptable général dans leur rédaction en vigueur lors de l’année d’imposition concernée.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 293913

MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE

c/ Société anonyme Moteurs Leroy Somer

M. Florian Blazy
Rapporteur

M. Pierre Collin
Commissaire du gouvernement

Séance du 26 mars 2008
Lecture du 5 mai 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 9ème et 10ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 9ème sous-section de la Section du contentieux

Vu le recours du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE, enregistré le 30 mai 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat ; le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt du 30 mars 2006 par lequel la cour administrative d’appel de Bordeaux a déchargé la Société Moteurs Leroy Somer du complément de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1994 et 1995 à concurrence respectivement de 71 167, 32 euros et 89 018, 94 euros et réformé, dans cette mesure, le jugement du 31 janvier 2002 du tribunal administratif de Poitiers ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 portant loi de finances pour 2006 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Florian Blazy, Auditeur,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société Moteurs Leroy Somer,

- les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société anonyme Moteurs Leroy Somer a obtenu le plafonnement en fonction de la valeur ajoutée de ses cotisations de taxe professionnelle au titre des années 1994 et 1995 ; qu’à l’occasion d’une vérification de comptabilité portant notamment sur les exercices clos le 31 août de ces deux années, l’administration fiscale, estimant que la société aurait dû inclure dans la valeur ajoutée produite les indemnités d’assurance qu’elle avait perçues, à la suite de sinistres, pour un montant de 13 337 908 F en 1994 et de 14 588 171 F en 1995 et qu’elle avait comptabilisées au compte 79 "transfert de charges", a mis à sa charge des compléments de taxe professionnelle pour ces deux années, d’un montant respectif de 466 827 F (71 167, 32 euros) et 593 926 F (89 018, 94 euros) ; que le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 30 mars 2006 par lequel la cour administrative d’appel de Bordeaux a déchargé la société anonyme Moteurs Leroy Somer de ces impositions complémentaires et réformé le jugement du 31 janvier 2002 du tribunal administratif de Poitiers rejetant, dans cette mesure, la demande présentée par cette société ;

Considérant qu’aux termes de l’article 1647 B sexies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d’imposition en litige : "I. Sur demande du redevable, la cotisation de taxe professionnelle de chaque entreprise est plafonnée à 3, 5 p. 100 de la valeur ajoutée produite au cours de l’année au titre de laquelle l’imposition est établie ou au cours du dernier exercice de douze mois clos au cours de cette même année lorsque cet exercice ne coïncide pas avec l’année civile. La valeur ajoutée est définie selon les modalités prévues au II (.)/ II.1. La valeur ajoutée mentionnée au I est égale à l’excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers constaté pour la période définie au I. /2 Pour la généralité des entreprises, la production de l’exercice est égale à la différence entre : / d’une part, les ventes, les travaux, les prestations de services ou les recettes ; les produits accessoires ; les subventions d’exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenus ; les travaux faits par l’entreprise elle-même ; les stocks à la fin de l’exercice ; / et, d’autre part, les achats de matières et marchandises, droits de douanes compris ; les réductions sur ventes ; les stocks au début de l’exercice./ Les consommations de biens et services en provenance de tiers comprennent : les travaux, fournitures et services extérieurs, à l’exception des loyers afférents aux biens pris en crédit-bail, les frais de transports et déplacements, les frais divers de gestion (.)" ; que par exception, pour les impositions établies au titre de 1995, le taux prévu au premier alinéa du I de cet article a été porté à 3, 8 p. 100 pour les entreprises dont le chiffre d’affaires de cette même année était compris entre 140 millions de francs et 500 millions de francs et à 4 p. 100 pour celles dont le chiffre d’affaires excédait cette dernière limite ;

Considérant que ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d’éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée en fonction de laquelle sont plafonnées les cotisations de taxe professionnelle ; que pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l’une de ces catégories, il y a lieu de se reporter aux dispositions du plan comptable général dans leur rédaction en vigueur lors de l’année d’imposition concernée ; qu’aux termes de l’article 38 quater de l’annexe III au code général des impôts : "Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l’assiette de l’impôt" ; que si les indemnités d’assurances perçues par une entreprise pour compenser un sinistre doivent être inscrites au crédit du compte 79 "transfert de charges" et si ce compte ne pouvait être rattaché à aucune des rubriques prévues pour le calcul de la valeur ajoutée par l’article 1647 B sexies avant sa modification par l’article 85 de la loi de finances pour 2006 du 30 décembre 2005, ces indemnités doivent, dans le cas et dans la mesure où elles compensent des charges qui ont été elles-mêmes déduites par cette entreprise pour la détermination de sa valeur ajoutée au titre des consommations de biens et services en provenance de tiers, être regardées, au sens et pour l’application des dispositions de cet article et en particulier du 1 de son II, comme une production de l’exercice au cours duquel elles ont été perçues par le redevable ;

Considérant que la cour administrative d’appel a jugé que lorsque l’indemnité perçue compense une charge déduite de la valeur ajoutée, l’administration ne peut pas prendre en compte cette indemnité comme production de l’exercice au titre duquel elle est reçue, mais doit remettre en cause les charges précédemment déduites au titre des consommations de biens et services en provenance de tiers ; que le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE est fondé à soutenir qu’en en déduisant que l’administration avait donné un fondement juridique erroné à la rectification des demandes de plafonnement de la société à laquelle le service a procédé et en refusant par suite de neutraliser les charges prises en compte pour la détermination de la valeur ajoutée mais non supportées en définitive par l’entreprise alors que les indemnités d’assurance perçues par la société devaient, dans la mesure où elles avaient compensé des charges déduites par celle-ci pour le calcul de sa valeur ajoutée, être regardées, au sens et pour l’application de l’article 1647 B sexies et en particulier du 1 de son II, comme une production de l’exercice au cours duquel elles avaient été perçues par la société, la cour a commis une erreur de droit ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, que le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE est fondé à demander l’annulation de l’arrêt qu’il attaque ; que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de renvoyer l’affaire devant la cour administrative d’appel de Bordeaux ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas, dans la présente affaire, la partie perdante, la somme que demande la société anonyme Moteurs Leroy Somer au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L’arrêt du 30 mars 2006 de la cour administrative d’appel de Bordeaux est annulé.

Article 2 : L’affaire est renvoyée devant la cour administrative d’appel de Bordeaux.

Article 3 : Les conclusions de la société anonyme Moteurs Leroy Somer tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE et à la société anonyme Moteurs Leroy Somer.

 


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