COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE NANTES
N° 00NT01064
S.A.R.L. Alpha Micro
M. LEMAI
Président de chambre
M. MARTIN
Rapporteur
M. LALAUZE
Commissaire du gouvernement
Séance du 21 janvier 2004
Lecture du 18 février 2004
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE NANTES
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 juin 2000, présentée pour la S.A.R.L. Alpha Micro, qui a son siège 9, place de la République à Blois (41000), par Me KARLESKIND, avocat au barreau de Blois ;
La société Alpha Micro demande à la Cour :
1°) d’annuler le jugement n° 97-116 du Tribunal administratif d’Orléans en date du 11 avril 2000 qui a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations d’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 décembre 1991 et 1992 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
3°) de condamner l’Etat à lui verser une somme de 6 200 F en application des dispositions de l’article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel et en outre une somme de 200 F pour les frais de timbre ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 21 janvier 2004 :
le rapport de M. MARTIN, premier conseiller,
et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’aux termes de l’article 44 sexies du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur : "I. Les entreprises créées à compter du 1er octobre 1988 soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d’imposition de leurs résultats et qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l’article 34 sont exonérées d’impôt sur le revenu ou d’impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés jusqu’au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création et déclarés selon les modalités prévues à l’article 53 A. Les bénéfices ne sont soumis à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés que pour le quart, la moitié ou les trois quarts de leur montant selon qu’ils sont réalisés respectivement au cours de la première, de la seconde ou de la troisième période de douze mois suivant cette période d’exonération. Ces dispositions ne s’appliquent pas aux entreprises qui exercent une activité bancaire, financière, d’assurances, de gestion ou de location d’immeubles" ;
Considérant qu’il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires auxquels elles ont donné lieu, que le législateur a entendu réserver le régime prévu par le nouvel article 44 sexies aux entreprises nouvelles dont l’activité est de nature industrielle, commerciale ou artisanale, à l’exception, toutefois, de celles qui exercent une activité bancaire, financière, d’assurances, de gestion ou de location d’immeubles, et en exclure les entreprises nouvelles dont les bénéfices proviennent, en tout ou partie, d’activités d’une autre nature, du moins lorsque ces activités ne constituent pas le complément indissociable d’une activité exonérée ;
Considérant qu’il résulte de l’instruction qu’au cours des exercices clos en 1991 et 1992 la S.A.R.L. Alpha Micro constituée le 24 novembre 1990 a réalisé une partie prépondérante de son chiffre d’affaires à travers son activité d’achat revente de matériel informatique et de logiciels exercée principalement en direction des tribunaux d’instance ; qu’il n’est pas contesté que les prestations de services consistant en des actions de mise en place et de maintenance du matériel ainsi que de formation des utilisateurs, que la société a assurées de façon annexe, ont constitué un complément indissociable de son activité d’achat revente ; qu’elle a en outre commercialisé deux logiciels destinés à l’informatisation des greffes des tribunaux d’instance mis gratuitement à sa disposition par son gérant, M. DEBOURGE, par une convention, établie le 28 décembre 1990, autorisant la société à les exploiter commercialement ; que si plusieurs autres logiciels, se rapportant également à la gestion des tribunaux, ont été commercialisés par la société, il n’est pas établi que cette dernière ait pris part à leur conception autrement qu’en ayant recours à un intervenant extérieur, M. LACROUTE, dont elle s’est attachée les services d’avril 1991 à juin 1993, de telle sorte qu’elle puisse être regardée comme co-auteur desdits logiciels ; qu’ainsi, c’est à tort que l’administration a refusé à la société requérante le bénéfice du régime prévu à l’article 44 sexies précité du code général des impôts au titre des exercices clos en 1991 et 1992 au motif que ses activités étaient en partie non commerciales ; que, dès lors, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, la société Alpha Micro est fondée à demander la décharge des impositions litigieuses ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la société Alpha Micro est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, le Tribunal administratif d’Orléans a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions de la société Alpha Micro tendant à l’application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, en application de ces dispositions, de condamner l’Etat à payer à la société Alpha Micro une somme de 900 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif d’Orléans en date du 11 avril 2000 est annulé.
Article 2 : Il est accordé à la société Alpha Micro la décharge des cotisations d’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1991 et 1992 à raison de la remise en cause du régime d’exonération prévu par les dispositions de l’article 44 sexies du code général des impôts.
Article 3 : L’Etat versera à la société Alpha Micro une somme de 900 euros (neuf cents euros) au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative.