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Conseil d’Etat, 30 décembre 2003, n° 260429, Eurl Sochana

Lorsque le juge des référés est saisi, sur le fondement de ces dispositions, d’une demande d’expulsion d’un occupant du domaine public, il lui appartient de rechercher si, au jour où il statue, cette demande présente un caractère d’urgence et ne se heurte à aucune contestation sérieuse. S’agissant de cette dernière condition, dans le cas où la demande d’expulsion fait suite à la décision du gestionnaire du domaine de retirer ou de refuser de renouveler le titre dont bénéficiait l’occupant et où, alors que cette décision exécutoire n’est pas devenue définitive, l’occupant en conteste devant lui la validité, le juge des référés doit rechercher si, compte tenu tant de la nature que du bien-fondé des moyens ainsi soulevés à l’encontre de cette décision, la demande d’expulsion doit être regardée comme se heurtant à une contestation sérieuse.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 260429

E.U.R.L. SOCHANA

M. Salesse
Rapporteur

Mme Boissard
Commissaire du gouvernement

Séance du 10 décembre 2003
Lecture du 30 décembre 2003

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 10ème et 9ème sous-section réunies)

Sur le rapport de la 10ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 septembre et 6 octobre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour l’E.U.R.L. SOCIETE DE CHANTIER NAVAL (SOCHANA), dont le siège est Motu-Uta à Papeete (98735) ; l’E.U.R.L. SOCIETE DE CHANTIER NAVAL (SOCHANA) demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’ordonnance du 5 septembre 2003 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Papeete, saisi par le port autonome de Papeete sur le fondement de l’article L. 521-3 du code de justice administrative, lui a enjoint, sous astreinte de 50 000 F CFP, d’évacuer sans délai le lot 18 du domaine public du port autonome de Papeete dont elle était antérieurement affectataire ;

2°) statuant après cassation, de rejeter la demande présentée par le port autonome de Papeete tendant au prononcé de son expulsion ;

3°) de condamner le port autonome de Papeete au versement de la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du domaine de l’Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Salesse, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Le Prado, avocat de l’E.U.R.L. SOCIETE DE CHANTIER NAVAL (SOCHANA) et de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat du port autonome de Papeete,
- les conclusions de Mme Boissard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par l’ordonnance attaquée du 5 septembre 2003, le juge des référés du tribunal administratif de Papeete a enjoint l’E.U.R.L. SOCIETE DE CHANTIER NAVAL (SOCHANA) d’évacuer sans délai le lot 18 du domaine public du port autonome de Papeete ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 521-3 du code de justice administrative : "en cas d’urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l’absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l’exécution d’aucune décision administrative" ;

Considérant que lorsque le juge des référés est saisi, sur le fondement de ces dispositions, d’une demande d’expulsion d’un occupant du domaine public, il lui appartient de rechercher si, au jour où il statue, cette demande présente un caractère d’urgence et ne se heurte à aucune contestation sérieuse ; que, s’agissant de cette dernière condition, dans le cas où la demande d’expulsion fait suite à la décision du gestionnaire du domaine de retirer ou de refuser de renouveler le titre dont bénéficiait l’occupant et où, alors que cette décision exécutoire n’est pas devenue définitive, l’occupant en conteste devant lui la validité, le juge des référés doit rechercher si, compte tenu tant de la nature que du bien-fondé des moyens ainsi soulevés à l’encontre de cette décision, la demande d’expulsion doit être regardée comme se heurtant à une contestation sérieuse ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par convention en date du 1er décembre 1997, l’E.U.R.L. SOCIETE DE CHANTIER NAVAL (SOCHANA) a été autorisée à occuper un terrain de 1040 m², désigné lot 18, dépendant du domaine public du port autonome de Papeete ; que par décision en date du 29 janvier 2003, cette convention a été résiliée pour permettre l’exécution de travaux d’extension du quai de cabotage n° 5 et de construction du nouveau quai de réparations navales ; qu’en jugeant que la légalité de cette décision ne peut être utilement contestée devant le juge des référés saisi d’une demande d’expulsion et que cette décision a retiré à la société requérante tout titre d’occupation du domaine public portuaire et qu’ainsi, les conclusions aux fins d’expulsion ne se heurtent à aucune difficulté sérieuse, le juge des référés du tribunal administratif de Papeete a commis une erreur de droit ; que l’E.U.R.L. SOCIETE DE CHANTIER NAVAL (SOCHANA) est, par suite, fondée à demander l’annulation de l’ordonnance attaquée ;

Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de régler l’affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Considérant, d’une part, que si l’E.U.R.L. SOCIETE DE CHANTIER NAVAL (SOCHANA) se prévaut de la suspension de l’exécution de la décision du 29 janvier 2003 par le juge des référés du tribunal administratif de Papeete, celle-ci a, en tout état de cause, pris fin à la date de la présente décision ; que le moyen tiré de l’incompétence du directeur du port autonome pour prendre une décision de résiliation d’une convention d’occupation ne peut être regardé, en l’état de l’instruction, comme soulevant, dans les circonstances de l’espèce, une contestation sérieuse de la mesure d’expulsion demandée par le port autonome de Papeete ;

Considérant, d’autre part, que le maintien dans les lieux de l’E.U.R.L. SOCIETE DE CHANTIER NAVAL (SOCHANA) fait obstacle au commencement des travaux d’extension du quai de cabotage n° 5 et de construction du nouveau quai de réparations navales à partir du 1er août 2003, lesquels travaux répondent à un motif d’intérêt général ; qu’il y a, par suite, urgence et utilité à libérer l’emplacement en cause ;

Considérant que le port autonome de Papeete est dès lors fondé à demander l’expulsion de l’E.U.R.L. SOCIETE DE CHANTIER NAVAL (SOCHANA), au besoin sous astreinte ; que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de fixer cette astreinte à 419 euros par jour à compter de l’expiration d’un délai de huit jours suivant la date de notification de la présente décision ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le port autonome de Papeete, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à l’E.U.R.L. SOCIETE DE CHANTIER NAVAL (SOCHANA) la somme qu’elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu en revanche de condamner l’E.U.R.L. SOCIETE DE CHANTIER NAVAL (SOCHANA) à payer au port autonome de Papeete une somme de 2 500 euros sur le fondement des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : L’ordonnance du 5 septembre 2003 du juge des référés du tribunal administratif de Papeete est annulée.

Article 2 : Il est enjoint à l’E.U.R.L. SOCIETE DE CHANTIER NAVAL (SOCHANA) d’évacuer sans délai le lot 18 du domaine portuaire du port autonome de Papeete occupé sans droit ni titre sous astreinte de 419 euros par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de huit jours à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : L’E.U.R.L. SOCIETE DE CHANTIER NAVAL (SOCHANA) paiera au port autonome de Papeete une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de l’E.U.R.L. SOCIETE DE CHANTIER NAVAL (SOCHANA) tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à l’E.U.R.L. SOCIETE DE CHANTIER NAVAL (SOCHANA), au port autonome de Papeete et au ministre de l’outre-mer.

 


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