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Conseil d’Etat, 20 février 2008, n° 272431, Yves L.

Lorsque des poursuites disciplinaires ont été engagées devant l’ordre des pharmaciens par une plainte du directeur régional des affaires sanitaires et sociales, qui doit être regardé, au sens des dispositions précitées, comme un représentant de l’Etat dans la région, l’ensemble des représentants de l’Etat doivent s’abstenir de siéger, même avec voix consultative, au sein des organes appelés à connaître des poursuites.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 272431

M. L.

M. Philippe Ranquet
Rapporteur

M. Terry Olson
Commissaire du gouvernement

Séance du 4 février 2008
Lecture du 20 février 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 5ème et 4ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 5ème sous-section de la section du contentieux

Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 21 septembre, 21 décembre 2004 et 2 février 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Yves L. ; M. L. demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler la décision du 29 juin 2004 du Conseil national de l’ordre des pharmaciens qui a annulé la décision du 11 septembre 2000 de la chambre de discipline du conseil régional de l’ordre des pharmaciens d’Ile-de-France et a prononcé à son encontre la sanction de l’interdiction d’exercer la pharmacie pendant une période de 18 mois assortie du sursis pour une durée de 6 mois ;

2°) réglant l’affaire au fond, d’annuler la décision du 11 septembre 2000 et de le relaxer de toutes poursuites ;

3°) subsidiairement, de constater que les faits reprochés sont amnistiés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Ranquet, Auditeur,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat M. L. et de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat du Conseil national de l’ordre des pharmaciens,

- les conclusions de M. Terry Olson, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 4234-10 du code de la santé publique : " Lorsque les différents conseils statuent en matière disciplinaire, sur saisine du ministre chargé de la santé ou du représentant de l’Etat dans le département ou la région, les représentants de l’Etat mentionnés aux articles L. 4231-4 et L. 4232-6 à L. 4232-15 ne siègent pas dans ces instances " ; qu’il résulte de ces dispositions que lorsque des poursuites disciplinaires ont été engagées devant l’ordre des pharmaciens par une plainte du directeur régional des affaires sanitaires et sociales, qui doit être regardé, au sens des dispositions précitées, comme un représentant de l’Etat dans la région, l’ensemble des représentants de l’Etat doivent s’abstenir de siéger, même avec voix consultative, au sein des organes appelés à connaître des poursuites ; qu’il ressort des mentions de la décision attaquée que le pharmacien chimiste général inspecteur, représentant le ministre chargé de l’outre-mer, a siégé avec voix consultative lors de l’audience au cours de laquelle le conseil national de l’ordre a examiné l’appel de M. L. contre une décision du conseil régional d’Ile-de-France rendue à la suite d’une plainte du directeur régional des affaires sanitaires et sociales ; que la décision attaquée doit par suite être annulée ;

Considérant qu’aux termes du second alinéa de l’article L. 821-2 du code de justice administrative : " Lorsque l’affaire fait l’objet d’un second pourvoi en cassation, le Conseil d’Etat statue définitivement sur cette affaire " ; qu’il y a lieu, par application de ces dispositions, de régler l’affaire au fond ;

Considérant que la décision du 11 septembre 2000 du conseil régional d’Ile-de-France de l’ordre des pharmaciens, dont M. L. relève appel, mentionne la participation au délibéré de Mme Rosenzweig alors qu’il ressort de la feuille de présence figurant au dossier que cette dernière n’a pas siégé ; que le requérant est dès lors fondé à soutenir que cette décision est entachée d’irrégularité et doit être annulée ;

Considérant qu’il y a lieu d’évoquer l’affaire et de statuer immédiatement sur la plainte formée contre M. L. par le directeur régional des affaires sanitaires et sociales d’Ile-de-France ;

Considérant qu’aux termes de l’article R. 5015-20 du code de la santé publique dans sa rédaction en vigueur à la date des faits litigieux : " Les pharmaciens doivent donner aux membres des corps d’inspection compétents toutes les facultés pour l’accomplissement de leurs missions " ; qu’il résulte de l’instruction que lors de l’inspection réalisée le 18 novembre 1998 dans son officine, M. L. a tenté de dissimuler ou de détruire des éléments matériels susceptibles d’établir des manquements à ses obligations professionnelles ; qu’un tel comportement revêt par lui-même le caractère d’une faute de nature à justifier une sanction disciplinaire ;

Considérant qu’aux termes de l’article R. 5142-12 du code de la santé publique alors applicable : " Tout médicament qui n’est pas pourvu de l’autorisation de mise sur le marché mentionnée à l’article L. 601, ou de l’autorisation temporaire d’utilisation mentionnée au b de l’article L. 601-2 accordée pour des médicaments importés ou de l’enregistrement mentionné à l’article L. 601-3, doit, avant son importation dans le territoire douanier, faire l’objet d’une autorisation d’importation délivrée par le directeur général de l’Agence du médicament en application de l’article 17 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 (.) " ; qu’il résulte de l’instruction que M. L. détenait dans son officine des concentrés hydrophiles de plantes chinoises fabriqués en Belgique par le laboratoire Dynafit, dont il passait commande auprès de ce laboratoire et qu’il utilisait dans des préparations magistrales délivrées à sa clientèle ; que ces produits, présentés comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines, répondaient à la définition du médicament telle qu’elle résultait alors des dispositions de l’article L. 511 du code de la santé publique ; qu’il est constant qu’ils n’étaient pas pourvus d’une autorisation de mise sur le marché en France, ni d’ailleurs en Belgique, et que leur importation par M. L. n’avait pas fait l’objet de l’autorisation prévue par les dispositions précitées ; que l’importation, la détention et l’utilisation de ces produits a par suite revêtu le caractère d’une faute ;

Considérant enfin qu’il résulte de l’instruction qu’à de nombreuses reprises M. L. a omis de porter sur le registre alors prévu par l’article R. 5092 du code de la santé publique les mentions obligatoires en cas de délivrance de préparations magistrales ; qu’en particulier, pendant une longue période, aucune date de délivrance n’était indiquée ; que le nom et l’adresse du client ou le nom du prescripteur étaient fréquemment omis ; que le même manquement avait été relevé lors d’une précédente procédure disciplinaire ayant conduit à une première sanction prononcée le 5 janvier 1998 par le conseil régional de l’ordre des pharmaciens d’Ile-de-France ;

Considérant que les faits relevés ci-dessus ont présenté, en raison de leur gravité et, pour certains d’entre eux, de leur caractère habituel, le caractère de manquements à l’honneur professionnel et à la probité, exclus du bénéfice de la loi d’amnistie du 6 août 2002 ;

Considérant qu’il sera fait une juste appréciation de la gravité des fautes commises par M. L. dans l’exercice de ses activités professionnelles en lui infligeant la sanction de l’interdiction d’exercer la pharmacie pendant dix-huit mois dont neuf avec sursis ;

D E C I D E :

Article 1er : La décision du 29 juin 2004 du conseil national de l’ordre des pharmaciens et la décision du 11 septembre 2000 du conseil régional d’Ile-de-France de cet ordre professionnel sont annulées.

Article. 2 : La sanction de l’interdiction d’exercer la pharmacie pendant dix-huit mois dont neuf avec sursis est infligée à M. L.. Il appartiendra, le cas échéant, au conseil national de l’ordre des pharmaciens de fixer la période pendant laquelle elle s’exécutera.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Yves L. et au directeur régional des affaires sanitaires et sociales d’Ile-de-France.

Copie en sera adressée au conseil national de l’ordre des pharmaciens et au ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

 


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