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Conseil d’Etat, Avis, 11 juin 2003, n° 253465, Mme Marie-Claire M.

Les dispositions issues de la loi du 4 mars 2002 ont pour objet d’unifier les délais de prescription applicables aux accidents médicaux dans le souci de rétablir une égalité de traitement entre les victimes, que la procédure soit engagée devant le juge administratif ou devant le juge judiciaire. Faute pour le législateur d’avoir précisé les causes interruptives inhérentes au nouveau régime de prescription qu’il a institué et les cas dans lesquels la prescription ne court pas, y compris celui dans lequel le créancier peut être légitimement regardé comme ignorant l’existence de la créance, ces dispositions doivent s’entendre comme ne modifiant, pour les créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics, ni les causes interruptives prévues par la loi du 31 décembre 1968 ni les cas, prévus à l’article 3 de cette loi, dans lesquels la prescription ne court pas.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 253465

Mme M.

M. Aladjidi
Rapporteur

M. Chauvaux
Commissaire du gouvernement

Séance du 21 mai 2003
Lecture du 11 juin 2003

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 5ème et 7ème sous-section réunies)

Sur le rapport de la 5ème sous-section de la Section du contentieux

Vu, enregistré le 21 janvier 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, l’arrêt du 24 décembre 2002 par lequel la cour administrative d’appel de Lyon, avant de statuer sur la requête d’appel formée par Mme Marie-Claire M. à l’encontre du jugement du 15 mai 2001 du tribunal administratif de Dijon rejetant sa demande tendant à ce que le centre hospitalier de Tonnerre (Yonne) soit déclaré responsable du handicap dont elle reste atteinte à la suite de son hospitalisation en 1974, a décidé, par application de l’article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette requête au Conseil d’Etat en soumettant à son examen les questions suivantes :

1°) le législateur, en adoptant la loi du 4 mars 2002, s’est-il borné, pour les actions tendant à mettre en cause la responsabilité des établissements publics hospitaliers à l’occasion d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins et n’ayant pas donné lieu à une décision de justice irrévocable, à substituer rétroactivement au délai de prescription quadriennale prévu à l’article 1° de la loi du 31 décembre 1968 un délai spécial de prescription de dix ans ayant pour point de départ la consolidation du dommage ?

2°) dans l’affirmative, le régime de prescription défini par la loi du 31 décembre 1968 s’applique-t-il dans toutes ses autres dispositions, notamment en ce qui concerne : - la fixation du point de départ de la prescription au 1er janvier de l’année suivant celle au cours de laquelle est intervenu le fait générateur du dommage ; - les causes d’interruption de la prescription ; - les cas d’ignorance de la créance ?

3°) dans la négative, y-a-t-il lieu de combiner les dispositions de la loi du 4 mars 2002 soit avec celles du code civil, soit avec les principes dont ledit code s’inspire, s’agissant notamment des causes d’interruption de la prescription ?

Vu les pièces du dossier transmises par la cour administrative d’appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Aladjidi, Auditeur,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

REND L’AVIS SUIVANT :

L’article L. 1142-28 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de l’article 98 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé dispose que "les actions tendant à mettre en cause la responsabilité des professionnels de santé ou des établissements de santé publics ou privés à l’occasion d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins se prescrivent par dix ans à compter de la consolidation du dommage".

En vertu du deuxième alinéa de l’article 101 de cette loi, les dispositions précitées sont immédiatement applicables, en tant qu’elles sont favorables à la victime ou à ses ayants droit, aux actions en responsabilité, y compris aux instances en cours n’ayant pas donné lieu à une décision irrévocable.

1) Comme l’a dit le Conseil d’Etat dans l’avis n° 251980 en date du 19 mars 2003, il résulte des termes mêmes des dispositions de l’article L. 1142-28 du code de la santé publique que le législateur a entendu instituer, en matière de responsabilité médicale, une prescription décennale se substituant à la prescription quadriennale instaurée par la loi du 31 décembre 1968 pour ce qui est des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics. Il s’ensuit que sauf lorsqu’elles étaient prescrites en application de la loi du 31 décembre 1968 à la date d’entrée en vigueur de la loi du 4 mars 2002, ces créances sont prescrites à l’issue d’un délai de dix ans à compter de la date de consolidation du dommage.

2) Les dispositions précitées issues de la loi du 4 mars 2002 ont pour objet d’unifier les délais de prescription applicables aux accidents médicaux dans le souci de rétablir une égalité de traitement entre les victimes, que la procédure soit engagée devant le juge administratif ou devant le juge judiciaire. Faute pour le législateur d’avoir précisé les causes interruptives inhérentes au nouveau régime de prescription qu’il a institué et les cas dans lesquels la prescription ne court pas, y compris celui dans lequel le créancier peut être légitimement regardé comme ignorant l’existence de la créance, ces dispositions doivent s’entendre comme ne modifiant, pour les créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics, ni les causes interruptives prévues par la loi du 31 décembre 1968 ni les cas, prévus à l’article 3 de cette loi, dans lesquels la prescription ne court pas.

Le présent avis sera notifié à la cour administrative d’appel de Lyon, à Mme Marie-Claire M., au centre hospitalier de Tonnerre et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

 


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