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Conseil d’Etat, 11 juin 2003, n° 247736, M. Christian F. et Société Laboratoire Fenioux Pharm

Les dispositions de l’article L. 5312-2 du code de la santé publique habilitent le directeur général de l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé à prononcer une suspension à l’encontre des produits ne respectant pas la législation ou la réglementation qui leur sont applicables. Au titre de la législation et de la réglementation applicables aux médicaments figurent notamment les règles relatives à leurs conditions de fabrication et de distribution. Ainsi, le directeur général de l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé pouvait légalement fonder sa décision de suspension sur la non-conformité des conditions de fabrication et de distribution des produits concernés au regard des bonnes pratiques fixées en vertu de l’article L. 5121-5 du code de la santé publique par voie réglementaire.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 247736

M. F.
SOCIETE " LABORATOIRE FENIOUX PHARM "

M. Boulouis
Rapporteur

M. Stahl
Commissaire du gouvernement

Séance du 19 mai 2003
Lecture du 11 juin 2003

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 1ère et 2ème sous-section réunies)

Sur le rapport de la 1ère sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête, enregistrée le 10 juin 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour M. Christian F. et pour la SOCIETE " LABORATOIRE FENIOUX PHARM ", dont le siège est à la même adresse, représentée par son représentant légal en exercice ; M. F. et la SOCIETE " LABORATOIRE FENIOUX PHARM " demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler la décision du 16 mai 2002 par laquelle le directeur général de l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) a prononcé la suspension, notamment, de la fabrication, de l’exportation et de la distribution de quinze produits fabriqués par la SOCIETE " LABORATOIRE FENIOUX PHARM " et commercialisés par M. F. jusqu’à leur mise en conformité avec la législation ;

2°) de condamner l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé à leur verser la somme de 7 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive n° 2002/46/CE du 10 juin 2002 ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Boulouis, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Tiffreau, avocat de M. F. et de la Société " LABORATOIRE FENIOUX PHARM ",
- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 5312-2 du code de la santé publique : " Sans préjudice des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsqu’un produit ou groupe de produits mentionné à l’article L. 5311-1 est mis sur le marché, mis en service ou utilisé sans avoir obtenu l’autorisation, l’enregistrement ou la certification préalable exigé par les dispositions législatives ou réglementaires applicables à ce produit ou groupe de produits, l’agence peut suspendre, jusqu’à la mise en conformité du produit ou groupe de produits au regard de la législation et de la réglementation en vigueur, les essais, la fabrication, la préparation, l’importation, l’exploitation, l’exportation, la distribution en gros, le conditionnement, la conservation, la mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux, la détention en vue de la vente ou de la distribution à titre gratuit, la publicité, la mise en service, l’utilisation, la prescription, la délivrance ou l’administration de ce produit ou groupe de produits./ Sauf en cas d’urgence, la personne physique ou morale concernée doit être mise à même de présenter ses observations avant l’intervention de ces mesures de suspension " ; que, sur le fondement de ces dispositions, le directeur général de l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a, le 16 mai 2002, suspendu notamment, jusqu’à mise en conformité des produits avec la législation et la réglementation qui leur sont applicables, la fabrication, l’exportation et la distribution de quinze produits fabriqués par la SOCIETE " LABORATOIRE FENIOUX PHARM " et commercialisés par M. F. ;

Sur la légalité externe de la décision du 16 mai 2002 :

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier, et n’est d’ailleurs pas contesté, que M. F. a été destinataire des conclusions de l’enquête diligentée dans les locaux de la SOCIETE " LABORATOIRE FENIOUX PHARM " en octobre 2000 et de la mise en demeure adressée par le directeur général de l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé en juin 2001 ; qu’il a d’ailleurs présenté des observations tant écrites qu’orales préalablement à l’intervention de la décision attaquée ; que, dans la mesure où M. F. est le représentant légal en exercice de la SOCIETE " LABORATOIRES FENIOUX PHARM ", il ne peut sérieusement être soutenu que cette dernière n’aurait pas été mise à même de présenter sa défense ;

Sur la légalité interne :

Considérant qu’il résulte des dispositions précitées de l’article L. 5312-2 du code de la santé publique que l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ne peut légalement prendre une mesure sanitaire de suspension qu’à l’égard des produits, visés à l’article L. 5311-1 du même code, " à finalité sanitaire destinés à l’homme " ou " à finalité cosmétique " ; que, parmi les produits à finalité sanitaire figurent notamment les médicaments, définis par l’article L. 5111-1 du code de la santé publique comme " toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines ou animales, ainsi que tout produit pouvant être administré à l’homme ou à l’animal, en vue d’établir un diagnostic vital ou de restaurer, corriger ou modifier leurs fonctions organiques ", dits respectivement médicaments " par présentation " et médicaments " par fonction " ;

Considérant que, par la décision attaquée du 16 mai 2002, le directeur général de l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a qualifié de médicaments les quinze produits en cause et a prononcé à leur égard une mesure de suspension jusqu’à mise en conformité au regard de la législation, mentionnée précisément dans la décision, relative à l’autorisation de mise sur le marché et à celle régissant les conditions de fabrication et de distribution des médicaments ;

Considérant, d’une part, que ni la circonstance que les produits faisant l’objet de la mesure de suspension aient été commercialisés sous l’appellation de " compléments alimentaires " ou de " produits cosmétiques " et auraient été reconnus comme tels par les autorités d’autres Etats membres de la Communauté européenne, ni le fait que d’autres entreprises continueraient à commercialiser des produits semblables ne s’oppose à ce que, dès lors qu’ils répondent en pratique à la définition des médicaments, les produits en cause puissent être qualifiés comme tels par le directeur général de l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ; que, d’autre part, il ressort des pièces du dossier et de la rédaction même de la décision attaquée que, pour qualifier chacun des produits en cause de médicaments " par fonction ", l’agence ne s’est pas estimée liée par l’inscription des plantes composant les produits en cause à la pharmacopée mais a, au contraire, procédé à une appréciation au cas par cas, tenant compte notamment des propriétés pharmacologiques des substances composant les différents produits ainsi que de leurs modalités d’emploi et de la connaissance qu’en ont les consommateurs ; que, si les requérants font au surplus valoir que, pour qualifier certains des produits de médicaments " par présentation ", l’agence ne pouvait se fonder, compte tenu de leur ancienneté, sur les éléments de l’enquête relatifs à la présentation de ces produits auprès du public, ils ne produisent au soutien de leur requête aucune pièce établissant que les constats relevés en octobre 2000 à l’occasion de l’enquête n’étaient plus valables en mai 2002, date à laquelle la décision attaquée a été prise ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le directeur général de l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ne pouvait faire usage des pouvoirs que lui confère l’article L. 5312-2 du code de la santé publique compte tenu de la nature des produits en cause doit être écarté ;

Considérant, ainsi qu’il a été dit plus haut, que la décision de suspension est fondée, d’une part, sur l’infraction à la législation relative à l’autorisation de mise sur le marché des médicaments et à celle régissant les conditions de fabrication et de distribution de ces médicaments, d’autre part, sur les risques que ces infractions font peser sur la santé publique ;

Considérant, d’une part, que les dispositions de l’article L. 5312-2 du code de la santé publique habilitent le directeur général de l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé à prononcer une suspension à l’encontre des produits ne respectant pas la législation ou la réglementation qui leur sont applicables ; qu’au titre de la législation et de la réglementation applicables aux médicaments figurent notamment les règles relatives à leurs conditions de fabrication et de distribution ; qu’ainsi, le directeur général de l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé pouvait légalement fonder sa décision de suspension sur la non-conformité des conditions de fabrication et de distribution des produits concernés au regard des bonnes pratiques fixées en vertu de l’article L. 5121-5 du code de la santé publique par voie réglementaire ;

Considérant, d’autre part, qu’il résulte de l’instruction que le directeur général de l’agence, qui n’a pas à justifier de l’existence de risques pour la santé humaine pour faire usage de son pouvoir de suspension à l’encontre de produits commercialisés en infraction avec les règles qui leur sont applicables, aurait pris la même décision s’il s’était fondé sur ce seul motif ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée n’établirait pas la réalité des risques invoqués ne peut, en tout état de cause, qu’être écarté ;

Considérant, enfin, que la décision attaquée ne constitue pas une décision de nature réglementaire ; que la méconnaissance d’une directive communautaire ne peut être utilement invoquée à l’appui d’un recours contre une décision administrative non réglementaire ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de la directive du 10 juin 2002, dont le délai de transposition n’était au demeurant pas expiré à la date de la décision attaquée, ne peut qu’être rejeté ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l’annulation de la décision du 16 mai 2002 du directeur général de l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à M. F. et à la SOCIETE " LABORATOIRE FENIOUX PHARM " la somme qu’ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. F. et de la SOCIETE " LABORATOIRE FENIOUX PHARM " est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Christian F., à la SOCIETE " LABORATOIRE FENIOUX PHARM ", à l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

 


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