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Conseil d’Etat, 19 mai 2004, n° 207391, M. S. V. T.

Le montant du préjudice dont le maître de l’ouvrage est fondé à demander réparation aux constructeurs en raison des désordres affectant l’immeuble qu’ils ont réalisé correspond aux frais qu’il doit engager pour les travaux de réfection. Ces frais comprennent, en règle générale, la taxe sur la valeur ajoutée, élément indissociable du coût des travaux, à moins que le maître de l’ouvrage ne relève d’un régime fiscal qui lui permet normalement de déduire tout ou partie de cette taxe de celle dont il est redevable à raison de ses propres opérations.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 207391

M. S. V. T.

Mlle Burguburu
Rapporteur

M. Goulard
Commissaire du gouvernement

Séance du 28 avril 2004
Lecture du 19 mai 2004

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 9ème et 10ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 9ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête, enregistrée le 30 avril 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour M. S. V. T. ; M. S. V. T. demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt du 25 mars 1999 de la cour administrative d’appel de Paris en tant qu’il a rejeté ses conclusions tendant à ce que l’indemnité qu’il a été condamné à verser à la Ville de Paris par le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 5 décembre 1995 soit réduite du montant de la taxe sur la valeur ajoutée ;

2°) de mettre à la charge de la Ville de Paris la somme de 20 000 F au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Burguburu, Auditeur,
- les observations de la SCP Boulloche, Boulloche, avocat de M. S. V. T., de Me Foussard, avocat de la Ville de Paris, de Me Odent, avocat de la société Fougerolle et de la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de la société Eychamps,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par l’arrêt attaqué, la cour administrative d’appel de Paris a confirmé le jugement en date du 5 décembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris a condamné conjointement et solidairement M. S. V. T., architecte, la société Fougerolle, titulaire du lot "gros œuvre" et mandataire commun des entreprises groupées conjointes, et la société Eychamps, titulaire du lot "carrelages, revêtements muraux", à indemniser, au titre de la garantie décennale, la Ville de Paris du préjudice résultant pour elle des désordres affectant le Centre sportif Riquet, situé rue Mathis à Paris, réalisé par ces constructeurs ; que M. S. V. T. se pourvoit contre cet arrêt en tant qu’il maintient à sa charge des indemnités incluant la taxe sur la valeur ajoutée ;

Sur la requête de M. S. V. T. :

Considérant que le montant du préjudice dont le maître de l’ouvrage est fondé à demander réparation aux constructeurs en raison des désordres affectant l’immeuble qu’ils ont réalisé correspond aux frais qu’il doit engager pour les travaux de réfection ; que ces frais comprennent, en règle générale, la taxe sur la valeur ajoutée, élément indissociable du coût des travaux, à moins que le maître de l’ouvrage ne relève d’un régime fiscal qui lui permet normalement de déduire tout ou partie de cette taxe de celle dont il est redevable à raison de ses propres opérations ;

Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article 256 B du code général des impôts : "Les personnes morales de droit public ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée pour l’activité de leurs services administratifs, sociaux, éducatifs, culturels et sportifs lorsque leur non-assujettissement n’entraîne pas de distorsions dans les conditions de la concurrence" ; qu’en jugeant qu’au vu de ces dispositions, et en l’absence de tout débat entre les parties au cours de l’instruction sur ce point, la Ville de Paris ne pouvait pas déduire la taxe sur la valeur ajoutée grevant les travaux de réfection de l’équipement sportif réalisé par les constructeurs et en déduisant que le montant de la taxe sur la valeur ajoutée devait être inclus dans le montant du préjudice indemnisable, la cour, qui n’avait pas à rechercher si la ville apportait la preuve de ce qu’elle n’était pas susceptible de déduire cette taxe, n’a pas commis d’erreur de droit ;

Sur les conclusions des pourvois provoqués de Me Cariven, liquidateur de la société Eychamps, et de la société Fougerolle :

Considérant que Me Cariven demande l’annulation de l’arrêt attaqué en ce qu’il a confirmé sa condamnation à indemniser la Ville de Paris conjointement et solidairement avec M. S. V. T. et la société Fougerolle ; que Me Cariven n’étant pas, non plus que la Ville de Paris, l’auteur du pourvoi, de telles conclusions constituent en réalité un pourvoi provoqué ;

Considérant que, dès lors que les conclusions de la requête de M. S. V. T. ne sont pas accueillies, Me Cariven et la société Fougerolle ne sont pas recevables à demander, par la voie du pourvoi provoqué, l’annulation de l’arrêt attaqué ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de la Ville de Paris, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, les sommes que demandent M. S. V. T. et la société Fougerolle au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de M. S. V. T. une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la Ville de Paris et non compris dans les dépens ;

Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de M. S. V. T. et de la société Eychamps la somme que demande la société Fougerolle au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. S. V. T. est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la voie du pourvoi provoqué, respectivement par Me Cariven et la société Fougerolle, sont rejetées.

Article 3 : M. S. V. T. versera à la Ville de Paris une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. S. V. T., à la Ville de Paris, à la société Fougerolle, à Me Cariven et au ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

 


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