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Cour administrative d’appel de Bordeaux, 12 août 2003, n° 00BX02078, Jean-Pierre A.

La responsabilité de l’Etat est susceptible d’être engagée, sur le fondement de l’égalité des citoyens devant les charges publiques, pour assurer la réparation de préjudices nés de conventions conclues par la France avec d’autres Etats, et incorporées régulièrement dans l’ordre juridique interne, à la condition, d’une part, que ni la convention elle-même ni la loi qui en a éventuellement autorisé la ratification ne puissent être interprétées comme ayant entendu exclure toute indemnisation et, d’autre part, que le préjudice dont il est demandé réparation soit d’une gravité suffisante et présente un caractère spécial.

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE BORDEAUX

N° 00BX02078

M. Jean-Pierre A.

Mme Texier
Président

Mme Jayat
Rapporteur

Mme Boulard
Commissaire du Gouvernement

Arrêt du 12 août 2003

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE BORDEAUX

(3ème chambre)

Vu la requête enregistrée le 28 août 2000 au greffe de la cour administrative d’appel, présentée pour M. Jean-Pierre A. ; M. A. demande que la cour :

1) annule le jugement en date du 15 juin 2000 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l’Etat à l’indemniser du préjudice résultant de la minoration de ses droits à pension de retraite du fait de la dévaluation du franc de la Coopération financière en Afrique centrale ;

2) fasse droit à sa demande d’indemnité ;

3) et condamne l’Etat à lui verser la somme de 8 000 F au titre de l’article L 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 77-877 du 27 juillet 1977 et la convention annexée ;

Vu le décret n° 94-253 du 24 mars 1994 et la décision annexée ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel et le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 1er juillet 2003 :
- le rapport de Mme Jayat, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Boulard, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. A. a accompli une partie de sa vie professionnelle en Afrique francophone et réside désormais en France ; qu’il perçoit une retraite libellée en francs de la Coopération financière, versée par un organisme de sécurité sociale relevant d’un des Etats membres de la Banque des Etats de l’Afrique centrale ; que, par décision du 11 janvier 1994 du comité monétaire mixte chargé de mettre en œuvre la convention du 23 novembre 1972 liant les Etats membres de la Banque des Etats de l’Afrique centrale et la République française, la parité entre le franc français et le franc de la Coopération financière en Afrique centrale (franc CFA) a été fixée à 0,01 franc français pour 1 franc CFA à compter du 12 janvier 1994 au lieu de 0,02 franc français pour 1 franc CFA auparavant ; que cette décision a été mise en œuvre par les Etats concernés et qu’ainsi, la retraite perçue par le requérant ayant perdu la moitié de sa contre-valeur en francs français, son pouvoir d’achat en France a été divisé par deux ; que le requérant fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à ce que l’Etat soit condamné à réparer le préjudice résultant de la minoration de son pouvoir d’achat en France du fait de la dévaluation du franc de la Coopération financière en Afrique centrale ;

Considérant que la responsabilité de l’Etat est susceptible d’être engagée, sur le fondement de l’égalité des citoyens devant les charges publiques, pour assurer la réparation de préjudices nés de conventions conclues par la France avec d’autres Etats, et incorporées régulièrement dans l’ordre juridique interne, à la condition, d’une part, que ni la convention elle-même ni la loi qui en a éventuellement autorisé la ratification ne puissent être interprétées comme ayant entendu exclure toute indemnisation et, d’autre part, que le préjudice dont il est demandé réparation soit d’une gravité suffisante et présente un caractère spécial ;

Considérant qu’eu égard à la généralité des effets de la décision de dévaluer le franc CFA et au nombre des personnes, dont les titulaires d’une retraite libellée en francs CFA, affectées par les conséquences de cette décision, le préjudice invoqué par le requérant ne présente pas un caractère spécial ; qu’il n’incombe donc pas à l’Etat d’en assurer la réparation ; que, par suite, M. A. n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

Considérant que les dispositions de l’article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser au requérant la somme que celui-ci demande au titre dudit article ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. Jean-Pierre A. est rejetée.

 


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