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S’il est constant que l’ouvrage incriminé comprend des passages à caractère pornographique ou pédophile et fait une large place au crime et à la violence, il ne ressort pas des pièces du dossier, en l’absence de circonstances particulières alléguées par l’association requérante s’agissant notamment des conditions de diffusion de cette publication, que celle-ci présenterait, pour la jeunesse, un danger d’une gravité telle que le ministre de l’intérieur aurait commis une erreur manifeste d’appréciation des circonstances de l’espèce en s’abstenant de faire usage des pouvoirs qu’il tient des dispositions de l’article 14 de la loi du 16 juillet 1949.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 254788

ASSOCIATION PROMOUVOIR

M. Larrivé
Rapporteur

Mme Boissard
Commissaire du gouvernement

Séance du 18 février 2004
Lecture du 10 mars 2004

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 10ème et 9ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 10ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête, enregistrée le 6 mars 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par l’ASSOCIATION PROMOUVOIR, dont le siège est B.P. 23 à Carpentras Cedex (84201) ; l’ASSOCIATION PROMOUVOIR demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales a rejeté sa demande tendant à ce que soit prononcée, sur le fondement de l’article 14 de la loi du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse, l’interdiction de la vente aux mineurs de l’ouvrage intitulé "Il entrerait dans la légende", publié par la SARL "Editions Léo Scheer" sous la signature de M. Louis Skorecki ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat, ainsi que de la SARL "Editions Léo Scheer", la somme de 1 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 février 2004, présentée par l’ASSOCIATION PROMOUVOIR ;

Vu la loi n° 49-956 du 16 juillet 1949 modifiée, sur les publications destinées à la jeunesse ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Larrivé, Auditeur,
- les conclusions de Mme Boissard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’aux termes de l’article 14 de la loi du 16 juillet 1949 modifiée : "le ministre de l’intérieur est habilité à interdire de proposer, de donner ou de vendre à des mineurs de dix-huit ans les publications de toute nature présentant un danger pour la jeunesse en raison de leur caractère licencieux ou pornographique, ou de la place faite au crime ou à la violence (.)" et peut, en outre, assortir cette mesure de "l’interdiction d’exposer ces publications à la vue du public (.) et de faire pour elles de la publicité par la voie d’affiches" ainsi que, le cas échéant, de l’interdiction "d’effectuer, en faveur de ces publications, de la publicité" de quelque nature que ce soit ;

Sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la SARL "Editions Léo Scheer" ;

Considérant que le ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, saisi par une lettre en date du 14 octobre 2002 par l’ASSOCIATION PROMOUVOIR d’une demande tendant à ce qu’il fasse usage des pouvoirs qu’il tient des dispositions précitées à l’égard de l’ouvrage intitulé "Il entrerait dans la légende" publié par la SARL "Editions Léo Scheer" sous la signature de M. Louis Skorecki, a rejeté implicitement cette demande ; que s’il est constant que cet ouvrage comprend des passages à caractère pornographique ou pédophile et fait une large place au crime et à la violence, il ne ressort pas des pièces du dossier, en l’absence de circonstances particulières alléguées par l’association requérante s’agissant notamment des conditions de diffusion de cette publication, que celle-ci présenterait, pour la jeunesse, un danger d’une gravité telle que le ministre de l’intérieur aurait commis une erreur manifeste d’appréciation des circonstances de l’espèce en s’abstenant de faire usage des pouvoirs qu’il tient des dispositions précitées ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’ASSOCIATION PROMOUVOIR n’est pas fondée à demander l’annulation de la décision attaquée ;

Sur les conclusions à fin d’injonction :

Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions à fin d’annulation présentées par l’ASSOCIATION PROMOUVOIR, n’appelle aucune mesure d’exécution ; que dès lors, ces conclusions ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions de l’ASSOCIATION PROMOUVOIR tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat et de la SARL "Editions Léo Scheer", qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que l’ASSOCIATION PROMOUVOIR demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l’ASSOCIATION PROMOUVOIR est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l’ASSOCIATION PROMOUVOIR, à la SARL "Editions Léo Scheer" et au ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

 


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