CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
N° 228436
Mlle D.
M. Herondart
Rapporteur
Mme Mitjavile
Commissaire du gouvernement
Séance du 11 septembre 2002
Lecture du 2 octobre 2002
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 10ème et 9ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 10ème sous-section de la Section du contentieux
Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés le 22 décembre 2000 et le 20 avril 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour Mlle Nicole D. ; Mlle D. demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt en date du 17 octobre 2000 par lequel la cour administrative d’appel de Paris a annulé partiellement le jugement du tribunal administratif de Paris du 1er juillet 1996 la déchargeant des cotisations supplémentaires à l’impôt sur le revenu auxquelles a été assujettie en droit et pénalités au titre de l’année 1984 et à remis à sa charge lesdites impositions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de M. Herondart, Auditeur,
les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de Mlle D. ,
les conclusions de Mme Mitjavile, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mlle D. a fait l’objet, en 1987, d’une vérification approfondie de sa situation fiscale d’ensemble à l’issue de laquelle l’administration l’a taxée d’office, au titre de l’année 1984, sur des revenus d’origine indéterminée, en application des article L. 16 et L.65 du livre des procédures fiscales ; que Mlle D. a tenté de justifier les sommes taxées comme des revenus d’origine indéterminée par la cession entre avril 1983 et avril 1984 de pièces d’or héritées à la suite du décès de son père en avril 1969 et dont l’origine aurait été reconnue par un procès-verbal du service des douanes établi le 12 avril 1984 ; que Mlle D. se pourvoit en cassation contre l’arrêt en date du 17 octobre 2000 par lequel la cour administrative d’appel de Paris a annulé partiellement le jugement du tribunal administratif de Paris du 1er juillet 1996 la déchargeant des cotisations supplémentaires à l’impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre de l’année 1984 et a remis a sa charge lesdites cotisations ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 47 du livre des procédures fiscale dans sa rédaction applicable aux faits de l’espèce : "Une vérification approfondie de la situation fiscale d’ensemble d’une personne physique au regard de l’impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l’envoi ou la remise d’un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix" ; que pour apprécier si le délai s’écoulant entre la réception de l’avis et le début de la vérification fiscale est suffisant pour permettre au contribuable de se faire assister par le conseil de son choix, il y a lieu de ne tenir compte, dans la computation de ce délai, ni du jour de la réception de l’avis, ni de celui marquant le décret de opérations de contrôle fiscal ; qu’il y a lieu également d’inclure les samedis, dimanches et jour fériés ;
Considérant, en premier lieu, que Mlle D. , qui a reçu le jeudi 14 mai 1987 l’avis de vérification fiscale exigé par les dispositions législatives précitées, avait bénéficié, dès lors que les opérations de contrôle fiscal n’ont débuté que le mardi 19 mai, d’un délai de deux jours utiles pour se faire assister par un conseil de son choix, la cour administrative d’appel de Paris n’a pas commis d’erreur de droit dans l’application des règles, mentionnées plu haut, de computation de ce délai ;
Considérant, en deuxième lieu, qu’en estimant que le délai de deux jour même non consécutifs, dont bénéficie, en l’espèce, Mlle D. , avait été suffisant pour permettre à l’intéressée de se faire assister par un conseil de son choix, la cour s’est livrée à un appréciation souveraine des faits qui, en l’absence de dénaturation, n’est pas susceptible d’être discutée devant le juge de cassation ;
Considérant qu’aux termes de l’article 35-II de la loi du 29 décembre 1989 "En cas de ... vérification approfondie de situation fiscale d’ensemble mentionnée à l’article E de la loi de finances pour 1976, la demande au contribuable des relevés de compte dans l’avis c vérification ou simultanément à l’envoi ou à la remise de cet avis, ainsi que l’envoi ou la remis de toute demande de renseignement en même temps que cet avis sont sans influence sur la régularité de ces procédures lorsque celles-ci ont été engagées avant la date d’entrée en vigueur de la présente loi" ;
Considérant qu’en estimant que la demande adressée par l’administration à Mlle D. le 4 mai 1987 et reçue par elle le 14 mai 1987 était une demande d’information tendant à obtenir la communication de différents documents et renseignements d’ordre bancaire et financier, au sens des dispositions précitées de l’article 35-II de la loi du 29 décembre 1989, la cour administrative d’appel n’a pas dénaturé les faits qui lui étaient soumis ; que la cour a pu légalement déduire de ces faits que l’envoi simultané de cette demande et de l’avis de vérification fiscale était, dès lors que la procédure avait été engagée à l’égard de Mlle D. avant l’entrée en vigueur de la loi du 29 décembre 1989, sans influence sur la régularité de cette procédure ;
Considérant que la cour administrative d’appel de Paris a relevé, sans mentionner le rapport d’enquête douanière du 12 avril 1984, que la déclaration de succession du père de Mlle D. ne faisait pas mention de l’important stock de pièces d’or dont la présence a été constatée dans le coffre bancaire dont disposait la requérante, non plus des pièces d’or qui auraient été vendues par celle-ci au cours de l’année 1983 et que l’intéressée n’établissait pas avoir effectué d’autres ventes d’or que celle admise par l’administration et avoir conservé au premier janvier de l’année d’imposition la disposition des sommes obtenues à la suite des ventes d’or effectuées en 1983 dont le produit global net était, en tout état de cause, très inférieur au montant des revenus d’origine indéterminée ; qu’en déduisant de ces éléments que Mlle D. ne justifiait pas de l’origine des sommes regardées par l’administration comme des revenus d’origine indéterminée taxables, la cour a suffisamment motivé son arrêt, n’a pas dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis et n’a pas commis d’erreur de droit ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que Mlle D. n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 17 octobre 2000 ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mlle D. est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mlle Nicole D. et au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.