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Cour administrative d’appel de Douai, 30 septembre 2003, n° 02DA00281, Société Grill Motel et Société Restaurant Grill Motel

Eu égard à l’environnement déjà particulièrement bruyant de l’ensemble hôtelier des requérantes, la mise en service de la ligne du TGV Nord n’a pas eu pour effet d’augmenter significativement les nuisances sonores subies par la clientèle de l’établissement. Dans ces conditions, c’est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la présence de la ligne du TGV Nord n’est pas de nature à occasionner pour les requérantes un préjudice anormal et spécial susceptible d’ouvrir droit à indemnisation.

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE DOUAI

N° 02DA00281

Société Grill Motel
Société Restaurant Grill Motel

M. Gipoulon
Président Rapporteur

M. Paganel
Commissaire du Gouvernement

Audience du 16 septembre 2003
Lecture du 30 septembre 2003

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE DOUAI

2ème chambre

Vu la requête, enregistrée le 27 mars 2002 au greffe de la cour administrative d’appel de Douai, présentée pour la société à responsabilité limitée Grill Motel, dont le siège est situé

8, rue Chateaubriand à Bréhan Loudéac (56580), et pour la société à responsabilité limitée Restaurant Grill Motel, dont le siège social est situé 50, route Nationale à Fresnes-les-Montauban (62490), représentées par leur gérant en exercice, par Me Jacques Dutat, avocat, membre de la société d’avocats Dutat - Lefèvre et associés ; les sociétés Grill Motel et Restaurant Grill Motel demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 9704293 du 31 décembre 2001 du tribunal administratif de Lille en tant qu’il a seulement condamné la SNCF à payer à la société Restaurant Grill Motel une somme de 228 571 francs assortie des intérêts à compter du 24 décembre 1997 en réparation du préjudice subi par elle à raison des travaux d’implantation de la ligne TGV Nord à proximité de l’établissement hôtelier qu’elle exploite à Fresnes-les-Montauban et qu’il a mis à sa charge ainsi qu’à celle de la société Grill Motel une partie des frais d’expertise ;

2°) de condamner la SNCF (Société Nationale des Chemins de Fer Français) à verser à la société Restaurant Grill Motel une somme de 335 388,60 euros au titre de ses pertes d’exploitation ;

3°) de condamner la SNCF à verser à la société Grill Motel une somme de 142 722,68 euros au titre des travaux d’insonorisation réalisés dans la salle de restaurant et les salles de réunion et une indemnité provisionnelle de 100 000 euros à valoir sur le coût des travaux d’insonorisation entrepris et à entreprendre dans les chambres et les couloirs les desservant ;

4°) de condamner la SNCF à verser à toutes deux une somme de 12 665,89 euros au titre des mesures conservatoires qu’elles ont du prendre pour sauvegarder leurs droits, mieux appréhender leurs préjudices et en limiter l’ampleur, l’ensemble de ces sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 1997, lesdits intérêts échus au 27 mars 2002 étant capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts ;

5°) de condamner la SNCF à prendre en charge l’ensemble des frais d’expertise ainsi qu’à verser, à chacune des requérantes, une somme de 20 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

6°) de désigner un expert avec mission de prendre connaissance des travaux d’insonorisation et connexes réalisés dans les chambres et couloirs de l’hôtel et de chiffrer le montant moyen de la dépense engagée ou qui devra être engagée par chambre à l’occasion de ces travaux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience,

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 16 septembre 2003
- le rapport de M. Gipoulon, président-rapporteur,
- les observations de Me Masson, avocat, pour les sociétés Grill Motel et Restaurant Grill Motel et de Me Lausin, avocat, pour la société nationale des chemins de fer français,
- et les conclusions de M.Paganel, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les sociétés Grill Motel et Restaurant Grill Motel forment appel du jugement susvisé du tribunal administratif de Lille en date du 31 décembre 2001 en tant, d’une part, qu’il n’a que partiellement fait droit aux conclusions de leur demande tendant à la réparation du préjudice subi par elles à raison des travaux d’implantation de la ligne TGV Nord à proximité de l’établissement hôtelier, dont elles sont respectivement propriétaire et exploitante, situé à Fresnes-les-Montauban, d’autre part, qu’il a rejeté les conclusions de leur demande tendant à la réparation des préjudices subis par elles à raison de l’exploitation de ladite ligne et, enfin, qu’il a mis à leur charge une partie des frais d’expertise ;

Sur l’engagement de la responsabilité de la SNCF à raison de l’existence de l’ouvrage public :

Considérant qu’il ressort des rapports d’expertise qu’eu égard à l’environnement déjà particulièrement bruyant de l’ensemble hôtelier des requérantes, la mise en service de la ligne du TGV Nord n’a pas eu pour effet d’augmenter significativement les nuisances sonores subies par la clientèle de l’établissement ; que, dans ces conditions, c’est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la présence de la ligne du TGV Nord n’est pas de nature à occasionner pour les requérantes un préjudice anormal et spécial susceptible d’ouvrir droit à indemnisation ; que, par suite, les conclusions de la société Grill Motel tendant à la réparation du préjudice lié à l’existence dudit ouvrage public et à ce qu’une expertise complémentaire soit diligentée ne peuvent qu’être rejetées ;

Sur l’évaluation du préjudice lié à l’exécution des travaux d’implantation de l’ouvrage public :

Considérant qu’il ne ressort pas des opérations d’expertise qu’une exacte corrélation puisse être mise en évidence entre la période durant laquelle la société Restaurant Grill Motel a effectivement subi des pertes d’exploitation liées aux travaux d’implantation de la ligne du TGV Nord et les deux périodes s’étendant de mai à novembre 1990 et d’août 1991 à janvier 1992 durant lesquelles lesdits travaux se sont concrètement révélés les plus perturbants pour la clientèle ; qu’au contraire, la baisse d’activité de l’établissement s’est poursuivie après la fin de la première période de gêne et une reprise n’a pu être observée qu’au terme de la deuxième période perturbante ; que, dans ces conditions, les sociétés requérantes sont fondées à soutenir que c’est à tort que, les premiers juges ont, en suivant le raisonnement de l’expert comptable qui a diminué le préjudice constaté sur le plan comptable en conséquence des constatations techniques sus-évoquées, évalué le préjudice d’exploitation lié à l’exécution des travaux à la somme de 228 571 francs (34 845,42 euros ) ; qu’il y a donc lieu, ainsi qu’elles le demandent, de porter cette somme que la SNCF a été condamnée à payer, par le jugement attaqué, à la société Restaurant Grill Motel à la somme de 56 406,90 euros (370 005,01 francs ) correspondant au préjudice constaté par l’expert sur le plan comptable et de réformer, dans cette mesure, ledit jugement ;

Sur les conclusions d’appel en garantie présentées par la SNCF :

Considérant qu’au soutien de ses conclusions d’appel en garantie dirigées contre l’Etat, qui n’est pas le maître de l’ouvrage public en cause, la SNCF n’allègue aucune faute ; que, dès lors, lesdites conclusions ne peuvent qu’être rejetées ;

Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :

Considérant que la société Restaurant Grill Motel a droit, ainsi qu’elle le demande, aux intérêts sur la somme de 56 406,90 euros à compter du 24 décembre 1997 ; qu’elle a demandé la capitalisation desdits intérêts le 27 mars 2002 ; qu’à cette date, il était dû au moins une année d’intérêts ; que, par suite, conformément aux principes dont s’inspire l’article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande tant à cette date qu’à chacune des échéances annuelles à compter de cette date ;

Sur les frais d’expertise :

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que c’est à bon droit que les premiers juges ont laissé à la charge des sociétés requérantes une somme globale de 149 421,02 francs correspondant aux frais des opérations d’expertise conduites par MM. Vermesse, Veauvy et Bosschaert et mis à la charge de la SNCF une somme globale de 51 433,50 francs correspondant aux frais des opérations d’expertise conduites par MM. Vincent et Neveux ;

Sur les frais exposés par les sociétés requérantes pour sauvegarder leurs droits :

Considérant que si les sociétés requérantes demandent le remboursement par la SNCF desdits frais, elles n’établissent pas le lien qui existerait entre ceux-ci et les dommages effectivement subis, liés aux seuls travaux d’implantation de l’ouvrage public ; que, par suite, lesdites conclusions ne peuvent qu’être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que l’article L. 761-1 du code de justice administrative dispose que : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. " ;

Considérant qu’en vertu des dispositions précitées, la Cour ne peut pas faire bénéficier une partie perdante du paiement par une autre partie des frais qu’elle a exposés à l’occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la société Grill Motel ne peuvent, dès lors, qu’être rejetées ;

Considérant, en revanche, qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner la SNCF à verser à la société Restaurant Grill Motel une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La somme de 34 845,42 euros que la SNCF a été condamnée à verser à la société Restaurant Grill Motel par le jugement attaqué est portée à la somme de 56 406,90 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 1997. Les intérêts échus au 27 mars 2002 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2 : Le jugement en date du 31 décembre 2001 du tribunal administratif de Lille est réformé en ce qu’il a de contraire à la présente décision.

Article 3 : La SNCF versera à la société Restaurant Grill Motel une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête des sociétés Grill Motel et Restaurant Grill Motel et les conclusions de la SNCF sont rejetés.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Grill Motel, à la société Restaurant Grill Motel, à la SNCF, ainsi qu’au ministre de l’équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

Copie sera transmise au préfet de la région Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord.

 


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