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Conseil d’Etat, 3 mai 2004, n° 250730, Daniel M.

S’il appartient au juge de l’exécution, saisi sur le fondement des dispositions précitées, d’ordonner l’exécution de la chose jugée, il n’a pas le pouvoir de remettre en cause les mesures décidées par le dispositif de la décision juridictionnelle dont l’exécution est demandée.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 250730

M. M.

Mlle Courrèges
Rapporteur

M. Stahl
Commissaire du gouvernement

Séance du 5 avril 2004
Lecture du 3 mai 2004

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 1ère et 6ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 1ère sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 octobre 2002 et 26 mars 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Daniel M. ; M. M. demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt de la cour administrative d’appel de Douai en date du 4 juillet 2002 rejetant sa demande tendant, en exécution du jugement du tribunal administratif d’Amiens en date du 7 novembre 2000, au versement des intérêts au taux légal, dus sur le montant du rappel d’allocation spécifique de solidarité, par l’Agence nationale pour l’emploi ;

2°) d’enjoindre à l’Agence nationale pour l’emploi de lui payer les intérêts dus, soit 123, 98 euros, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision ;

3°) de mettre à la charge de l’Agence nationale pour l’emploi la somme de 2 000 euros à lui verser sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Courrèges, Auditeur,
- les observations de la SCP Ancel, Couturier-Heller, avocat de M. M.,
- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d’inexécution d’un jugement ou d’un arrêt définitif, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d’appel qui a rendu la décision d’en assurer l’exécution. Toutefois, en cas d’inexécution d’un jugement frappé d’appel, la demande d’exécution est adressée à la juridiction d’appel. Si le jugement ou l’arrêt dont l’exécution est demandée n’a pas défini les mesures d’exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d’exécution et prononcer une astreinte (.) " ;

Considérant que s’il appartient au juge de l’exécution, saisi sur le fondement des dispositions précitées, d’ordonner l’exécution de la chose jugée, il n’a pas le pouvoir de remettre en cause les mesures décidées par le dispositif de la décision juridictionnelle dont l’exécution est demandée ;

Considérant que, par son jugement en date du 7 novembre 2000, le tribunal administratif d’Amiens, après avoir annulé la décision de l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE) prononçant la radiation de M. M. de la liste des demandeurs d’emploi à compter du 15 novembre 1996 pour une durée de deux mois, a, par l’article 2 du jugement, enjoint à l’ANPE de " rétablir dans un délai de deux mois M. M. dans ses droits aux allocations à compter du 15 novembre 1996, avec intérêts au taux légal à compter du 18 avril 1997, date de l’enregistrement de sa requête au tribunal " ; que, saisie sur le fondement des dispositions précitées du code de justice administrative d’une requête tendant à l’exécution de l’article 2 du jugement mentionné ci-dessus, la cour administrative d’appel de Douai, après avoir relevé que l’ANPE avait, en exécution dudit jugement, procédé à la réinscription de M. M. sur la liste des demandeurs d’emploi et sollicité et obtenu de l’association pour l’emploi dans l’industrie et le commerce (ASSEDIC) de l’Oise et de la Somme qu’elle verse à l’intéressé le montant de l’allocation spécifique de solidarité qui lui était dû pour la période concernée, soit 4 154, 61 F (633, 37 euros), a jugé qu’il n’appartenait pas à l’ANPE de payer les intérêts au taux légal sur cette somme et, par voie de conséquence, a rejeté les conclusions de M. M. tendant à ce qu’elle enjoigne à l’agence de lui verser ces intérêts ; que ce faisant, la cour administrative d’appel, qui n’avait pas à se prononcer sur le bien-fondé de la chose jugée par le tribunal administratif, a entaché son arrêt d’une erreur de droit ; que cet arrêt doit, par suite, être annulé ;

Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu pour le Conseil d’Etat, en vertu de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l’affaire au fond ;

Considérant que, pour assurer l’entière exécution de l’article 2 du jugement du 7 novembre 2000, il y a lieu de condamner l’ANPE à verser à M. M. les intérêts dus sur le montant du rappel d’allocation spécifique de solidarité et évalués par le requérant au chiffre non contesté de 123, 98 euros ; que, toutefois, il n’y a pas lieu d’assortir cette injonction d’une astreinte ;

Considérant que les conclusions de M. M. fondées exclusivement sur les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, alors qu’il bénéficie de l’aide juridictionnelle, ne peuvent qu’être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Douai en date du 4 juillet 2002 est annulé.

Article 2 : L’Agence nationale pour l’emploi versera à M. M., en exécution du jugement du tribunal administratif d’Amiens en date du 7 novembre 2000, la somme de 123, 98 euros correspondant aux intérêts au taux légal dus sur le montant du rappel d’allocation spécifique de solidarité.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. M. est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Daniel M., à l’Agence nationale pour l’emploi et au ministre de l’emploi, du travail et de la cohésion sociale.

 


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