CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
N° 229755
SOCIETE SELARL ACACCIA
Mme Ducarouge, Rapporteur
M. Seban, Commissaire du gouvernement
Séance du 21 janvier 2002
Lecture du 13 février 2002
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’Etat statuant au contentieux
Section du contentieux, 6ème et 4ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 6ème sous-section de la Section du contentieux
Vu la requête, enregistrée le 31 janvier 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par la SOCIETE SELARL ACACCIA, ayant son siège 19, rue des Mézereaux, à Melun (77000) agissant par ses gérants, M. Rémi Rouquette et Mme Hélène Lipietz ; la SOCIETE SELARL ACACCIA demande que le Conseil d’Etat :
1°) annule pour excès de pouvoir la décision implicite du Premier ministre refusant de modifier le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
2°) ordonne au Premier ministre, dans un délai de trois mois à compter de la notification de l’arrêt, de modifier ce décret ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;
Vu la loi n° 72-11 du 3 janvier 1972 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l’aide juridique ;
Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de Mme Ducarouge, Conseiller d’Etat,
les conclusions de M. Seban, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le garde des sceaux, ministre de la justice :
Considérant que pour demander la modification du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l’aide juridique, la SOCIETE SELARL ACACCIA soutient que celui-ci serait entaché d’erreur manifeste d’appréciation dans la fixation du nombre d’unités de valeur affectées aux différentes procédures et de violation de la loi en tant que celle-ci prévoit une rétribution de l’avocat appelé à prêter son concours dans le cadre de l’aide juridictionnelle ;
Considérant que la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l’aide juridique a, notamment, pour objet de revaloriser la contribution de l’Etat à la rémunération des avocats et des officiers publics et ministériels en cas d’aide juridictionnelle ; qu’aux termes de son article 27 : "L’avocat qui prête son concours au bénéficiaire de l’aide juridictionnelle perçoit une rétribution. L’Etat affecte annuellement à chaque barreau une dotation représentant sa part contributive aux missions d’aide juridictionnelle accomplies par les avocats du barreau. Le montant de cette dotation résulte, d’une part, du nombre de missions d’aide juridictionnelle accomplies par les avocats du barreau et, d’autre part, du produit d’un coefficient par type deprocédure et d’une unité de valeur de référence... La loi de finances détermine annuellement l’unité de valeur" ; qu’il résulte des termes mêmes de l’article 27 que la loi n’implique pas que la contribution versée aux avocats prêtant leur concours aux bénéficiaires de l’aide juridictionnelle
couvre l’intégralité des frais et honoraires correspondants ; que dès lors la requérante n’est pas
fondée à demander la modification des articles 90 et 91 du décret du 12 décembre 1991, qui fixent les modalités de calcul de la contribution de l’Etat a la rétribution des avocats, en faisant valoir que les dispositions de ces articles seraient entachées d’erreur manifeste d’appréciation dans la mesure où elles n’assurent pas aux avocats commis dans le cadre de l’aide juridictionnelle une rémunération suffisante et méconnaîtraient les dispositions de la loi du 10 juillet 1991 ; qu’elle ne saurait davantage se prévaloir d’une méconnaissance des stipulations de l’article 6 de
la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales garantissant le droit à un procès équitable et du premier protocole additionnel à cette convention garantissant le respect des biens ; que dès lors les conclusions de la requête de la SOCIETE SELARL ACACCIA tendant à l’abrogation de la décision implicite du Premier ministre refusant de modifier le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 doivent être rejetées ;
Considérant que la présente décision n’impliquant aucune mesure d’exécution, les conclusions aux fins d’application des dispositions de l’article L. 911-2 du code de justice administrative ne peuvent qu’être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SOCIETE SELARL ACACCIA est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE SELARL ACACCIA et au garde des sceaux, ministre de la justice.