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Conseil d’Etat, Avis, 27 Septembre 1999, M. Rouxel
La réduction du nombre de points affecté
au permis de conduire, prononcée par le ministre et qui ne peut
faire l’objet d’un relèvement judiciaire, ne constitue pas une sanction
pénale accessoire à une condamnation.
Vu, enregistré le 26 mai 1999 au secrétariat du contentieux
du Conseil d’Etat, le jugement du 19 mai 1999 par lequel le tribunal administratif
de Versailles, avant de statuer sur la demande de M. Vincent Rouxel, a
décidé, par application des dispositions de l’article 12
de la loi no 87-1127 du 31 décembre 1987 portant réforme
du contentieux administratif, de transmettre le dossier de cette demande
au Conseil d’Etat, en soumettant à son examen les questions de savoir
:
1°) Si les stipulations de l’article 6-1 de la convention européenne
de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales
sont applicables au dispositif de retrait de points instauré par
les dispositions des articles L. 11 à L. 11-7 du code la route et,
en cas de réponse positive, si ces dispositions sont compatibles
avec les exigences de l’article 6-1 de la convention ;
2°) Si les articles L. 11 à L. 11-7 du code de la route doivent
être regardés comme incompatibles avec les articles 132-17
et 132-24 du nouveau code pénal, issus de la loi du 22 juillet 1992,
et s’ils doivent en conséquence être regardés comme
ayant été abrogés par cette loi postérieure
;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme
et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, et notamment son
article 6-1 ;
Vu le code de la route, et notamment ses articles L. 11 à L.
11-7 ;
Vu le code pénal, et notamment ses articles 132-17 et 132-24
;
Vu la loi no 87-1127 du 31 décembre 1987, et notamment son article
12 ;
Vu les articles 57-11 à 57-13 ajoutés au décret
no 63-766 du 30 juillet 1963, modifié par le décret n°88-905
du 2 septembre 1988 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives
d’appel ;
Vu l’ordonnance no 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret no 53-934
du 30 septembre 1953 et la loi no 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Rend l’avis suivant :
Aux termes de l’article L. 11 du code de la route dans sa rédaction
issue de la loi du 11 juillet 1989 : « Le permis de conduire exigible
pour la conduite des véhicules automobiles terrestres à moteur
est affecté d’un nombre de points. Le nombre de ces points est réduit
de plein droit si le titulaire du permis a commis l’une des infractions
visées à l’article L. 11-1. Lorsque le nombre de points devient
nul, le permis perd sa validité. » Aux termes de l’article
R. 258 du même code, « lors de la constatation d’une infraction,
l’auteur de celle-ci est informé que cette infraction est susceptible
d’entraîner la perte d’un certain nombre de points si elle est constatée
par le paiement d’une amende forfaitaire ou par une condamnation devenue
définitive (...). Lorsque le ministre de l’intérieur constate
que la réalité d’une infraction entraînant une perte
de points est établie (...), il réduit en conséquence
le nombre de points affecté au permis de conduire de l’auteur de
cette infraction ». Cette réduction est effectuée selon
le barème établi, en fonction de la gravité des infractions
commises, à l’article R. 256.
Par ailleurs, aux termes des stipulations de l’article 6-1 de la convention
européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés
fondamentales susvisée : « Toute personne a droit à
ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans
un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial,
établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur
ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé
de toute accusation en matière pénale dirigée contre
elle (...). »
1. En premier lieu, il résulte des dispositions précitées
du code de la route que la réduction du nombre de points affecté
au permis de conduire, à la suite d’une condamnation pénale
devenue définitive ou du paiement d’une amende forfaitaire, présente
le caractère d’une punition tendant à empêcher la réitération
des agissements qu’elle vise. Ce dispositif constitue ainsi, même
si le législateur a laissé le soin à l’autorité
administrative de prononcer la sanction de réduction du nombre de
points, une « accusation en matière pénale »
au sens des stipulations de l’article 6-1 précité. Par suite,
les principes énoncés par lesdites stipulations lui sont
applicables.
Il résulte de l’ensemble des dispositions précitées
du code de la route que la décision de réduction du nombre
de points intervient seulement lorsque la réalité de l’infraction
est établie soit par le paiement de l’amende forfaitaire par le
conducteur, soit par la condamnation devenue définitive prononcée
par le juge pénal qui a statué sur tous les éléments
de fait et de droit portés à sa connaissance. En outre, les
dispositions de l’article L. 11-1 et celles de l’article 258 précitées
prévoient que le conducteur est informé par l’autorité
administrative, dès la constatation de l’infraction, de la perte
de points qu’il peut encourir. Cette perte de points directement liée
à un comportement portant atteinte aux règles de la circulation
routière, ne peut intervenir qu’en cas de reconnaissance de responsabilité
pénale, le cas échéant après appréciation
par le juge judiciaire de la réalité de l’infraction et de
son imputabilité à la demande de la personne intéressée.
Lorsque l’autorité administrative procède au retrait de points
en appliquant le barème fixé à l’article R. 256, proportionné
à la gravité des infractions commises, sa décision
est soumise au contrôle du juge administratif. Ainsi, bien qu’il
prévoie que le retrait de points est prononcé par une autorité
administrative, et compte tenu des garanties accordées à
l’auteur de l’infraction, l’ensemble des dispositions du code de la route
relatives au permis à points doit être regardé comme
respectant les stipulations de l’article 6-1 de la convention européenne
de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
2. En second lieu, la réduction du nombre de points affecté
au permis de conduire, prononcée par le ministre et qui ne peut
faire l’objet d’un relèvement judiciaire, ne constitue pas une sanction
pénale accessoire à une condamnation. Il s’ensuit que le
législateur, en décidant par la loi susvisée du 22
juillet 1992 de modifier les dispositions de l’article 132-17 du code pénal
et ainsi de supprimer les peines accessoires prononcées par le juge
pénal et attachées à une condamnation pénale,
n’a pas entendu abroger implicitement les dispositions des articles L.
11 à L. 11-7 du code de la route relatifs au permis à points,
et notamment pas les articles L. 11-4 et L. 11-6 qu’il a d’ailleurs modifiés
par la loi postérieure susvisée du 16 décembre 1992.
Le présent avis sera notifié au tribunal administratif
de Versailles, à M. Vincent Rouxel et au ministre de l’intérieur.
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