CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
N° 205131
MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE
c/ SA Rennesson
M. Bereyziat
Rapporteur
M. Bachelier
Commissaire du gouvernement
Séance du 27 novembre 2002
Lecture du 30 décembre 2002
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 3ème et 8ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 3ème sous-section de la Section du contentieux
Vu le recours, enregistré le 26 février 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE ; le ministre demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt du 17 décembre 1998 par lequel la cour administrative d’appel de Nancy a, d’une part, annulé le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 24 mai 1994 rejetant la demande en décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels la SA Rennesson a été assujettie au titre de la période du 1er avril 1986 au 31 mai 1990 et, d’autre part, accordé la décharge de ces impositions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de M. Bereyziat, Auditeur,
les observations de Me Spinosi, avocat de la SA Rennesson,
les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu’au cours de la période du 1er avril 1986 au 31 mai 1990, la SA Rennesson, concessionnaire de la marque Opel, a bénéficié de la part de la société General Motors France de "primes d’objectifs" accordées sous forme d’avoirs venant en déduction du prix des véhicules acquis par elle auprès de cette société, calculées en fonction des immatriculations de véhicules de la marque vendus au-delà des objectifs fixés par le fournisseur ; que l’administration a considéré que ces avoirs liés à l’effort de pénétration de la marque dans la zone géographique couverte par le concessionnaire étaient la rémunération, soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, d’une prestation de services rendu au fournisseur et a procédé à un rappel de taxe pour un montant de 44 006 F assorti des intérêts de retard ; que, sur appel de la société, la cour a accordé la décharge des impositions litigieuses ;
Considérant qu’aux termes des dispositions alors applicables du I de l’article 256 du code général des impôts : "Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel" ; qu’aux termes du 1 de l’article 266 du même code, la base d’imposition de la taxe sur la valeur ajoutée est constituée : "a) pour les livraisons de biens et les prestations de services, par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de la livraison ou de la prestation..." ;
Considérant, d’une part, que, pour juger que les "primes" litigieuses ne rémunéraient pas une prestation de services rendus par le concessionnaire et soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, la cour n’a pas retenu comme critère déterminant les modalités de leur versement ; qu’ainsi elle n’a pas commis l’erreur de droit invoquée par le ministre ;
Considérant, d’autre part, qu’en relevant qu’il n’était pas contesté que le concessionnaire réalisait pour son propre compte et à ses propres risques les ventes de véhicules de la marque dans la zone géographique couverte par la concession et qu’il ne rendait à son fournisseur aucune prestation particulière, puis en déduisant de ces constatations souveraines qu’alors même que le montant des primes attribuées au concessionnaire était calculé en fonction du nombre d’immatriculations constaté en excédent de seuils fixés par le fournisseur, lesdites primes n’étaient la contrepartie d’aucune prestation de services rendus par le concessionnaire et n’étaient, par suite, pas imposables, la cour n’a pas commis d’erreur de droit ; qu’il suit de là que le ministre n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ;
D E C I D E :
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE et à la SA Rennesson.