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Conseil d’Etat, 29 juillet 2002, n° 243686, Ville de Nice c/ SARL Loisirs et Innovations

Dans le cas où les conclusions présentées au juge administratif peuvent relever aussi bien de la compétence que le président du tribunal administratif tient de l’article L. 551-1 du code de justice administrative que de celle que l’article L. 521-1 du même code confère au juge des référés, s’agissant de la suspension d’un acte administratif, détachable du contrat, susceptible d’être déféré au juge de l’excès de pouvoir, il appartient au requérant, dès lors que ces deux demandes sont présentées, instruites et jugées selon des procédures distinctes, de préciser celle des deux procédures qu’il entend mettre en oeuvre, sans pouvoir les présenter simultanément dans une même requête.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 243686

VILLE DE NICE
c/ S.A.R.L. Loisirs et Innovations

M. Bouchez, Rapporteur
M. Piveteau, Commissaire du gouvernement

Séance du 5 juillet 2002
Lecture du 29 juillet 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 7ème et 5ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 7ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er mars 2002 et 18 mars 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la VILLE DE NICE, représentée par son maire en exercice domicilié en cette-qualité Hôtel de Ville à Nice cedex (06074) ; la VILLE DE NICE demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’ordonnance du 12 février 2002 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nice a, à la demande de la S.A.R.L. Loisirs et Innovations, suspendu la décision du 26 décembre 2001 de la commission d’appel d’offres de la ville requérante écartant la candidature de la société à la passation d’un marché portant sur la conception, l’organisation et l’animation d’une foire d’art contemporain à Nice pour les années 2002, 2003 et 2004 et a enjoint à la commission d’appel d’offres d’examiner l’offre présentée par la S.A.R.L. Loisirs et Innovations ;

2°) de rejeter la demande de la S.A.R.L. Loisirs et Innovations,

3°) de condamner la S.A.R.L. Loisirs et Innovations à lui verser une somme de 1 300 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publies ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bouchez, Conseiller d’Etat,
- les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de la VILLE DE NICE et de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la S.A.R.L. Loisirs Innovations,
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;

Considérant, d’une part, qu’aux termes du premier alinéa de l’article L. 521-1 du code de justice administrative : "Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision" ; que, d’autre part, aux termes de l’article L. 551-1 du même code : "Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu’il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des marchés publics et des conventions de délégation de service public. / Les personnes habilitées à agir sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d’être lésées par ce manquement (...) Le président du tribunal administratif peut être saisi avant la conclusion du contrat. Il peut ordonner à l’auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre la passation du contrat ou l’exécution de toute décision qui s’y rapporte. Il peut également annuler ces décisions et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations. Dès qu’il est saisi, il peut enjoindre de différer la signature du contrat jusqu’au terme de la procédure et pour une durée maximum de vingt jours [...] Le président du tribunal administratif ou son délégué statue en premier et dernier ressort en la forme des référés" ;

Considérant que, dans le cas où les conclusions présentées au juge administratif peuvent relever aussi bien de la compétence que le président du tribunal administratif tient de l’article L. 551-1 du code de justice administrative que de celle que l’article L. 521-1 du même code confère au juge des référés, s’agissant de la suspension d’un acte administratif, détachable du contrat, susceptible d’être déféré au juge de l’excès de pouvoir, il appartient au requérant, dès lors que ces deux demandes sont présentées, instruites et jugées selon des procédures distinctes, de préciser celle des deux procédures qu’il entend mettre en oeuvre, sans pouvoir les présenter simultanément dans une même requête ;

Considérant qu’à la demande de la S.A.R.L. Loisirs et Innovations, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, d’une part, suspendu l’exécution de la décision du 26 décembre 2001 par laquelle la commission d’appel d’offres de la VILLE DE NICE n’a pas admis la candidature de cette société à l’appel d’offres sur performances lancé le 8 novembre 2001 en vue de la passation d’un marché relatif à la conception, à l’organisation et à l’animation d’une foire d’art contemporain, et, d’autre part, enjoint à cette commission d’examiner l’offre présentée par la S.A.R.L. Loisirs et Innovations ;

Considérant que contrairement à ce que soutient la VILLE DE NICE, le juge des référés du tribunal administratif n’a pas dénaturé les conclusions présentées par la S.A.R.L. Loisirs et Innovations en les analysant comme une demande de suspension de la décision du 26 décembre 2001, sondée sur les dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, qu’en admettant la recevabilité de ces conclusions, tendant à la suspension d’un acte administratif détachable du contrat, le juge n’a pas commis d’erreur de droit ;

Considérant, en revanche, qu’aux termes du 1er alinéa de l’article 52 du code des marchés publics : "Les candidatures (...) qui ne sont pas accompagnées des pièces mentionnées aux articles 45 et 46 ou qui ne présentent pas des garanties techniques et financières suffisantes ne sont pas admises" ; qu’aux termes de l’article 45 de ce même code : "A l’appui des candidatures, il ne peut être exigé que : / 1° Des renseignements permettant d’évaluer les capacités professionnelles, techniques et financières du candidat (...)" ; qu’aux termes du II de l’article 62 : "La commission d’appel d’offres examine les candidatures. Au vu de cet examen, la personne responsable du marché sur proposition de la commission d’appel d’offres pour l’Etat, ou la commission d’appel d’offres pour les collectivités territoriales, dresse, en application des deux premiers alinéas de l’article 52, la liste des candidats autorisés à présenter une offre" ;

Considérant qu’il résulte des dispositions précitées des articles 52 et 62 du code des marchés publics, applicables à la procédure de passation du marché en cause, que la commission d’appel d’offres est tenue de refuser d’admettre les candidatures qui ne sont pas accompagnées des pièces exigées par le règlement de la consultation dans le respect des dispositions des articles 45 et 46 de ce code ; qu’en estimant que la circonstance que la candidature de la S.A.R.L. Loisirs et Innovations ne comportait pas certaines de ces pièces exigées par l’article 8.1 du règlement de consultation applicable ne pouvait justifier à elle seule son rejet par la commission d’appel d’offres de la VILLE DE NICE, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a commis une erreur de droit ; qu’il en résulte, sans qu’il soit besoin d’examiner sur les autres moyens soulevés par la VILLE DE NICE, que celle-ci est fondée à demander l’annulation de l’ordonnance attaquée ;

Considérant qu’aux termes de l’article L.821-2 du code de justice administrative, le Conseil d’Etat, s’il prononce l’annulation d’une décision d’une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l’affaire au fond si l’intérêt d’une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de régler l’affaire au fond au titre de la procédure de référé engagée ;

Considérant qu’il n’est pas contesté que le dossier présenté par la société Loisirs et Innovations à l’appui de sa candidature ne comportait pas certains renseignements exigés par le règlement de la consultation en application de l’article 45 précité du code des marchés publics, notamment son chiffre d’affaires pour l’année 2000 ; qu’ainsi qu’il a été dit précédemment, il résulte des dispositions précitées des articles 52 et 62 de ce même code que la commission d’appel d’offres de la VILLE DE NICE était tenue, pour ce motif, de refuser d’admettre la candidature de la société requérante ; qu’aucun des autres moyens soulevés par celle-ci n’est propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision du 26 décembre 2001 ; qu’il en résulte que la S.A.R.L. Loisirs et Innovations n’est pas fondée à demander la suspension de l’exécution de cette décision ni, par voie de conséquence, qu’il soit enjoint à la commission d’appel d’offres d’examiner son offre ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative et de condamner la S.A.R.L. Loisirs et Innovations à payer à la VILLE DE NICE la somme qu’elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle à ce que la VILLE DE NICE, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à la S.A.R.L. Loisirs et Innovations la somme qu’elle demande à ce titre ;

D E C I D E :

Article 1er : L’ordonnance du 12 février 2002 du juge des référés du tribunal administratif de Nice est annulée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la S.A.R.L. Loisirs et Innovations devant le tribunal administratif de Nice et les conclusions qu’elle a présentées devant le Conseil d’Etat tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de la VILLE DE NICE tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la VILLE DE NICE, à la S.A.R.L Loisirs et Innovations et au ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

 


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