format pour impression
(imprimer)

NOTES ET COMMENTAIRES :
Olivier GUEZOU, Les conditions de la contestation d’un décompte général, AJDA 2003, p.329

DANS LA MEME RUBRIQUE :
Conseil d’Etat, 28 octobre 2002, n° 232060, Commune de Moisselles
Conseil d’Etat, Assemblée, 5 mars 2003, n° 233372, Union nationale des services publics industriels et commerciaux et autres
Cour administrative d’appel de Marseille, 12 juin 2003, n° 99MA01873, Commune d’Ajaccio c/ SARL Garage du stade
Cour administrative d’appel de Bordeaux, 20 novembre 2003, n° 99BX01809, Jean D.
Cour administrative d’appel de Bordeaux, 27 mai 2003, n° 99BX02302, Société grands travaux de l’océan indien
Cour administrative d’appel de Marseille, 26 novembre 2002, n° 00MA00469, Entreprise Paul Milet
Conseil d’Etat, 28 septembre 2001, n° 182761, Société Quillery
Cour administrative d’appel de Marseille, 23 janvier 2003, n° 99MA02109, Commune de Six-Fours-les-Plages c/ M. Albert A.
Cour administrative d’appel de Douai, 11 mars 2003, n° 00DA01298, Société Baudin Châteauneuf
Conseil d’Etat, 24 juin 2002, n° 240271, Département de la Seine-Maritime




Conseil d’Etat, Avis, 22 février 2002, n° 240128, Société Reithler

Quand bien même l’entrepreneur qui n’accepte pas la décision prise par le maître de l’ouvrage sur sa réclamation relative au décompte général ou le rejet implicite de sa demande adresserait à la personne responsable du marché un mémoire complémentaire développant les raisons de son refus, ce mémoire complémentaire ne pourrait ni suspendre ni interrompre le délai de six mois prévu par l’article 50-32 du cahier des clauses administratives générales, dont le point de départ demeurerait fixé à la date de la notification à l’entrepreneur de la décision prise sur sa réclamation.

CONSEIL D’ETAT

N° 240128

SOCIETE REITHLER

M. Peylet, Rapporteur

M. Piveteau, Commissaire du Gouvernement

Séance du 23 janvier 2002

Lecture du 22 février 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

Le Conseil d’Etat

(Section du contentieux, 7ème et 5ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 7ème sous-section de la Section du contentieux

Vu enregistré le 16 novembre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, le jugement du 9 novembre 2001, par lequel le tribunal administratif de Versailles, avant de statuer sur la demande de la SOCIETE REITHLER tendant à la condamnation de la commune de Franconville à lui payer la somme de 422 618, 81 F TTC augmentés des intérêts moratoires en règlement du marché qui lui a été confié par ladite commune en vue de l’exécution des lots n° 1 et 2 de la construction d’un auvent pour le commerce de la résidence du Moulin, a décidé par application des dispositions de l’article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d’Etat, en soumettant à son examen les questions suivantes :

1°) les stipulations des articles 13.44 et 50.22 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux font-elles obstacle à ce que, en cas de rejet implicite ou exprès du mémoire de réclamation prévu par ces stipulations, l’entreprise saisisse la personne responsable du marché du mémoire complémentaire prévu par l’article 50-21 du cahier des clauses administratives générales ?

2°) dans le cas où l’entreprise a la faculté de saisir la personne responsable dumarché du mémoire complémentaire prévu par l’article 50-21, le point de départ du délai de six mois prévu par l’article 50-32 du cahier des clauses administratives générales doit-il, en tout état de cause, être fixé à compter de la notification de la décision initiale de rejet opposée par le maître de l’ouvrage ou est-il prorogé par le dépôt dudit mémoire complémentaire pour ne commencer à courir qu’à compter de la décision prise par le maître de l’ouvrage sur le mémoire complémentaire ?

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 modifié approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

Vu le code de justice administrative, et notamment ses articles L. 113-1 et R. 113-1 à R. 113-4 ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Peyiet, Conseiller d’Etat,
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;

REND L’AVIS SUIVANT :

Aux termes des stipulations de l’article 13-44 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux susvisé : "L’entrepreneur doit, dans un délai compté à partir de la notification du décompte général, le renvoyer au maître d’œuvre, revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de le signer. Ce délai est de trente jours, si le marché a un délai d’exécution inférieur ou égal à six mois. Il est de quarante-cinq jours, dans le cas où le délai contractuel d’exécution du marché est supérieur à six mois. / Si la signature du décompte général est donnée sans réserve, cette acceptation lie définitivement les parties, sauf en ce qui concerne le montant des intérêts moratoires ; ce décompte devient ainsi le décompte général et définitif du marché./ Si la signature du décompte général est refusée ou donnée avec réserves, les motifs de ce refus ou de ces réserves doivent être exposés par l’entrepreneur dans un mémoire de réclamation qui précise le montant des sommes dont il revendique le paiement et qui fournit les justifications nécessaires en reprenant, sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement et qui n’ont pas encore fait l’objet d’un règlement définitif ; ce mémoire doit être remis au maître d’oeuvre dans le délai indiqué au premier alinéa du présent article. Le règlement du différend intervient alors suivant les modalités indiquées à l’article 50 (...) ".

Aux termes des stipulations de l’article 50 de ce même cahier, relatives au règlement des différends et des litiges :

"50.1 - Intervention de la personne responsable du marché :

50.11 - Si un différend survient entre le maître d’œuvre et l’entrepreneur, sous la forme de réserves faites à un ordre de service ou sous toute autre forme, l’entrepreneur remet au maître d’œuvre. aux fins de transmission à la personne responsable du marché, un mémoire exposant les motifs et indiquant les montants de ses réclamations.

50.12 - Après que ce mémoire a été transmis par le maître d’oeuvre, avec ses avis, à la personne responsable du marché, celle-ci notifie ou fait notifier à l’entrepreneur sa proposition pour le règlement du différend, dans un délai de deux mois à compter de la date de réception par le maître d’oeuvre du mémoire de réclamation. L’absence de proposition dans ce délai équivaut à un rejet de la demande de l’entrepreneur.

50.2 - Intervention du maître de l’ouvrage :

50.21 - Lorsque l’entrepreneur n’accepte pas la proposition de la personne responsable du marché ou le rejet implicite de sa demande, il doit, sous peine de forclusion, dans un délai de trois mois à compter de la notification de cette proposition ou de l’expiration du délai de deux mois prévu au 12 du présent article, le faire connaître par écrit à la personne responsable du marché en lui faisant parvenir, le cas échéant, aux fins de transmission au maître de l’ouvragre un mémoire complémentaire développant les raisons de son refus.

50.22 - Si un différend survient directement entre la personne responsable du marché et l’entrepreneur, celui-ci doit adresser un mémoire de réclamation à ladite personne aux fins de transmission au maître de l’ouvrage.

50.23 - La décision à prendre sur les différends prévus aux 21 et 22 du présent article appartient au maître de l’ouvrage.

Si l’entrepreneur ne donne pas son accord à la décision ainsi prise, les modalités fixées par cette décision sont appliquées au titre du règlement provisoire du différend, le règlement définitif relevant des procédures décrites ci-après.

50.3 - Procédure contentieuse :

50-31 - Si, dans le délai de trois mois à partir de la date de réception, par la personne responsable du marché, de la lettre ou du mémoire de l’entrepreneur mentionné aux 21 et 22 du présent article aucune décision n’a été notifiée à l’entrepreneur ou si celui-ci n’accepte pas la décision qui lui a été notifiée, l’entrepreneur peut saisir le tribunal administratif compétent. II ne peut porter devant cette juridiction que les chefs et motifs de réclamation énoncés dans la lettre ou le mémoire remis à la personne responsable du marché (...)."

Il résulte des stipulations précitées de l’article 13-44 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux que l’entrepreneur dispose d’un délai fixé selon le cas à trente ou à quarante-cinq jours à compter de la notification du décompte général par le maître de l’ouvrage pour faire valoir, dans un mémoire de réclamation remis au maître d’oeuvre, ses éventuelles réserves, le règlement du différend intervenant alors selon les modalités précisées à l’article 50.

Les stipulations précitées des articles 50-11 et 50-12 de ce même cahier des clauses administratives générales concernent le règlement de différends survenus entre le maître d’œuvre et l’entrepreneur et ne s’appliquent dès lors pas au différend qui survient dans l’établissement d’un décompte général qui constitue un différend entre l’entrepreneur et le maître de l’ouvrage.

Le renvoi à l’article 50 auquel procède l’article 13-44 doit ainsi s’entendre comme concernant les stipulations du 22 et du 23 de cet article, applicables lorsque le différend survient directement entre la personne responsable du marché et l’entrepreneur. Le mémoire de réclamation mentionné à l’article 50-22 est alors nécessairement celui mentionné à l’article 13-44 précité.

Les stipulations de l’article 50-21, qui ne visent que des réclamations préalablement transmises au maître d’œuvre, ne s’appliquent que dans le cas de différends survenus entre le maître d’oeuvre et l’entrepreneur. Elles ne peuvent donc s’appliquer dans le cas d’un différend survenu lors de la procédure d’établissement du décompte général.

Il résulte de ce qui précède que :

1°) Les stipulations de l’article 13-44 et de l’article 50-22 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ne prévoient pas, à la différence de celles de l’article 50-21 que, en cas de rejet implicite ou exprès du mémoire de réclamation prévu par ces stipulations, l’entreprise saisisse la personne responsable du marché d’un mémoire complémentaire.

2°) Quand bien même l’entrepreneur qui n’accepte pas la décision prise par le maître de l’ouvrage sur sa réclamation relative au décompte général ou le rejet implicite de sa demande adresserait à la personne responsable du marché un mémoire complémentaire développant les raisons de son refus, ce mémoire complémentaire ne pourrait ni suspendre ni interrompre le délai de six mois prévu par l’article 50-32 du cahier des clauses administratives générales, dont le point de départ demeurerait fixé à la date de la notification à l’entrepreneur de la décision prise sur sa réclamation.

3°) En conséquence, il appartient à l’entrepreneur qui a contesté le décompte général dans le délai de trente ou de quarante-cinq jours prévu à l’article 13-44 à compter de la notification qui lui en a été faite et qui n’accepte pas la décision qui a été prise sur sa réclamation par le maître de l’ouvrage dans le délai de trois mois prévu à l’article 50-31 ou le refus implicite né du silence gardé par le maître de l’ouvrage au terme de ce délai, de saisir du litige le tribunal administratif compétent dans le délai de six mois prévu à l’article 50-32 à partir de la notification de cette décision.

Le présent avis sera notifié au tribunal administratif de Versailles, à la SOCIETE REITHLER, à la commune de Franconville et au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

Il sera publié au Journal officiel de la République française.

 


©opyright - 1998 - contact - Rajf.org - Revue de l'Actualité Juridique Française - L'auteur du site
Suivre la vie du site