LE CONSEIL DE LA CONCURRENCE,
Vu la lettre du 1er juin 1979 par laquelle l’Union fédérale
des consommateurs a, en application de l’article 15 de la loi du 19 juillet
1977, saisi la Commission de la concurrence de pratiques anticoncurrentielles
dans le secteur de l’électroménager ;
Vu la décision de la Commission de la concurrence en date du
13 octobre 1983 ;
Vu les ordonnances n°s45-1483 et 45-1484 du 30 juin 1945 respectivement
relatives aux prix et à la constatation, la poursuite et la répression
des infractions à la législation économique ;
Vu la loi n°77-806 du 19 juillet 1977 relative au contrôle
de la concentration économique et à la répression
des ententes illicites et des abus de position dominante, ensemble le décret
n°77-1189 du 25 octobre 1977 ;
Vu l’ordonnance n°86-1243 du 1er décembre 1986 relative à
la liberté des prix et à la concurrence et le décret
n°86-1309 du 29 décembre 1986 pris pour son application ;
Vu les observations présentées par les parties intéressées
sur le rapport qui leur a été communiqué le 18 septembre
1986 ;
Le commissaire du Gouvernement, le rapporteur général
et les parties entendus,
Retient les constatations (I) et adopte la décision (II) ci-après
exposées :
I. - Constatations
a) Le champ de la saisine et de l’enquête.
Le dossier de l’Union fédérale des consommateurs annexe
à la lettre du 1er juin 1979 susvisée décrivait des
pratiques générales concernant la production et la commercialisation
des produits électroménagers et considérées
par la partie saisissante comme anticoncurrentielles.
S’agissant des producteurs, l’U.F.C. dénonçait notamment
la multiplication des références et des sous-marques ainsi
que les conditions dans lesquelles les producteurs distribuaient leurs
produits dans le circuit commercial. S’agissant des distributeurs,
l’U.F.C. dénonçait des ventes en solitaire, des alignements
de prix dans quelques agglomérations et la pratique de la guelte.
b) Les caractéristiques des produits et des marchés.
Cinq catégories de gros appareils électroménagers
ont été étudiées : les lave-linge, les lave-vaisselle,
les réfrigérateurs, les congélateurs et les cuisinières
qui représentent ensemble une part significative de la consommation
des ménages (0,4 p. 100 en 1983, soit environ onze milliards de
francs).
Ces produits sont des biens d’équipement des ménages dont
le coût unitaire est relativement élevé mais dont l’usage
est désormais assez banalisé. Ainsi, plus de 80 p.100
des ménages français disposent de cuisinières, réfrigérateurs
et lave-linge. Le pourcentage de ménages équipés
est cependant plus faible pour les congélateurs (30 p. 100) et surtout
les lave-vaisselle (20 p. 100).
Ce fort taux d’équipement est le résultat d’une très
forte croissance du marché national de 1959 à 1982.
Sur ces vingt-trois années, la demande française a été
multipliée par près de cinq pour les réfrigérateurs
et congélateurs et par plus de six pour les lave-linge. Durant
cette même période les prix relatifs de ces appareils étaient
divisés par 5,7 pour les premiers et par 4,4 pour les seconds.
La production domestique. de ces appareils a baissé sensiblement
de 1980 à 1984 cependant que l’importation se développait
et représentait une part croissante et importante de la consommation
des ménages (46 p. 100 en 1983).
Pour chaque catégorie d’appareils, une très grande diversité
de machines est offerte au choix des clients. L’accroissement du
niveau de vie et le développement des quantités vendues se
sont en effet accompagnés d’une forte différenciation des
appareils.
c) Les producteurs.
En 1983, trois groupes industriels (Electrolux-Zanussi, Philips et Siemens-Bosch)
réalisaient la moitié des ventes des produits considérés
dans la C.E.E. En outre, trois autres groupes (A.E.G., Thomson et Indesit)
réalisaient 15 p. 100 des ventes.
Selon le Centre d’étude des revenus et des coûts, la part
de marché cumulée des trois principaux groupes intervenant
en France, Thomson, Philips et Electrolux, était en 1981 égale
à 57,9 p. 100 pour les réfrigérateurs, 40,3 p. 100
pour les congélateurs, 72,9 p. 100 pour les lave-linge, 53,3 p.
100 pour les lave-vaisselle et 44,9 p. 100 pour les cuisinières.
Ces parts se sont encore accrues depuis cette date, compte tenu des nombreux
rapprochements opérés par les entreprises, notamment : Thomson-C.E.P.E.M.
(ancienne filiale de la C.G.E.), Electrolux-Zanussi et Philips-Bauknecht.
C’est d’ailleurs principalement par croissance externe et, en particulier,
par la prise de contrôle de marques de distribution et la rationalisation
de leur outil de production au plan européen que les trois principaux
groupes industriels présents en France ont développé
leurs parts de marché depuis plusieurs dizaines d’années.
Il ne subsiste actuellement en France qu’une douzaine d’unités
de fabrication de gros appareils électroménagers, dont sept
appartiennent aux groupes Thomson, Philips et Electrolux. Seul le
groupe Thomson fabrique les cinq catégories de machines considérées
; Philips ne produit que des lave-linge à chargement par le dessus
; Electrolux des lave-linge et des cuisinières. On compte,
en outre, quelques entreprises moyennes dans la fabrication de cuisinières.
La rationalisation des productions et le faible nombre des établissements
au niveau européen conduisent chacun des principaux groupes présents
sur le territoire français à commercialiser notamment des
appareils qui ont été produits par des filiales étrangères
du même groupe ou par des établissements d’un autre groupe.
Si la pratique d’échanges entre fabricants de produits finis
est très répandue dans ce secteur d’activité, l’essentiel
des approvisionnements de chacun des trois principaux groupes industriels
présents sur le marché français provient des filiales
du même groupe. Les achats à d’autres fabricants sont
très limités et concernent pour l’essentiel des appareils
de coût unitaire faible.
Chaque groupe commercialise les produits qu’il vend sous un grand nombre
de marques de distribution. Les marques actuellement utilisées
par les groupes Thomson, Philips et Electrolux pour commercialiser leurs
gros appareils électroménagers sont entrées dans leur
patrimoine depuis longtemps ou au cours du processus de concentration évoqué
précédemment. En outre, ces groupes ont procédé
depuis une quinzaine d’années à une réduction sensible
du nombre des marques qu’ils utilisent.
d) Les distributeurs.
Il existe, en premier lieu, une grande diversité de formes et
de circuits de distribution : commerces indépendants, commerces
associés, multispécialistes, grands spécialistes,
grands magasins, hypermarchés, vente directe des producteurs, vente
par correspondance, etc.
En deuxième lieu, les politiques commerciales suivies par les
distributeurs, tant dans le choix des collections proposées (nombre
d’appareils et gammes de prix) que dans la nature et la qualité
des services offerts : conseil, aprèsvente... sont très diverses.
En troisième lieu, le poids relatif des différentes formes
de commerce a beaucoup évolué depuis une vingtaine d’années.
Selon des évaluations du Centre d’étude des revenus et des
coûts, de 1966 à 1981, les parts de marché seraient
passées de 1,5 à 16,5 p. 100 pour les hypermarchés,
de 81,5 à 48,5 p. 100 pour les commerçants indépendants
et associés. Ces derniers auraient connu, comme les grands
magasins, une baisse sensible de leur chiffre d’affaires en francs constants
depuis une dizaine d’années, ce qui expliquerait, au moins en partie,
les tensions existant dans ce secteur.
Enfin, diverses enquêtes réalisées par l’administration
sur les marges commerciales pour plusieurs classes de produits et les principales
formes de distribution permettent de constater, d’une part, que les taux
de marge des commerçants en équipement ménager sont
parmi les plus faibles, nettement inférieurs à ceux constatés
dans la distribution des articles d’habillement, du meuble ou des articles
de ménage, et d’autre part, que ce taux a baissé de 1972
à 1984 malgré la forte réduction du prix relatif des
appareils concernés.
e) La commercialisation de produits similaires sous des noms de marque
différents.
Pour diverses raisons, liées notamment à la concurrence
internationale, les producteurs proposent des gammes très étendues
d’appareils à partir du nombre le plus limité possible de
sous-ensembles ou de « modèles de base ». Des appareils
similaires du point de vue technique, mais de présentation non identique,
peuvent ainsi être vendus, sous des marques différentes, à
des prix variés.
Les différences d’esthétique, d’accessoires, de service
après-vente, peuvent entraîner des différences de coût
difficilement chiffrables entre appareils techniquement similaires mais
vendus sous des marques différentes. Les différences
de prix de base ou de cession pratiqués par les producteurs pour
des appareils identiques vendus sous des marques différentes sont
généralement faibles et sensiblement inférieures à
celles observées au stade de la revente entre les prix pratiqués
par les distributeurs.
f) Les produits solitaires.
La multiplication et la diversité des appareils similaires du
point de vue technique mais non identiques du point de vue de leur présentation,
les traditions et les réussites variables des marques et des filiales
de distribution des groupes industriels et, surtout, les politiques de
différenciation des distributeurs, qui peuvent d’ailleurs avoir
leurs propres marques, expliquent les raisons pour lesquelles, dans de
nombreuses zones de chalandise, une proportion importante des appareils
n’est proposée à la vente que dans un seul magasin.
Dans de tels cas, un client intéressé par un modèle
particulier, caractérisé par sa marque et sa référence
commerciale, se trouve souvent dans l’impossibilité de comparer
les prix et les services de plusieurs revendeurs.
En outre, l’analyse des résultats d’une enquête administrative
de 1982 dans 156 magasins de plusieurs villes avait mis en évidence
que certaines entreprises, particulièrement les grands spécialistes,
prélevaient des marges nettement plus élevées sur
les produits solitaires que sur les produits concurrencés.
g) Les tarifs et conditions générales de vente des
producteurs.
g 1. Les barèmes d’écart.
La présentation et le contenu des barèmes d’écarts
des groupes en cause varient considérablement d’une société
à l’autre ou même d’une année à l’autre pour
certaines sociétés. La détermination des ristournes
accordées à différents types de distributeurs résulte
d’un mélange complexe entre des considérations de coûts
ou de services rendus, d’évolutions des rapports de force entre
les divers agents économiques, notamment entre formes de commerce,
et de contraintes de tactique commerciale à court terme ou «
d’habillage » : chaque société chercherait à
se situer par rapport aux barèmes des concurrents.
g 2. Les références absentes des tarifs.
De nombreuses références sont absentes des documents tarifaires
des sociétés concernées durant certaines périodes
de vente. Outre les cas où ces manquements sont dus à
des erreurs matérielles, à des changements de dénomination
d’appareils ou à des fins de série, ils peuvent résulter
de deux circonstances particulières :
-le lancement de nouveaux modèles est un motif fréquemment
évoqué : le fournisseur teste pendant quelques mois plusieurs
variantes d’un même appareil avant d’inscrire aux tarifs officiels
les références des variantes les mieux accueillies par les
distributeurs. Très souvent ces lancements d’appareils absents
des documents tarifaires s’accompagnent d’actions promotionnelles.
Cependant l’administration n’a signalé aucune plainte pour refus
de vente dans la période récente ce qui pourrait être
dû au fait que les distributeurs ne sont pas tous intéressés
par les nouveaux produits où une marge plus élevée
correspond généralement à des risques supérieurs
(taux de rotation des produits et surtout service après-vente) ;
-les séries spéciales, également dénommées
références réservées, sont des modèles
réalisés sur les directives d’un distributeur qui commande
un nombre important de pièces, vendues sous la marque du fabricant.
Les motivations, lors de la négociation de ces contrats peuvent
être variées : plan de charge ou pénétration
d’un nouveau marché pour l’industriel, esthétique particulière,
insertion dans une campagne promotionnelle ou politique de segmentation
du marché pour le distributeur.
g 3. Les promotions.
Au-delà des opérations ponctuelles ou saisonnières,
des actions promotionnelles quasi-permanentes, décidées par
les responsables d’une marque mais dont les conditions ne figurent pas
sur les documents officiels destinés à l’ensemble des distributeurs,
sont courantes. Durant la période étudiée, les
principales marques des groupes ’Thomson et Philips ont utilisé
cette méthode pour la vente d’une proportion considérable
de leurs gros appareils ménagers, avec des rabais pouvant atteindre
sous des formes très variées, 6 à 8 p. 100 du prix
de vente, c’est-à-dire comparables au taux de profit net attendu
par le producteur et le distributeur.
Les responsables des sociétés commerciales considèrent
que ces rabais constituent une marge de négociation indispensable
à leurs représentants et un moyen nécessaire pour
gérer correctement leurs stocks. lis affirment de plus que ces promotions
sont portées à la connaissance de tous les revendeurs.
h) Les accords de coopération commerciale proposés
par les producteurs.
Dans le cadre de la distribution sélective, et non exclusive,
choisie par la plupart des fabricants de gros appareils électroménagers,
outre les tarifs et conditions générales de vente, les relations
contractuelles entre producteurs et distributeurs sont fondées sur
des accords de coopération commerciale qui régissent des
relations plus étroites entre certains partenaires sur la base du
volontariat.
h1. Les filiales de commercialisation du groupe Thomson.
Les accords de coopération commerciale proposés ces dernières
années aux détaillants par les sociétés S.D.R.M.,
S.O.D.A.M.E. et Surmelec, commercialisant respectivement les marques Thomson,
Brandt et Vedette, comprenaient un même paragraphe 1.9 aux termes
duquel le détaillant s’engage « à s’abstenir de toute
pratique ayant pour objet ou effet d’attirer la clientèle en se
servant de la marque Thomson (ou Brandt, ou Vedette), sans l’intention
sincère d’augmenter au maximum les ventes d’appareils Thomson (ou
Brandt, ou Vedette), et à ne pas affecter aux appareils Thomson
(ou Brandt, ou Vedette) un coefficient de marge inférieur à
celui pris sur la moyenne des autres marques vendues au cours de la période
considérée ».
Le groupe Thomson affirme que cette clause avait pour seul objet d’éviter
la vente à prix coûtant des seuls produits de ce groupe et
donc d’éviter la dérive des ventes à son détriment,
il affirme également n’avoir procédé à aucun
contrôle ni à aucune sanction en ce domaine ; il a enfin fait
savoir à l’administration que la dernière partie de la phrase
: « et à ne pas affecter aux appareils... » serait supprimée
à compter de 1986.
h2. Les filiales de commercialisation du groupe Philips.
Le contrat de coopération proposé par la Radiotechnique,
filiale de Philips industrielle et commerciale, aux revendeurs de la marque
Radiola prévoit en son paragraphe 13 que ses distributeurs devront
être en mesure de lui fournir des documents permettant de connaître
le nom et l’adresse des clients à qui ils livrent le matériel
de cette marque. Selon le groupe Philips, cette disposition est «
destinée à permettre de rémunérer le représentant
Radiola pour le chiffre d’affaires réalisé par celui-ci auprès
d’un groupement chevauchant le secteur de plusieurs représentants
».
Par ailleurs, l’accord de distribution proposé par Schneider
R.T., également filiale du groupe Philips, aux revendeurs de la
marque Laden comprend les passages suivants :
« Le revendeur spécialiste Laden s’interdit de se livrer,
sous peine de résiliation immédiate du présent accord,
à une vente qui serait assimilable à une pratique de prix
d’appel qui consiste pour un détaillant à offrir ou à
vendre des articles choisis également pour la notoriété
de leur marque :
« - soit en prélevant une marge bénéficiaire
nettement inférieure à celle qu’il applique aux articles
de marques concurrentes ;
« - soit avec une marge anormalement basse, compte tenu à
la fois de la nature du produit et de la forme du commerce, et ce à
seule fin d’attirer la clientèle dont le choix est ensuite orienté
vers l’achat de produits vendus avec un bénéfice normal.
« Les appareils, objets du présent accord, ne devront être
vendus qu’à la clientèle particulière et uniquement
dans le secteur à l’intérieur duquel le revendeur spécialiste
Laden est en mesure d’assurer le service dans les conditions prévues
ci-dessus. »
La définition donnée par Schneider R.T. du prix d’appel
ne fait pas référence à une éventuelle action
de promotion et diffère donc de celle de l’administration (circulaire
du 22 septembre 1980). De plus, les éventuels manquements
à la réglementation de la part des distributeurs seraient
appréciés par la seule société Schneider R.T.
h3. Les filiales de commercialisation du groupe Electrolux.
La société des usines et fonderies Arthur Martin (U.F.A.M.),
Filiale du groupe Electrolux, proposait en 1983 un « contrat de concessionnaire
agréé » à ses vendeurs, grossistes et détaillants.
En contrepartie des avantages consentis par les U.F.A.M. au-delà
des conditions générales de vente, ce contrat prévoyait
« 1. Territoire.
« La concession de vente est accordée au concessionnaire
agréé :
« - au détail (vente exclusivement à des usagers)
pour les seuls points de vente suivants :...
« - en gros (vente exclusivement à des installateurs officiels
agréés par les U.F.A.M.) pour le territoire défini
ci-dessous : ...
« 2. Promotion de la marque Arthur Martin.
« 2. 1. Le concessionnaire agréé accepte :
« a) De respecter la politique commerciale Arthur Martin.
Celle-ci lui est exposée par l’inspecteur des ventes et par la direction
régionale ;
« b) De ne pas faire figurer, sauf accord préalable des
U.F.A.M., le nom Arthur Martin dans une publicité sous quelque forme
que ce soit, portant sur des rabais consentis au public (à l’exception
d’appareils soldés ne figurant pas au tarif).
« g) D’afficher ou d’annoncer, pour chaque appareil, un prix qui
inclut les services auxquels a droit le consommateur. »
En outre, le chapitre III de l’avenant annuel prévoyait une bonification
de 2 p. 100 conditionnée par « la réalisation de l’objectif
défini au chapitre 1er dans le respect de la politique commerciale
d’Arthur Martin ».
II. - A la lumière des constatations qui précèdent,
le conseil de la concurrence :
Considérant que les faits visés étant antérieurs
à l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 1er décembre
1986, les articles 50 et 51 de l’ordonnance n°45-1483 du 30 juin 1945
demeurent applicables ;
Considérant qu’aucune des entreprises de fabrication ou de commercialisation
en cause ne détient une position dominante sur le marché
des gros appareils électroménagers ;
En ce qui concerne les politiques de production et les politiques
tarifaires des producteurs :
Considérant qu’il résulte de l’instruction que les échanges
entre fabricants dans ce secteur ont pour origine les économies
d’échelle à la production des matériels considérés
et le souci des producteurs, notamment ceux de taille comparativement modeste,
de disposer d’une large gamme de produits ; que ces échanges s’assimilent
à des relations entre sous-traitants et donneurs d’ordres et ne
s’accompagnent d’aucune contrainte quant à la liberté commerciale
de ces derniers ,
Considérant qu’il n’est établi par l’instruction ni que
les trois principaux groupes présents dans le secteur du gros équipement
électroménager ont segmenté artificiellement le marché
par le moyen d’une multiplication délibérée des marques
et sous-marques sous lesquelles leurs filiales de commercialisation vendent
les appareils, ni que chacun de ces groupes a utilisé la différenciation
de ses marques de distribution pour mettre en oeuvre des discriminations
de prix ; qu’au demeurant des variations de parts de marché entre
les groupes et entre les marques ont été constatées
;
Considérant que, dans ce secteur, la diversification des goûts
des consommateurs favorise la commercialisation d’un grand nombre d’appareils
techniquement similaires mais différents dans leur présentation
ou dans leur marque ; qu’ainsi, chaque distributeur est incité,
afin de différencier une partie de son offre de celle de ses concurrents,
à présenter à la vente ou, dans certains cas, à
faire fabriquer, des produits dits « solitaires » sur lesquels
il peut prélever un taux de marge supérieur à celui
pratiqué sur les autres appareils, qu’il n’est, cependant, pas établi
que la vente de produits « solitaires » par certains distributeurs
résulte nécessairement ou même généralement
d’ententes entre les distributeurs ;
Considérant que si la pratique de la guelte différenciée
des vendeurs constitue l’un des moyens par lesquels le choix des consommateurs
peu informés des caractéristiques des appareils est orienté
vers ceux sur lesquels les offreurs pratiquent les taux de marge les plus
élevés, il n’est cependant pas établi que cette pratique
résulte, sur un plan général, d’ententes ;
Considérant qu’en ce qui concerne les différences de barèmes
d’écarts entre les sociétés de commercialisation,
l’instruction n’a révélé aucun élément
précis permettant de conclure à l’existence d’une entente
ou action concertée entre certaines d’entre elles ;
Considérant qu’une meilleure information des distributeurs et
des consommateurs serait de nature à améliorer la concurrence
sur le marché des gros appareils électroménagers ;
qu’à cet égard, il serait souhaitable, d’une part, que figurent,
sur les tarifs et conditions générales de vente destinés
aux distributeurs, les références de tous les produits commercialisés
ainsi que les conditions d’attribution et les montants des rabais ou ristournes
proposés au titre des actions promotionnelles de longue durée
pour certains d’entre eux et, d’autre part, que les consommateurs soient
mieux informés des similarités techniques des appareils offerts,
notamment par l’indication, sur chaque appareil, de la référence
du modèle de base dont il est issu ; qu’il n’est cependant pas établi
que les lacunes constatées dans l’information résultent d’ententes
ou d’actions concertées ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède
que les pratiques susmentionnées ne sont pas visées par les
dispositions de l’article 50 de l’ordonnance du 30 juin 1945.
En ce qui concerne les contrats et accords de coopération
proposés par les sociétés de commercialisation filiales
des fabricants :
Considérant qu’il résulte de l’instruction que les sociétés
susmentionnées pratiquent la distribution sélective ; que
ces diverses sociétés représentent une part substantielle
du marché des gros appareils électroménagers , que
dès lors les conventions de distribution sélective qu’elles
proposent sont susceptibles d’affecter la concurrence sur le marché
,
Considérant qu’il n’est pas établi par l’instruction que
la clause du contrat de coopération commerciale de la Radiotechnique
imposant aux revendeurs de la marque Radiola d’être en mesure de
fournir le nom et l’adresse des clients auxquels ils livrent des produits
de la marque aît, au cas particulier, eu pour objet ou pu avoir pour
effet de limiter la concurrence entre ces revendeurs ;
Considérant que diverses dispositions du contrat de distribution
sélective proposé en 1983 par la société des
Usines et Fonderies Arthur Martin limitaient les conditions d’activité
de ces revendeurs quant à leur champ territorial d’activité
à la clientèle à laquelle ils pouvaient s’adresser
et à leur publicité en matière de rabais ; que ces
dispositions pouvaient avoir pour effet de limiter la concurrence entre
ces distributeurs et étaient, dès lors, visées par
les dispositions de l’article 50 de l’ordonnance du 30 juin 1945 ; qu’il
n’est pas établi par l’instruction que les dispositions de l’article
51 de cette ordonnance leur aient été applicables ; que les
contrats proposés par la société des Usines et Fonderies
Arthur Martin (U.F.A.M.) ont été remplacés en 1986
par des contrats de distributeurs agréés dans lesquels ces
dispositions ne figurent plus.
Considérant que les clauses figurant, de 1983 à 1985,
dans les contrats de coopération commerciale des sociétés
S.D.R.M., S.O.D.A.M.E. et Surmelec du groupe Thomson, visant à empêcher
les distributeurs de diminuer leurs marges sur les appareils fournis par
rapport à la marge pratiquée sur les produits d’autres marques,
avaient pour objet et pouvaient avoir pour effet de restreindre la liberté
de Fixation des prix de revente de ces distributeurs et de limiter la concurrence
entre eux ; que si la société Thomson Electroménager
a fait savoir à l’administration, par lettre en date du 20 décembre
1985, que les dispositions contraires à l’article 50 précédemment
citées ne figureraient pas dans les conditions commerciales de 1986
des sociétés S.D.R.M., S.O.D.A.M.E. et Surmelec, elle a,
par ailleurs, fait valoir en 1986 que ces sociétés disposent
de toute latitude dans le choix de leur politique et qu’elle n’a aucun
rôle direct dans la distribution en France ; que, dans ces conditions,
il n’est pas établi que ces clauses aient été supprimées
;
Considérant que des clauses analogues à celles mentionnées
ci-dessus figurent dans les accords de distribution proposés aux
revendeurs de la marque Laden par la société Schneider R.T.
; qu’en outre d’autres clauses de ces accords imposent à ces revendeurs
de ne vendre qu’à la clientèle particulière et limitent
le secteur d’intervention de chacun d’eux ; que ces clauses limitent la
concurrence entre ces revendeurs ; que, par lettre en date du 17 novembre
1986, la S.A. Philips industrielle et commerciale a déclaré
que, depuis 1985, elle était aux droits de la société
Schneider R.T. ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède
que les contrats de coopération commerciale des sociétés
S.D.R.M., S.O.D.A.M.E. et Surmelec et les accords de distribution proposés
aux revendeurs de la marque Laden par la S.A. Philips industrielle et commerciale
contiennent des clauses qui sont visées par les dispositions de
l’article 50 de l’ordonnance du 30 juin 1945 ; qu’il n’est pas établi
par l’instruction que les dispositions de l’article 51 de cette ordonnance
sont applicables à ces clauses ;
Considérant que l’insertion de telles clauses dans ces contrats
constitue également une pratique contraire aux dispositions de l’article
7 de l’ordonnance n°86-1243 du 1er décembre 1986 ; que, dès
lors, il y a lieu d’enjoindre aux sociétés concernées
de mettre fin à leurs pratiques ;