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Conseil d’Etat, 11 décembre 2008, n° 296429, Yves G.

En vertu des dispositions des articles 92 B et 200 A du code général des impôts alors en vigueur, les gains nets retirés de la cession à titre onéreux de valeurs mobilières sont imposés au taux forfaitaire de 16 % ; qu’en vertu de l’article 1583 du code civil : "La vente est parfaite entre les parties et la propriété est acquise de plein droit à l’acheteur à l’égard du vendeur, dès qu’on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’a pas encore été livrée ni le prix payé" ; que, selon l’article 1592 du même code, le prix peut être laissé à l’arbitrage d’un tiers et, s’il ne veut ou ne peut faire l’estimation, il n’y a pas de vente.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 296429

M. et Mme G.

Mme Eliane Chemla
Rapporteur

M. Laurent Olléon
Commissaire du gouvernement

Séance du 7 novembre 2008
Lecture du 11 décembre 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 8ème et 3ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 8ème sous-section de la Section du contentieux

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 août et 11 décembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. et Mme Yves G. ; M. et Mme G. demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt du 2 mai 2006 par lequel la cour administrative d’appel de Nantes a rejeté leur requête tendant à l’annulation du jugement du 2 novembre 2004 du tribunal administratif de Nantes rejetant leurs demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contribution sociale généralisée auxquelles ils ont été assujettis au titre de l’année 1993 ainsi que des pénalités correspondantes et à la réduction de la cotisation d’impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l’année 1995 ;

2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à leur requête d’appel ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Eliane Chemla, Conseiller d’Etat,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat M. et Mme G.,

- les conclusions de M. Laurent Olléon, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme G., qui détenaient avec leurs enfants 434 actions de la SA Fleury Michon Développement, ont déclaré une plus-value de cession de ces parts en 1995 ; que l’administration fiscale, à la suite d’un contrôle sur pièces, a estimé que cette plus-value devait être rattachée à l’année 1993 et a établi l’imposition supplémentaire résultant de ce rattachement ; qu’elle a également procédé à un redressement dans la catégorie des revenus mobiliers au titre de l’année 1995 et a émis le 10 février 2000 un avis de dégrèvement partiel correspondant à la différence entre le montant de la plus-value dégrevée au titre de l’année 1995 et les rehaussements opérés au titre de cette même année ; que M. et Mme G. demandent l’annulation de l’arrêt de la cour administrative de Nantes du 2 mai 2006 confirmant le jugement du tribunal administratif de Nantes du 2 novembre 2004 rejetant leur demande en décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contribution sociale généralisée auxquelles ils ont été assujettis au titre de l’année 1993 ainsi que des intérêts de retard correspondants et leur demande en restitution d’une somme de 610 788 F au titre de l’année 1995 ;

Sur les conclusions dirigées contre l’arrêt de la cour en tant qu’il statue sur le litige relatif à l’année 1993 :

Considérant qu’en vertu des dispositions des articles 92 B et 200 A du code général des impôts alors en vigueur, les gains nets retirés de la cession à titre onéreux de valeurs mobilières sont imposés au taux forfaitaire de 16 % ; qu’en vertu de l’article 1583 du code civil : "La vente est parfaite entre les parties et la propriété est acquise de plein droit à l’acheteur à l’égard du vendeur, dès qu’on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’a pas encore été livrée ni le prix payé" ; que, selon l’article 1592 du même code, le prix peut être laissé à l’arbitrage d’un tiers et, s’il ne veut ou ne peut faire l’estimation, il n’y a pas de vente ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que, par un protocole signé le 27 juillet 1993, l’ensemble des associés de la société Fleury Michon Développement, qui détenaient 84, 4 % du capital de la société Callixte Producteur, et les associés minoritaires de la société Callixte Producteur, laquelle résultait de la fusion le 30 juillet 1993 de deux autres sociétés, ont cédé leurs actions pour un prix de base global de 100 millions de francs ; que ce prix était, en vertu de l’article 3 de la convention, susceptible de varier à la hausse ou à la baisse en fonction des résultats ou des situations nettes comptables des sociétés cédées arrêtés au 31 décembre 1992 ou au 31 juillet 1993 ; que le protocole stipulait que les comptes des sociétés feraient l’objet d’un audit par un premier cabinet, qu’en cas de désaccord sur le rapport de ce cabinet, qui devait être remis au plus tard le 15 octobre 1993, une mission d’audit sur les questions litigieuses serait confiée à un second cabinet et qu’en cas de désaccord sur les conclusions de ce dernier, "la partie la plus diligente saisira le président du tribunal de commerce afin que celui-ci désigne un tiers expert agissant en application des dispositions de l’article 1592 du code civil", avec pour mission de résoudre les désaccords révélés par le rapport du second cabinet d’audit ; que la cour, qui a relevé, d’une part, que les termes de la convention permettaient de déterminer le prix de la cession à partir de données constatées avant le 31 décembre 1993, alors même que les diminutions de prix n’ont été définitivement évaluées qu’en janvier 1995 à l’issue de la mission du tiers nommé par le tribunal, lequel a fixé le prix à 52 millions de francs, et, d’autre part, que le transfert de propriété est intervenu conformément aux termes de la convention avant le 31 décembre 1993, après réalisation des deux conditions suspensives prévues par le protocole, n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que la vente, qui constitue le fait générateur de l’imposition de la plus-value, était parfaite avant le 31 décembre 1993 dès lors que le contrat devait permettre au vu de ses clauses de déterminer le prix par des éléments ne dépendant plus de la volonté de l’une des parties ou de la réalisation d’accords ultérieurs et qu’en conséquence, la part de la plus-value correspondant aux droits des époux G. dans la société Fleury Michon Développement devait être rattachée à l’année 1993 et non à l’année 1995 ;

Considérant que le moyen tiré de ce que la cour aurait méconnu les articles 1134 et 1156 du code civil est nouveau en cassation et, n’étant pas d’ordre public, n’est pas recevable ;

Considérant que la cour n’a ni commis d’erreur de droit ni dénaturé les termes de l’instruction 5 G-7-78 du 19 septembre 1978 en jugeant qu’elle ne comportait pas d’interprétation de la loi fiscale différente de celle dont elle a fait application ; que les opérations en cause n’entrant pas dans le champ d’application du paragraphe 1 de la documentation administrative de base 5 G-4531 dans sa version du 17 juin 1991 qui porte sur les opérations réalisées en bourse, la cour n’a pas commis d’erreur de droit ni dénaturé ces dispositions en jugeant que les époux G. ne pouvaient s’en prévaloir sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

Sur les conclusions dirigées contre l’arrêt de la cour en tant qu’il statue sur le litige relatif à l’année 1995 :

Considérant que la cour a omis de répondre au moyen tiré de ce que l’administration fiscale devait, d’une part, émettre un avis de dégrèvement de l’imposition primitive correspondant à la plus-value imposée à tort en 1995 et, d’autre part, établir une imposition supplémentaire correspondant aux rehaussements des revenus de capitaux mobiliers notifiés au titre de la même année ; que M. et Mme G. sont fondés à demander sur ce point l’annulation de l’arrêt attaqué ;

Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu, en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l’affaire au fond dans la limite de l’annulation prononcée par la présente décision ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre :

Considérant que la réclamation de M. et Mme G., introduite le 12 avril 2001, n’était pas tardive dès lors que le dégrèvement partiel du 10 février 2000, dont le montant tient compte de la compensation opérée par l’administration, doit être regardé, en l’absence de toute émission de rôle supplémentaire au titre des rehaussements opérés au titre de l’année 1995, comme constituant un événement au sens du c de l’article R. 196-1 du livre des procédures fiscales et que le délai de réclamation expirait en conséquence le 31 décembre 2002 ;

Sur les moyens de la requête :

Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l’administration fiscale pouvait, à l’issue du contrôle sur pièces auquel elle a procédé, compenser le dégrèvement effectué sur le fondement de l’article R. 211-1 du livre des procédures fiscales portant sur l’imposition correspondant à la plus-value avec les impositions résultant des redressements opérés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et n’émettre qu’un avis de dégrèvement partiel de la cotisation primitive d’impôt sur le revenu de l’année 1995 ;

Considérant que le moyen tiré de la prescription du recouvrement est inopérant s’agissant d’un litige relatif à l’assiette de l’imposition ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. et Mme G. ne sont pas fondés à se plaindre du rejet par le tribunal administratif de leur demande en tant qu’elle se rapporte à l’année 1995 ;

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative s’opposent à ce que l’Etat, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à M. et Mme G. la somme qu’ils réclament sur ce fondement ;

D E C I D E :

Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes du 2 mai 2006 est annulé en tant qu’il statue sur le litige relatif à l’année 1995.

Article 2 : Les conclusions de la requête d’appel de M. et Mme G. en tant qu’elles portent sur le litige relatif à l’année 1995 et le surplus des conclusions de leur pourvoi devant le Conseil d’Etat sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Yves G. et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

 


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