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Conseil d’Etat, 20 février 2008, n° 286505, Mylène le H. et Jean-Michel F.

La présomption légale instituée par cette disposition s’applique à la relation de cause à effet entre une transfusion sanguine et la contamination par le virus de l’hépatite C ultérieurement constatée mais ne concerne pas l’existence même de la transfusion. Il incombe donc au demandeur d’établir l’existence de la transfusion qu’il affirme avoir subie conformément aux règles de droit commun gouvernant la charge de la preuve devant le juge administratif. Cette preuve peut être apportée par tout moyen et est susceptible de résulter, notamment dans l’hypothèse où les archives de l’hôpital ou du centre de transfusion sanguine ont disparu, de témoignages et d’indices concordants dont les juges du fond apprécient souverainement la valeur.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 286505

Mme LE H.
M. F.

M. Philippe Ranquet
Rapporteur

M. Terry Olson
Commissaire du gouvernement

Séance du 4 février 2008
Lecture du 20 février 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 5ème et 4ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 5ème sous-section de la section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 octobre 2005 et 28 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour Mme Mylène LE H. et M. Jean-Michel F. ; Mme LE H. et M. F. demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt du 6 juillet 2005 par lequel la cour administrative d’appel de Paris a rejeté leur appel contre le jugement du 3 septembre 2002 du tribunal administratif de Paris rejetant leur demande de condamnation de l’Etablissement français du sang, venant aux droits de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, à verser 155 441, 75 euros à Mme LE H. et 15 244, 90 euros à M. F. en réparation des préjudices subis du fait de la contamination de Mme LE H. par le virus de l’hépatite C ;

2°) réglant l’affaire au fond, de condamner l’Etablissement français du sang à verser à Mme LE H. la somme de 559 705 euros augmentée des intérêts légaux et à M. F. la somme de 30 000 euros ;

3°) de mettre à la charge de l’Etablissement français du sang la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Ranquet, Auditeur,

- les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de Mme LE H. et de M. F. et de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l’Etablissement français du sang,

- les conclusions de Terry Olson, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme LE H. a appris en 1996 sa contamination par le virus de l’hépatite C ; qu’elle a imputé cette contamination à des transfusions sanguines qu’elle aurait reçues lors de ses accouchements par césarienne en octobre 1981, septembre 1984 et février 1988 au centre hospitalier Rothschild dépendant de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris ; qu’elle-même et son époux, M. F., ont demandé sans succès au tribunal administratif de Paris de condamner l’Etablissement français du sang, venu aux droits de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris pour ses activités transfusionnelles, à réparer les conséquences de la contamination ; que les intéressés se pourvoient en cassation contre l’arrêt par lequel la cour administrative d’appel de Paris a confirmé la décision des premiers juges ;

Considérant que l’article 102 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé dispose que : " En cas de contestation relative à l’imputabilité d’une contamination par le virus de l’hépatite C antérieure à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n’est pas à l’origine de la contamination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Le doute profite au demandeur. (.) " ; que la présomption légale instituée par cette disposition s’applique à la relation de cause à effet entre une transfusion sanguine et la contamination par le virus de l’hépatite C ultérieurement constatée mais ne concerne pas l’existence même de la transfusion ; qu’il incombe donc au demandeur d’établir l’existence de la transfusion qu’il affirme avoir subie conformément aux règles de droit commun gouvernant la charge de la preuve devant le juge administratif ; que cette preuve peut être apportée par tout moyen et est susceptible de résulter, notamment dans l’hypothèse où les archives de l’hôpital ou du centre de transfusion sanguine ont disparu, de témoignages et d’indices concordants dont les juges du fond apprécient souverainement la valeur ;

Considérant qu’il résulte de ce qui vient d’être dit que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la cour administrative d’appel de Paris n’a pas commis d’erreur de droit en ne mettant pas en œuvre, pour déterminer si Mme LE H. avait subi des transfusions sanguines à l’occasion de l’une des interventions pratiquées à l’hôpital Rothschild, le régime de présomption prévu par l’article 102 de la loi du 4 mars 2002 ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le dossier médical relatif à l’intervention pratiquée en octobre 1981 avait été détruit lors d’une inondation ; que les intéressés affirmaient qu’une transfusion avait alors été effectuée et produisaient deux attestations d’amis, établies en 2000 et 2001 ; qu’ils relevaient qu’une transfusion était mentionnée dans des documents médicaux ultérieurs ; que l’expert estimait très vraisemblable l’origine transfusionnelle de la contamination, eu égard notamment à l’époque à laquelle elle s’était produite et à l’absence d’autre facteur de risque ; que la cour a discuté la valeur de l’ensemble de ces éléments ; qu’en estimant qu’ils ne suffisaient pas à établir qu’une transfusion avait bien été pratiquée en 1981, elle a porté une appréciation souveraine qui n’est pas entachée de dénaturation ;

Considérant qu’il ressort par ailleurs du dossier soumis aux juges du fond que si des produits sanguins avaient été prescrits et livrés à l’intention de Mme LE H. à la veille des interventions de 1984 et 1988, les comptes-rendus opératoires ne mentionnaient pas qu’ils lui auraient été effectivement administrés ; que la cour n’a pas dénaturé ces éléments en estimant qu’il n’était pas établi que l’intéressée aurait subi des transfusions sanguines à ces occasions ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que Mme LE H. et M. F. ne sont pas fondés à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ;

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les frais exposés par les requérants et non compris dans les dépens soient mis à la charge de l’Etablissement français du sang, qui n’est pas la partie perdante ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme LE H. et de M. F. est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Mylène LE H. et à M. Jean-Michel F., à l’Etablissement français du sang et à la caisse primaire d’assurance maladie du Morbihan.

Copie en sera adressée au ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

 


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