TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE NANTES
N° 97.2530
SOCIETE ANONYME MECATLANTIC c/ M. le directeur du contrôle fiscal Ouest Divion 4
M. Hervouet, Rapporteur
M. Pouget, Commissaire du gouvernement
Audience du 15 juin 2001
Lecture du 18 juillet 2001
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête enregistrée au greffe du tribunal administratif le 25 juillet 1997, sous le n° 97.2530, présentée par la SOCIETE ANONYME MECATLANTIC, dont le siège est 91 quai Emile Cormerais - 44800 Saint-Herblain, par Me Cabanne, avocat à La Roche sur Yon ;
La SOCIETE ANONYME MECATLANTIC demande au Tribunal de prononcer :
la décharge des cotisations à l’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1992, 1993 et 1994, sous les articles n°s 60478, 60479 et 60480, mises en recouvrement le 30 novembre 1996 et des pénalités dont elles ont été assorties ;
le sursis de paiement des impositions en litige ;
Vu la décision par laquelle le directeur régional des impôts des Pays de la Loire a statué sur la réclamation préalable de la SOCIETE ANONYME MECATLANTIC ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la loi n° 75-619 du 11 juillet 1975 relative au taux de l’intérêt légal, modifiée par la loi n° 89-421 du 23 juin 1989
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience publique ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 15 juin 2001 le rapport de M. Hervouet, conseiller, et les conclusions de M. Pouget, faisant fonction de commissaire du gouvernement
Considérant qu’à la suite d’une vérification de comptabilité, l’administration a remis en cause l’exonération d’impôt sur les sociétés dont la SOCIÉTÉ ANO MECATLANTIC avait bénéficié au titre du régime des entreprises nouvelles en application de l’article 44 sexies du code général des impôts pour les années 1992, 1993 et 1994, que le service a considéré que la création de cette entreprise correspondait en fait à l’extension de l’activité préexistante du groupe "Adrien" ;
Sur la demande de sursis de paiement :
Considérant que la présente décision se prononce sur le fond de l’affaire ; que les conclusions de la requête tendant au sursis de paiement des impositions contestées se trouvent donc privées d’objet ;
Sur les conclusions en décharge :
Considérant qu’aux termes de l’article 44 sexies du code général des impôts "I. Les entreprises créées à compter du 1er octobre 1988 jusqu’au 31 décembre 1994 soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d’imposition de leurs résultats et qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l’articlie 34 sont exonérées d’impôt sur le revenu ou d’impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés jusqu’au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création et déclarés selon les modalités prévues à l’article 53 A. Les bénéfices ne sont soumis à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés que pour le quart, la moitié ou les trois quarts de leur montant selon qu’ils sont réalisés respectivement au cours de la première, de la seconde ou de la troisième période de douze mois suivant cette période d’exonération. (... ) III. Les entreprises créées dans le cadre d’une concentration, d’une restructuration, d’une extension d’activités préexistantes ou qui reprennent de telles activités ne peuvent pas bénéficier du régime défini au I" ; que l’extension d’activités préexistantes se caractérise comme la création d’une entreprise privée de toute autonomie réelle et qui constitue la simple émanation d’une entreprise préexistante ; que cette réalité s’apprécie à partir de deux critères, à savoir une similitude ou une complémentaàté d’activité entre l’entreprise ancienne et l’entreprise nouvelle, d’une part, et l’existence de liens de dépendance entre les deux entreprises, d’autre part ;
Considérant, en premier lieu, qu’il est constant que le groupe "Adrien", par sa holding de tête, la société "Sophimar", ou par l’intermédiaire de ses filiales, est présent sur l’ensemble de la filière pêche, de la pêche elle-même par l’exploîtation de plus de 15 chalutiers en Afrique, au conditionnement et à la distribution des produits de la mer, en passant par la vente en gros de poissons et crustacés ; qu’il exerce également, à travers sa filiale "Nanfourma", la réparation et la mécanique maritime , qu’aiinsi, la SOCIETÉ ANONYME MECATLANTIC, dont l’activité effective est la réparation et la mécanique maritime pour les chalutiers, sabliers et remorqueurs en France et à l’étranger, le négoce de pièces pour la mécanique maritime au Sénégal et au Pérou, et le montage de groupes électrogènes pour l’activité maritime, et qu’elle soutient elle-même être identique à celle de l’une des sociétés du groupe, doit être regardée comme à la fois identique et complétant celle du groupe "Adrien" ;
Considérant en second lieu, que si la famille "Adrien" ne possède, à travers la société de droit sénégalais "Sopasen Dakar", que 24,97 % de la SOCIÉTÉ ANONYME MECATLANTIC, et que le reste du capital est détenu par des actionnaires sans lien avec le groupe "Adrien", les dirigeants dudit groupe, à travers M. Adrien lui-même et une société du groupe, occupent deux des trois postes d’administrateur de la société requérante ; que la société nouvelle a opté pour un papier à en-téte comportant le logo de la société pré-existante "Sophima" ; que la société "Sophimar" est, moyennant rémunération, intervenue sur les plans administratif, financier et informatique, dans le fonctionnement de la société nouvelle au cours des exercices clos en 1992, 1993 et 1994 , qu’il résulte de l’instruction que, le 22 mars 1994, le Conseil d’administration de MECATLANTIC a décidé de contracter un emprunt de 500.000 F au Crédit industriel de l’Ouest, dont il était alors convenu que les intérêts devaient être pris en charge par "Sophimar" ; que le chiffre d’affaires de la SOCIÉTÉ ANONYME MECATLANTIC a été réalisé à concurrence de 59% avec le groupe "Sophimar" en 1991, 30% en 1992. 37% en 1993 et 22% en 1994 ; que la requérante a été à l’origine de plus de 20% du chiffre d’affaires 1994 de "Arcopa", société du groupe "Sophimar" ; qu’elle a bénéficié, en 1993, des moyens promotionnels du groupe "Adrien" pour sa participation, avec d’autres sociétés du groupe, au Vendée Globe Challenge, opération organisée par le groupe "Adrien" ; que certaines livraisons d’immobilisations acquises par elle ont été effectuées dans des sociétés du groupe ; que ce faisceau d’indices démontre l’existence de liens de dépendance entre les deux entreprises ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que c’est à bon droit que l’administration fiscale a estimé que la SOCIETE ANONYME MECATLANTIC constitue une extension de l’activité du groupe "Adrien" ; que, dès lors, les conclusions en décharge doivent être rejetées ;
Sur les intérêts de retard :
Considérant qu’aux termes de l’article 1727 du code général des impôts : "Le défaut ou l’insuffisance dans le paiement ou le versement tardif de l’un des impôts, droits, taxes, redevances ou somnies établis ou recouvrés par la direction générale des impôts donnent lieu au versement d’un interét de retard qui est dû indépendamment de toutes sanctions, (... ). Le taux de l’intérêt de retard est fixé à 0,75 % par mois, Il s’applique sur le montant des sommes mises à la charge du contribuable ou dont le versement a été différé"
Considérant qu’aux termes de l’article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 "Les personnes physiques ou morales ont le droit d’être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent" et qu’aux termes de l’article 42 de la loi du 30 décembre 1986, portant loi de finances pour 1987 repris à l’article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " 1°) Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 (... ) quand un document ou une décision adressé au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait a porté la motivation à la connaissance du contribuable (... )" ; que l’intérêt de retard prévu par l’article 1727 du code général des impôts n’est pas au nombre des sanctions auxquelles s’appliquent ces dispositions, en tant qu’il constitue une réparation pécuniaire pour l’État, privé d’une ressource ; que, toutefois, lorsque l’application dudit intérêt conduit le service à infliger au contribuable une pénalité d’un montant supérieur au préjudice subi par l’État du fait du retard pris pour liquider les impositions dont il est redevable, la partie de ladite pénalité qui dépasse ce préjudice doit être regardée, non comme une simple réparation pécuniaire, mais comme une sanction, et doit, par suite, être motivée ;
Considérant que la société requérante soutient que le préjudice pécuniaire de l’Etat en cas de retard pris pour la liquidation de l’impôt du fait d’un contribuable doit être calculé par référence au taux de l’intérêt légal ; que le service n’allègue pas que ledit taux, qui, aux termes de la loi n° 75-619 du 11 juillet 1975 relative au taux de l’intérêt légal, modifiée par la loi n° 89-421 du 23 juin 1989, est égal à la moyenne arithmétique des douze dernières moyennes mensuelles des taux de rendement actuariel des adjudications de bons du Trésor à taux fixe à treize semaines, n’est pas représentatif du préjudice susmentionné ; que, par suite, et dès lors qu’il est constant que le service s’est abstenu, dans la notification de redressements, de motiver les intérêts de retard mis à la charge de la SOCIETE ANONYME MECATLANTIC, celle-ci est fondée à demander que cette pénalité soit réduite au montant de celle qui résulte de l’application, aux cotisations à sa charge, du taux de l’intérêt légal ;
D E C I D E :
Article 1er : Les pénalités de retard mises à la charge de la SOCIETE ANONYME MECATLANTIC sont réduites, le cas échéant, aux montants qui résultent de l’application du taux de l’intérêt légal.
Article 2 : La SOCIETE ANONYME MECATLANTIC est déchargée de la différence entre les pénalités mises à sa charge et celles qui résultent de l’application de l’article 1er.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.