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Conseil d’Etat, 3 mai 2002, n° 224565, Clinique médicale de pneumologie Sainte-Anne

L’existence d’une procédure particulière qui a pour effet, à l’exclusion d’ailleurs de tout autre recours administratif, de conserver le délai de recours contentieux, n’a pas pour conséquence de priver l’établissement titulaire de l’autorisation retirée de son droit d’agir devant le juge administratif dans les conditions du droit commun, après que l’autorité administrative compétente a rejeté le recours hiérarchique présenté devant elle.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 224565

CLINIQUE MEDICALE DE PNEUMOLOGIE SAINTE-ANNE

M. Mary, Rapporteur

Mme de Silva, Commissaire du gouvernement

Séance du 27 mars 2002

Lecture du 3 mai 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 2ème et 1ère sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 2ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 août et 29 décembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la CLINIQUE MEDICALE DE PNEUMOLOGIE SAINTE-ANNE, dont le siège est 32, rue Sainte-Anne à Thannenkirch (68590) ; la CLINIQUE MEDICALE DE PNEUMOLOGIE SAINTE-ANNE demande que le Conseil d’Etat :

1°) annule l’arrêt en date du 29 juin 2000 par lequel la cour administrative d’appel de Nancy a rejeté sa requête tendant à l’annulation du jugement en date du 5 novembre 1996 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions tendant à l’annulation de l’arrêté du 20 décembre 1994, confirmé sur recours hiérarchique par le ministre délégué à la santé, par lequel le préfet de la région Alsace lui a retiré son autorisation de fonctionnement sur le fondement de l’article L. 712-18 du code de la santé publique ;

2°) fasse droit aux conclusions de sa requête d’appel ;

3°) condamne l’Etat au versement d’une somme de 10 000 F (1 524,5 euros) en application des dispositions de l’article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Mary, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de la CLINIQUE MEDICALE DE PNEUMOLOGIE SAINTE-ANNE,
- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, pour confirmer le rejet de la requête de la CLINIQUE MEDICALE DE PNEUMOLOGIE SAINTE-ANNE devant le tribunal administratif de Strasbourg, dirigée contre l’arrêté préfectoral en date du 20 décembre 1994 lui retirant son autorisation de fonctionner en application de l’article L. 712-18 du code de la santé publique, la cour administrative d’appel de Nancy s’est fondée sur ce que la clinique intéressée n’avait pas exercé le recours hiérarchique prévu à l’article L. 712-16 du même code, préalablement à tout recours contentieux, à peine d’irrecevabilité de celui-ci ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 712-16 du code de la santé publique, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée, l’autorisation de fonctionnement d’un établissement de santé "est donnée ou renouvelée par le représentant de l’Etat après avis du comité régional de l’organisation sanitaire et sociale. Un recours hiérarchique contre la décision peut être formé par tout intéressé devant le ministre chargé de la santé qui statue dans un délai maximum de six mois, sur avis du comité national de l’organisation sanitaire et sociale..." ; qu’aux termes de l’article L. 712-18 du même code : "... le représentant de l’Etat peut prononcer la suspension totale ou partielle de l’autorisation de fonctionner d’une installation ou d’une activité de soins : 1 ° En cas d’urgence tenant à la sécurité des malades ; 2° Lorsque les conditions techniques de fonctionnement prévues au 3° de l’article L. 712-9 ne sont pas respectées... ; La décision de suspension est transmise sans délai à l’établissement concerné, assortie d’une mise en demeure..." ; que si, dans le délai fixé par ces dispositions, la mise en demeure est restée sans effet, "le ministre ou son représentant doit alors se prononcer à titre définitif, éventuellement sur le retrait d’autorisation..." ; que l’article L. 712-16 du code de la santé publique, qui détermine les modalités de délivrance des autorisations de fonctionnement aux établissements de santé, impose de former un recours hiérarchique obligatoire contre les décisions du représentant de l’Etat, avant tout recours contentieux, à peine d’irrecevabilité de celui-ci ; qu’il résulte de ces dispositions que le recours hiérarchique organisé à l’article L. 712-16 doit être formé, dans tous les cas, avant tout recours contentieux ; qu’il en est ainsi pour les recours dirigés contre les décisions de retrait d’une autorisation de fonctionner d’un établissement sanitaire privé, que le préfet peut prendre, sur le fondement de l’article L. 712-18 précité, en cas d’urgence pour la sécurité des malades ou lorsque certaines conditions techniques de fonctionnement ne sont pas respectées ; qu’ainsi, en se fondant sur l’absence de recours hiérarchique de la part de la clinique pour rejeter la requête de celle-ci comme irrecevable, la cour n’a pas entaché son arrêt d’une erreur de droit ;

Considérant que la circonstance que l’existence de ce recours obligatoire n’ait pas été indiquée clairement dans la notification de l’arrêté attaqué, si elle empêchait que cette notification fasse courir le délai du recours contentieux à l’encontre de cet arrêté, est sans incidence sur la recevabilité de la demande présentée directement devant le tribunal administratif ; qu’ainsi, en ne tenant pas compte du caractère ambigu de la mention des voies et délais de recours dans la lettre de notification, la cour n’a pas entaché son arrêt d’erreur de droit ;

Considérant que l’existence de cette procédure particulière qui a pour effet, à l’exclusion d’ailleurs de tout autre recours administratif, de conserver le délai de recours contentieux, n’a pas pour conséquence de priver l’établissement titulaire de l’autorisation retirée de son droit d’agir devant le juge administratif dans les conditions du droit commun, après que l’autorité administrative compétente a rejeté le recours hiérarchique présenté devant elle ; qu’ainsi, en opposant, dans de telles circonstances, le caractère obligatoire du recours hiérarchique préalable, la cour n’a pas méconnu les stipulations des articles 6-1 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales qui garantissent le droit d’accès à un juge ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la CLINIQUE MEDICALE PNEUMOLOGIQUE SAINTE-ANNE n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ;

Sur l’application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat , qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à la CLINIQUE MEDICALE DE PNEUMOLOGIE SAINTE-ANNE la somme qu’elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la CLINIQUE MEDICALE DE PNEUMOLOGIE SAINTE-ANNE est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la CLINIQUE MEDICALE DE PNEUMOLOGIE SAINTE-ANNE et au ministre de l’emploi et de la solidarité.

 


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