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Conseil d’Etat, 24 juin 2002, n° 215400, Préfet de la Haute-Garonne c/ M. Djamel T.

Si, lorsque la mesure de reconduite à la frontière et la décision fixant le pays de destination sont pris par des actes distincts et non simultanés, elles obéissent, pour ce qui est de leur contestation contentieuse, à des procédures différentes, cette circonstance ne permet pas de regarder l’étranger comme privé d’un recours effectif au sens de l’article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales contre la décision fixant le pays de destination qui peut faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir et, le cas échéant, d’une requête en référé selon les règles du droit commun.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 215400

PREFET DE LA HAUTE-GARONNE
c/ M. T.

M. Peylet
Rapporteur

M. Piveteau
Commissaire du gouvernement

Séance du 3juin 2002

Lecture du 24 juin 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 7ème et 5ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 7ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête enregistrée le 16 décembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE ; le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler le jugement du 22 novembre 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a sursis à statuer sur la demande de M. Djamel T. dirigée contre l’arrêté du S novembre 1999 ordonnant sa reconduite à la frontière jusqu’à ce que lui ait été notifiée la décision fixant le pays à destination duquel il serait reconduit ;

2°)de rejeter la demande présentée par M. T. devant le tribunal administratif de Paris ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu l’ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Peylet, Conseiller d’Etat,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. T.,
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article 27 ter de l’ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : “La décision fixant le pays de renvoi constitue une décision distincte de la mesure d’éloignement elle-même” ; qu’aucune disposition législative ou réglementaire n’impose que ces décisions soient prises simultanément ; qu’il en résulte que la circonstance que l’arrêté ordonnant la reconduite à la frontière d’un étranger ne mentionne pas le pays à destination duquel il sera reconduit ou n’est pas accompagné d’une telle décision est sans incidence sur la légalité de la mesure d’éloignement elle-même ; que si, lorsque la mesure de reconduite à la frontière et la décision fixant le pays de destination sont pris par des actes distincts et non simultanés, elles obéissent, pour ce qui est de leur contestation contentieuse, à des procédures différentes, cette circonstance ne permet pas de regarder l’étranger comme privé d’un recours effectif au sens de l’article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales contre la décision fixant le pays de destination qui peut faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir et, le cas échéant, d’une requête en référé selon les règles du droit commun ;

Considérant, en outre, que les moyens tirés de l’illégalité de la décision fixant le pays de destination sont inopérants à l’encontre de la décision d’éloignement ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’en décidant de différer son jugement sur la demande de M. T. dirigée contre l’arrêté du PREFET DE LA HAUTE-GARONNE décidant sa reconduite à la frontière jusqu’à ce que lui ait été notifiée la décision fixant le pays de destination de cette mesure, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse n’a pas épuisé le pouvoir juridictionnel qu’il était tenu d’exercer ; que son jugement doit, en conséquence, être annulé ;

Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. T. devant le tribunal administratif de Toulouse ;

Considérant qu’aux termes du I de l’article 22 de l’ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : “Le représentant de l’Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu’un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l’étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d’un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s’est maintenu sur le territoire au-delà du délai d’un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...)“ ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. T., de nationalité algérienne, s’est maintenu sur le territoire français plus d’un mois à compter de la notification, le 7 mai 1998, de l’arrêté du 21 avril 1998 par lequel le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE lui a refusé la délivrance d’un titre de séjour ; qu’il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 30 du I de l’article 22 de l’ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d’un étranger à la frontière ;

Considérant que la décision du 21 avril 1998 refusant à M. T. la délivrance d’un titre de séjour, qui énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée ; que le requérant ne peut utilement se prévaloir, à l’encontre de cette décision, de la circulaire du 24 juin 1997 qui est dépourvue de valeur réglementaire ; qu’il n’est, dès lors, pas fondé à exciper de l’illégalité de cette décision à l’encontre de l’arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière ;

Considérant que le moyen tiré de ce que le retour de M. T. dans son pays d’origine lui ferait courir des risques sérieux pour sa vie et sa liberté est inopérant à l’encontre de l’arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, qui ne mentionne pas le pays à destination duquel il doit être reconduit ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. T. n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêté du 8 novembre 1999 du PREFET DE LA HAUTE-GARONNE ordonnant sa reconduite à la frontière, lequel est lui-même suffisamment motivé ;

Sur les conclusions dirigées contre une décision fixant le pays à destination duquel M. T. peut être reconduit :

Considérant qu’en l’absence de toute mention relative au pays à destination duquel M. T. doit être reconduit, l’arrêté attaqué ne saurait être regardé comme ayant implicitement désigné l’Algérie comme pays de destination de la reconduite ; que les conclusions dirigées contre une décision qui n’a pas été prise par l’acte attaqué ne sont pas recevables ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 22 novembre 1999 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. T. devant le tribunal administratif de Toulouse est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA HAUTE-GARONNE, à M. Djamel T. et au ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

 


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