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Conseil d’Etat, 19 mars 2008, n° 296679, Garde des Sceaux, Ministre de la justice c/ M. M.

Lle droit à validation des services effectués en qualité de non titulaire n’est, en principe, ouvert à l’agent que dans un délai de deux ans après la titularisation. Il en va cependant autrement lorsque la validation des services dont il s’agit serait rendue possible en raison d’une modification du droit résultant d’un texte intervenu postérieurement à l’expiration de ce délai, sous réserve de ce qu’aucune disposition de ce texte ne prévoit de délai particulier pour l’exercice du droit à validation ainsi ouvert. En l’absence de délai particulier, l’agent auquel sa pension a été concédée peut, dans le délai d’un an fixé par l’article L. 55, demander la révision de sa pension pour erreur de droit, afin que soient pris en compte les services dont la validation a été rendue possible, et sans que puisse lui être opposé le délai de deux ans prévu à l’article L. 5 .

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 296679

GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE
c/ M. M.

M. Philippe Barbat
Rapporteur

M. Rémi Keller
Commissaire du gouvernement

Séance du 3 mars 2008
Lecture du 19 mars 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 4ème et 5ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 4ème sous-section de la section du contentieux

Vu le recours, enregistré le 22 août 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présenté par le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ; le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler le jugement du 22 juin 2006 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis-de-La-Réunion, d’une part, a annulé ses décisions des 23 janvier 1989 et 23 juin 2005 en tant qu’elles refusent la validation des services accomplis par M. Marie-David M. en qualité d’agent public non titulaire dans des administrations et établissements publics de l’Etat, d’autre part, lui a enjoint de procéder à la validation des services à temps incomplet accomplis par l’intéressé en qualité d’agent public non titulaire dans des établissements d’enseignement secondaire pour la période du 3 décembre au 22 août 1977 et du 14 septembre 1977 au 13 septembre 1978 et des services effectués en qualité de vacataire dans des juridictions pour la période du 22 janvier 1979 au 31 mai 1980, enfin mis à la charge de l’Etat la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande de M. M. ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu les arrêtés du 26 août 1927 et du 4 août 1977 relatifs à la validation de certains services effectués par les agents non titulaires de l’Etat et des ses établissements publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Barbat, Auditeur,

- les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. M.,

- les conclusions de M. Rémi Keller, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’aux termes de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 5 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Peuvent également être pris en compte pour la constitution du droit à pension, les services d’auxiliaire, de temporaire, d’aide ou de contractuel (.) accomplis dans les administrations centrales de l’Etat, les services extérieurs en dépendant et les établissements publics de l’Etat ne présentant pas un caractère industriel et commercial, si la validation des services de cette nature a été autorisée pour cette administration par un arrêté conjoint du ministre intéressé et du ministre des finances (.) " ; qu’aux termes de l’article R. 7 du même code : " Dans chaque ministère, des arrêtés conjoints du ministre intéressé, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé des finances déterminent la nature et le point de départ des services susceptibles d’être validés pour la retraite en application de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 5 " :

Considérant qu’il résulte de ces dispositions que le tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que les services effectués par M. M. en qualité d’agent non titulaire ouvraient droit à pension, sans rechercher l’existence d’un arrêté autorisant leur validation ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le ministre de la justice est fondé à demander l’annulation du jugement attaqué ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de régler l’affaire au fond en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. M. a été titularisé en 1981 en qualité de greffier des services judiciaires ; qu’il a demandé en 1982 à l’administration de prendre en compte, pour son droit à pension, certains services qu’il avait effectués avant sa titularisation ; que, par une décision du 23 janvier 1989, le ministre de la justice, tout en faisant partiellement droit à la demande de M. M., a refusé de valider les services qu’il avait accomplis en qualité de maître d’internat à temps incomplet à Angers et à Saumur, puis en qualité de stagiaire aux tribunaux de grande instance du Mans et de Saint-Denis-de-La-Réunion ; que M. M. a été admis à faire valoir ses droits à la retraite au 1er avril 2005 ; que, le 4 avril 2005, il a demandé la révision de sa pension afin que soient pris en compte les services dont la validation lui avait été refusée en 1989 ; que les conclusions de première instance de M. M. doivent regardées comme dirigées contre la décision du 23 juin 2005 par laquelle le ministre de la justice a rejeté sa demande de révision de sa pension ;

Considérant que l’article L. 5 du code des pensions civiles et militaires de retraite dispose que la validation des services accomplis en qualité de non titulaire doit être demandée "dans les deux années qui suivent la date de la titularisation (.). / Le délai dont dispose l’agent pour accepter ou refuser la notification de validation est d’un an" ; que l’article D. 2 du même code précise que l’acceptation ou le refus, par l’agent, de la décision de l’administration "sont irrévocables" ; qu’aux termes de l’article L. 55 du même code : "La pension et la rente viagère d’invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l’initiative de l’administration ou sur demande de l’intéressé que dans les conditions suivantes : / A tout moment en cas d’erreur matérielle ; / Dans un délai d’un an à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère, en cas d’erreur de droit. (.)" ;

Considérant qu’il résulte de ces dispositions que le droit à validation des services effectués en qualité de non titulaire n’est, en principe, ouvert à l’agent que dans un délai de deux ans après la titularisation ; qu’il en va cependant autrement lorsque la validation des services dont il s’agit serait rendue possible en raison d’une modification du droit résultant d’un texte intervenu postérieurement à l’expiration de ce délai, sous réserve de ce qu’aucune disposition de ce texte ne prévoit de délai particulier pour l’exercice du droit à validation ainsi ouvert ; qu’en l’absence de délai particulier, l’agent auquel sa pension a été concédée peut, dans le délai d’un an fixé par l’article L. 55, demander la révision de sa pension pour erreur de droit, afin que soient pris en compte les services dont la validation a été rendue possible, et sans que puisse lui être opposé le délai de deux ans prévu à l’article L. 5 ;

Considérant que la validation des services de maître d’internat dans les établissements publics d’enseignement a été autorisée par l’arrêté modifié du 26 août 1927 ; que si cet arrêté ne prévoyait que la validation des services effectués à temps complet, l’arrêté du 24 janvier 2005 rend désormais possible, à compter de la date de son entrée en vigueur et sans restriction de délai, la validation de tout service effectué à temps incomplet dans les administrations de l’Etat et les établissements publics n’ayant pas un caractère industriel et commercial, dès lors qu’un texte antérieur a autorisé la validation des mêmes services accomplis à temps complet ; qu’ainsi ces services ouvraient droit à pension ;

Considérant que la validation des services accomplis en qualité de "vacataire" dans les services centraux et extérieurs du ministère de la justice a été autorisée par l’arrêté du 4 août 1977 ; qu’aux termes de l’article R. 7 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction issue du décret du 26 décembre 2003, peut désormais être validée "toute période de services effectués (.) quelle qu’en soit la durée, en qualité d’agent non titulaire de l’un des employeurs mentionnés au 1°, 2e et 3e de l’article L. 86-1" ; que le 1° de l’article L. 86-1 de ce code se rapporte aux administrations de l’Etat et à leurs établissements publics ne présentant pas un caractère industriel ou commercial ; qu’il suit de là que les fonctions exercées par M. M. aux tribunaux de grande instance du Mans et de Saint-Denis-de-La-Réunion en qualité de "stagiaire", qui ont donné lieu au paiement de vacations, ouvrent droit à pension, quel que soit l’intitulé qui avait alors été donné à ces fonctions ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la décision du ministre de la justice du 23 juin 2005 rejetant la demande de révision de pension, présentée par M. M. dans le délai d’un an prescrit par la loi afin de tenir compte des services mentionnés ci-dessus, est entachée d’illégalité ; que, dès lors, M. M. est fondé à demander l’annulation de la décision du 23 juin 2005, en tant qu’elle lui refuse la validation de ses services accomplis en qualité d’agent non titulaire et, par voie de conséquence, à ce qu’il soit enjoint au GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE, de procéder à la validation des services susmentionnés et à la révision, à cette fin, de sa pension ;

Considérant qu’il y a lieu, en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par M. M. et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 22 juin 2006 du tribunal administratif de Saint-Denis-de-La-Réunion et la décision du 23 juin 2005 du ministre de la justice sont annulés.

Article 2 : Le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE procèdera à la révision de la pension de M. M. conformément aux motifs de la présente décision.

Article 3 : L’Etat versera à M. M. une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE et à M. Marie-David M..

 


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