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Conseil d’Etat, 9 juillet 2008, n° 295464, Société Duho Immobilier

Ni ces dispositions, ni celles de l’article 8 de la même loi, précisant les activités incompatibles avec la qualité de membre de l’ordre des géomètres-experts, n’interdisent qu’un géomètre-expert puisse se voir confier une mission de maîtrise d’œuvre d’une opération d’aménagement foncier, et notamment d’un lotissement.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 295464

SOCIETE DUHO IMMOBILIER

M. Richard Senghor
Rapporteur

M. Yann Aguila
Commissaire du gouvernement

Séance du 28 mai 2008
Lecture du 9 juillet 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 6ème et 1ère sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 6ème sous-section de la section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 juillet et 17 novembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la SARL DUHO IMMOBILIER, dont le siège social est 13, rue Pasteur à Metz (57000) ; la SARL DUHO IMMOBILIER demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir la décision du 17 mai 2006 par laquelle le conseil supérieur de l’ordre des géomètres-experts a rejeté sa requête tendant à l’annulation de la décision du conseil régional de Strasbourg, en date du 3 janvier 2006, procédant au classement de la plainte qu’elle avait formée à l’encontre de M. Jean-Luc B., géomètre-expert à Thionville ;

2°) de mettre à la charge du conseil supérieur de l’ordre des géomètres-experts une somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 46-942 du 7 mai 1946 ;

Vu le décret n° 96-478 du 31 mai 1996 ;

Vu le code de l’urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Richard Senghor, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la SARL DUHO IMMOBILIER et de Me Copper-Royer, avocat du conseil supérieur de l’Ordre des géomètres-experts, les conclusions de M. Yann Aguila, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par une lettre en date du 18 mars 2005, la SARL DUHO IMMOBILIER a saisi le président du conseil régional de Strasbourg de l’ordre des géomètres-experts d’une plainte dirigée contre M. B., géomètre-expert, qu’elle avait chargé de la maîtrise d’œuvre d’une opération de lotissement, en soutenant qu’il aurait commis plusieurs manquements aux obligations de sa profession ; que, par décision du 10 octobre 2005, le conseil régional, siégeant en formation administrative, a refusé de donner suite à sa plainte ; que la société requérante demande l’annulation de la décision du 17 mai 2006 par laquelle le conseil supérieur de l’ordre des géomètres-experts, statuant sur son recours, a confirmé le classement de sa plainte ;

Considérant qu’aux termes de l’article 92 du décret du 31 mai 1996 portant règlement de la profession de géomètre-expert et code des devoirs professionnels : " le président du conseil régional, soit de sa propre initiative, soit à la demande du commissaire du Gouvernement ou de son délégué ou sur la plainte de toute personne intéressée, procède ou fait procéder à une enquête par un membre de l’ordre désigné à cet effet.(.). / La comparution devant le conseil régional siégeant en formation disciplinaire est obligatoire si elle est demandée par le président du conseil régional ou le commissaire du Gouvernement ou son délégué. Dans les autres cas, le président du conseil régional saisit ce dernier de l’affaire. Le conseil régional décide alors soit de classer l’affaire, soit de prononcer le renvoi devant la formation disciplinaire (.)" ; qu’il résulte de ces dispositions que, lorsqu’à la suite d’une plainte déposée contre un géomètre-expert, le président du conseil régional de l’ordre, le commissaire du gouvernement ou son délégué ne demandent pas la comparution de l’intéressé devant le conseil régional siégeant en formation disciplinaire, le conseil régional siégeant en formation administrative est compétent pour prendre la décision de classer l’affaire ou de la renvoyer devant la formation disciplinaire ; que, par suite, le moyen tiré de l’incompétence du conseil régional de Strasbourg siégeant en formation administrative pour prendre la décision de classement du 10 octobre 2005 doit être écarté ; qu’aux termes du quatrième alinéa de l’article 23 de la loi du 7 mai 1946 : " Les décisions du conseil régional sont susceptibles d’appel devant le conseil supérieur dans le délai prévu à l’article 20 " ; que le conseil supérieur, saisi d’un appel contre la décision de classement de l’affaire prise par le conseil régional en formation administrative, était tenu de se réunir lui-même en formation administrative ; que, par suite, le moyen tiré de l’incompétence du conseil supérieur siégeant en formation administrative pour prendre la décision attaquée, doit aussi être écarté ;

Considérant que la décision attaquée précise les considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde ; que moyen tiré de ce que le conseil supérieur de l’ordre des géomètres-experts aurait insuffisamment motivé sa décision, doit ainsi, en tout état de cause, être écarté ;

Considérant qu’aux termes de l’article 1er de la loi du 7 mai 1946 : " Le géomètre-expert est un technicien exerçant une profession libérale qui, en son propre nom et sous sa responsabilité personnelle : (.) 2° Réalise les études, les documents topographiques, techniques et d’information géographique dans le cadre des missions publiques ou privées d’aménagement du territoire, procède à toutes opérations techniques ou études sur l’évaluation, la gestion ou l’aménagement des biens fonciers " ; que ni ces dispositions, ni celles de l’article 8 de la même loi, précisant les activités incompatibles avec la qualité de membre de l’ordre des géomètres-experts, n’interdisent qu’un géomètre-expert puisse se voir confier une mission de maîtrise d’œuvre d’une opération d’aménagement foncier, et notamment d’un lotissement ; que, par suite, le conseil supérieur n’a pas commis d’erreur de droit en écartant l’allégation de la société requérante selon laquelle la loi du 7 mai 1946 ne permettait pas à un géomètre-expert d’exécuter une telle mission ;

Considérant que, si la requérante a produit une ordonnance du 7 janvier 2008 du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Thionville enjoignant à M. B. de produire l’original ou la copie certifiée conforme de son attestation d’assurance au titre de l’année 1999, il ne ressort pas des pièces du dossier que le conseil supérieur de l’ordre des géomètres-experts a commis une erreur matérielle en estimant qu’il n’y avait pas lieu de sanctionner un manquement à l’obligation d’assurance ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les conclusions de la SARL DUHO IMMOBILIER tendant à l’annulation de la décision attaquée doivent être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu’en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la société requérante une somme de 2 500 euros qu’elle versera au conseil supérieur de l’ordre des géomètres-experts au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL DUHO IMMOBILIER est rejetée.

Article 2 : La SARL DUHO IMMOBILIER versera au conseil supérieur de l’ordre des géomètres-experts une somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SARL DUHO IMMOBILIER et au conseil supérieur de l’ordre des géomètres-experts.

 


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