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Conseil d’Etat, 9 mai 2001, n° 215024, M. BRUGEILLE

Dans l’exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par le décret du 28 novembre 1971 et, notamment, lorsqu’il est appelé à statuer sur une demande d’ouverture d’un bureau annexe, le garde des sceaux, ministre de la justice doit se fonder, dans l’intérêt du service public, sur les besoins du public, la situation géographique et l’évolution démographique et économique ; que, dans l’appréciation de ces intérêts, il peut légalement tenir compte des exigences liées à la viabilité d’un office de notaire dont le maintien apparaît nécessaire.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 215024

M. BRUGEILLE

M. Courson, Rapporteur

M. Seban, Commissaire du gouvernement

Séance du 26 mars 2001

Lecture du 9 mai 2001

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux,

Vu l’ordonnance du 2 décembre 1999, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat le 3 décembre 1999, par laquelle le président du tribunal administratif de Limoges a transmis au Conseil d’Etat, en application de l’article 2 du décret du 30 septembre 1953 modifié, la demande présentée à ce tribunal par M. BRUGEILLE ;

Vu la demande, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Limoges le 29 décembre 1994, présentée par M. Michel BRUGEILLE, notaire à Noailles (19600), et tendant à l’annulation pour excès de pouvoir de la décision du 26 octobre 1994 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice lui a refusé l’ouverture à Brive d’un bureau annexe à son office notarial sis à Noailles ;

Vu les autres pièces du dossier et notamment le mémoire en intervention devant le tribunal administratif de Limoges de MM. Jean-Baptiste Coussirat, Gérard Masmonteil, Jean-Michel Marcou et Claude Peyronnie, notaires à Brive-la Gaillarde ;

Vu le décret n° 71-942 du 26 novembre 1971 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Courson, Maître des Requêtes.

- les observations Me Odent, avocat M. BRUGEILLE et de la SCP Urtin-Petit, Rousseau-Van Troeyen, avocat de la chambre des notaires de la Corrèze et du conseil régional des notaires,

- les conclusions de M. Seban, Commissaire du gouvernement

Sur les interventions :

Considérant que la chambre des notaires de la Corrèze, le conseil régional des notaires du ressort de la cour d’appel de Limoges, ainsi que MM. Coussirat, Masmonteil, Marcou et Peyronnie ont intérêt au maintien de la décision attaquée ; que leurs interventions sont, dès lors, recevables ;

Sur la légalité de la décision attaquée :

Considérant qu’aux termes du 1er alinéa de l’article 10 du décret susvisé du 26 novembre 1971 : « Sous réserve des dispositions des alinéas 2 et 3 ci-après, il est interdit aux notaires de recevoir eux-mêmes ou de faire recevoir par une personne à leur service leurs clients à titre habituel dans un local autre que leur étude (...) » ; qu’en vertu du deuxième alinéa du même article : « Le garde des sceaux, ministre de la justice peut, à la demande du titulaire de l’office. autoriser par arrêté l’ouverture d’un ou plusieurs bureaux annexes soit à l’intérieur du département, soit à l’extérieur du département dans un canton ou une commune limitrophe du canton où est établi l’office. Le ou les bureaux annexes ainsi ouverts restent attachés à l’office sans qu’il soit besoin, lors de la nomination d’un nouveau titulaire, de renouveler l’autorisation accordée » ;

Considérant qu’aux termes de l’article 2 du même décret : « Il est institué auprès du garde des sceaux, ministre de la justice. une commission chargée de donner son avis ou d’émettre des recommandations sur la localisation des offices de notaires en fonction des besoins du public, de la situation géographique et de l’évolution démographique et économique » ; qu’en vertu de l’article 2-3 cette commission « donne son avis sur toute opération tendant à la création, au transfert ou à la suppression d’un office de notaire, sur l’ouverture de bureaux annexes ou leur transformation en office distincts » lorsque cette opération ne figure pas sur l’état prévisionnel arrêté par la commission en application de l’article 2-2 » ;

Considérant, enfin, que le premier alinéa de l’article 2-6 du décret dispose que : « La création, le transfert ou la suppression d’un office, l’ouverture d’un bureau annexe. sa suppression, sa transformation en office distinct et la désignation du tribunal d’instance dans lequel l’office créé sera implanté font l’objet d’un arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice » ; qu’il résulte de l’ensemble de ces dispositions que, dans l’exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par le décret du 28 novembre 1971 et, notamment, lorsqu’il est appelé à statuer sur une demande d’ouverture d’un bureau annexe, le garde des sceaux, ministre de la justice doit se fonder, dans l’intérêt du service public, sur les besoins du public, la situation géographique et l’évolution démographique et économique ; que, dans l’appréciation de ces intérêts, il peut légalement tenir compte des exigences liées à la viabilité d’un office de notaire dont le maintien apparaît nécessaire ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier qu’à la date à laquelle la décision attaquée a été prise, si le plan de localisation des offices prévoyait un accueil supplémentaire, il existait à Brive-la-Gaillarde (Corrèze) trois études de notaires dans lesquelles instrumentaient seulement quatre notaires et non six comme le mentionne de façon erronée la décision. pour une population d’environ 49 000 habitants ; qu’en estimant que le maintien d’un bureau annexe à Brive ne répondait pas à un besoin du public, alors qu’existant depuis près d’un siècle, il assurait la viabilité de l’étude de Noailles dont les produits bruts ne pouvaient être évalués sans inclure ceux du bureau annexe de Brive, le garde des sceaux, ministre de la justice a commis une erreur manifeste d’appréciation ; que, par suite, il a fait une inexacte application des dispositions de l’article 2 du décret du 26 novembre 1971 en rejetant la demande de M. BRUGEILLE d’ouverture à Brive-la-Gaillarde d’un bureau annexe de son office de Noailles ;

Sur les conclusions de M. BRUGEILLE tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce. de faire application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative et de condamner l’Etat à verser à M. BRUGEILLE une somme de 10 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ,

D E C I D E :

Article 1er : Les interventions de la chambre des notaires de la Corrèze, du conseil régional des notaires du ressort de la cour d’appel de Limoges, de MM. Coussirat, Masmonteil, Marcou et Pevronnie sont admises.

Article 2 : La décision du garde des sceaux- ministre de la justice, en date du 26 octobre 1994 est annulée.

Article 3 : L’Etat est condamné à payer à M. BRUGEILLE une somme de 10 000 F au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Michel BRUGEILLE, à la chambre des notaires de la Corrèze, au conseil régional des notaires de la cour d’appel de Limoges. à MM. Jean-Baptiste Coussirat, Gérard Masmonteil, Jean-Michel Marcou, Claude Peyronnie et au garde des sceaux. ministre de la justice.

 


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