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Conseil d’Etat, 25 juin 2003, n° 236090, M. Pierre D.

Si, en application des dispositions combinées des articles 51 et 52 de l’ordonnance du 22 décembre 1958, un membre du Conseil supérieur de la magistrature, statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège, est désigné comme rapporteur et peut procéder à des mesures d’investigation, de telles attributions ne diffèrent pas de celles que la formation collégiale de jugement pourrait elle-même exercer et ne confèrent pas au rapporteur le pouvoir de modifier le champ de la saisine de la juridiction. Ainsi l’ensemble de ces dispositions n’ont pas pour effet de conférer au rapporteur des fonctions qui, au regard du principe d’impartialité, feraient obstacle à sa participation au délibéré de ce conseil.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 236090

M. D.

Mme Ducarouge
Rapporteur

M. Guyomar
Commissaire du gouvernement

Séance du 28 mai 2003
Lecture du 25 juin 2003

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 6ème et 4ème sous-section réunies) Sur le rapport de la 6ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 juillet et 16 novembre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Pierre D., demeurant 2, sentier du Clos aux Renards, Le Plessis-Robinson (92350) ; M. D. demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir la décision du 15 mai 2001 par laquelle le Conseil supérieur de la magistrature a prononcé à son encontre le retrait de l’honorariat ;

2°) de condamner l’Etat à lui payer la somme de 12 000 F en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des

libertés fondamentales ;

Vu l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée notamment par la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 ;

Vu le décret n° 94-199 du 9 mars 1994 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Ducarouge, Conseiller d’Etat,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de M. D.,
- les conclusions de M. Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’aux termes de l’article 78 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature : "Les magistrats honoraires demeurent attachés en cette qualité à la juridiction à laquelle ils appartenaient. Ils continuent à jouir des honneurs et privilèges attachés à leur état..." ; et qu’aux termes de son article 79 : "Le retrait de l’honorariat peut être prononcé pour des motifs tirés du comportement du magistrat honoraire depuis son admission à la retraite (...)./ L’honorariat ne peut être retiré que dans les formes prévues au chapitre VII" relatif à la procédure disciplinaire ;

Considérant que M. D. demande l’annulation de la décision par laquelle le Conseil supérieur de la magistrature, statuant en formation disciplinaire des magistrats du siège, a prononcé à son encontre le retrait de l’honorariat, après rejet par la Cour de cassation de son pourvoi contre l’arrêt de la cour d’appel de Paris confirmant le jugement du tribunal de grande instance de Créteil le déclarant coupable des faits qui lui étaient reprochés ;

Sur le moyen tiré de l’irrégularité de la décision attaquée au regard des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales :

Considérant que les stipulations de l’article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, relatives aux contestations sur les droits et obligations à caractère civil et aux accusations en matière pénale, ne concernent pas le régime disciplinaire applicable à des personnes qui, comme c’est le cas pour les magistrats de l’ordre judiciaire, participent à l’exercice de la puissance publique et à la sauvegarde des intérêts généraux de l’Etat ; qu’il ressort expressément des dispositions précitées que le magistrat qui a obtenu le bénéfice de l’honorariat demeure attaché à la juridiction à laquelle il appartenait ; qu’il conserve vocation à exercer des fonctions qui le font participer à l’exercice de la puissance publique et à la sauvegarde des intérêts généraux de l’Etat ; que M. D. ne peut, par suite, se prévaloir de ces stipulations ;

Considérant que l’honorariat ne constituant ni un droit ni une liberté reconnus par la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, le moyen tiré de ce que M. D. aurait été privé du droit à un recours effectif, en méconnaissance des stipulations de son article 13, ne peut, en tout état de cause, qu’être écarté ;

Sur le moyen tiré de la participation du rapporteur au délibéré :

Considérant que si, en application des dispositions combinées des articles 51 et 52 de l’ordonnance du 22 décembre 1958, un membre du Conseil supérieur de la magistrature, statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège, est désigné comme rapporteur et peut procéder à des mesures d’investigation, de telles attributions ne diffèrent pas de celles que la formation collégiale de jugement pourrait elle-même exercer et ne confèrent pas au rapporteur le pouvoir de modifier le champ de la saisine de la juridiction ; qu’ainsi l’ensemble de ces dispositions n’ont pas pour effet de conférer au rapporteur des fonctions qui, au regard du principe d’impartialité, feraient obstacle à sa participation au délibéré de ce conseil ;

Sur le moyen tiré de ce que les droits de la défense auraient été méconnus :

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. D. a refusé le 12 décembre 2000 le pli lui transmettant le rapport du rapporteur devant le Conseil supérieur de la magistrature ; qu’une nouvelle communication de ce rapport, comportant l’indication des modalités de consultation du dossier de l’intéressé, a été adressée le 2 janvier 2001 à son avocat, qui en a accusé réception le 8 janvier ; que M. D., assisté de son avocat, a été entendu lors de l’audience du 2 mai 2001, et a fourni ses explications et moyens de défense sur les faits qui lui étaient reprochés ; qu’ainsi le moyen tiré de la violation des droits de la défense doit être écarté ;

Sur le moyen tiré de ce que le Conseil supérieur de la magistrature n’aurait pas exercé la plénitude de ses pouvoirs :

Considérant que les constatations de fait retenues par le juge pénal, dans la mesure où elles constituent le soutien nécessaire du dispositif de la décision, sont revêtues de l’autorité absolue de la chose jugée et s’imposent au juge disciplinaire, même en l’absence de texte, sans qu’il soit ainsi porté atteinte à l’exercice des droits de la défense ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. D. n’est pas fondé à demander l’annulation de la décision attaquée ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. D. la somme qu’il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D. est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Pierre D. et au garde des sceaux, ministre de la justice.

 


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