format pour impression
(imprimer)

DANS LA MEME RUBRIQUE :
Conseil d’Etat, 13 décembre 2002, n° 224713, Ministre de l’économie, des finances et de l’industrie c/ SA Garage Paty Automobiles
Conseil d’Etat, 10 octobre 2001, n° 219495, SOCIETE DES MOBILIERS URBAINS POUR LA PUBLICITE ET L’INFORMATION (SOMUPI)
Conseil d’Etat, 24 novembre 2003, n° 241664, M. et Mme Chaohong C.
Cour administrative d’appel de Bordeaux, 3 juin 2003, n° 00BX02713, Ministre de l’économie, des finances et de l’industrie c/ SA Michel Guérard Conseil
Conseil d’Etat, 4 février 2008, n° 293016, Association de l’Eglise néo-apostolique de France
Conseil d’Etat, 7 mai 2008, n° 289326, Société Steca
Conseil d’Etat, 7 novembre 2008, n° 302032, Société civile immobilière Vega Investissement
Conseil d’Etat, 25 février 2004, n° 222904, Société française de réassurances
Conseil d’Etat, 4 février 2008, n° 296651, Pierre G.
Conseil d’Etat, 3 septembre 2008, n° 278120, Société internationale Leasure SA




Conseil d’Etat, 7 août 2008, n° 283238, M. et Mme J.

Le législateur a ainsi entendu réserver le régime fiscal des sociétés de personnes à des sociétés à responsabilité limitée de famille exerçant une activité de la nature de celles qu’il a limitativement énumérées et en exclure les sociétés à responsabilité limitée de famille exerçant une activité d’une autre nature, à moins, le cas échéant, qu’une telle activité ne présente un caractère accessoire et ne constitue le complément indissociable d’une activité industrielle, commerciale ou artisanale exercée par la société.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 283238

M. et Mme J.

M. Laurent Cabrera
Rapporteur

M. Emmanuel Glaser
Commissaire du gouvernement

Séance du 9 juin 2008
Lecture du 7 août 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 3ème et 8ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 3ème sous-section de la section du contentieux

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 juillet et 28 novembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. et Mme J. ; M. et Mme J. demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt du 31 mai 2005 par lequel la cour administrative d’appel de Douai a rejeté l’appel qu’ils ont interjeté du jugement du 27 mars 2003 du tribunal administratif de Lille rejetant leurs demandes tendant à la décharge des compléments d’impôt sur le revenu auxquels ils ont été assujettis au titre des années 1993, 1994 et 1995 ;

2°) réglant l’affaire au fond, d’annuler ce jugement et de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Cabrera, Auditeur,

- les observations de la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de M. et Mme J.,

- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’aux termes de l’article 239 bis AA du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d’imposition en litige : " Les sociétés à responsabilité limitée exerçant une activité industrielle, commerciale ou artisanale, et formées uniquement entre personnes parentes en ligne directe ou entre frères et sœurs, ainsi que les conjoints, peuvent opter pour le régime fiscal des sociétés de personnes mentionné à l’article 8 (.) " ; que le législateur a ainsi entendu réserver le régime fiscal des sociétés de personnes à des sociétés à responsabilité limitée de famille exerçant une activité de la nature de celles qu’il a limitativement énumérées et en exclure les sociétés à responsabilité limitée de famille exerçant une activité d’une autre nature, à moins, le cas échéant, qu’une telle activité ne présente un caractère accessoire et ne constitue le complément indissociable d’une activité industrielle, commerciale ou artisanale exercée par la société ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SARL Verofrane, que M. et Mme J. ont constituée le 14 décembre 1993 et dont ils détiennent ensemble la totalité du capital, a opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes sur le fondement de l’article 239 bis AA du code général des impôts ; que l’administration a remis en cause le bénéfice de l’option de la SARL Verofrane pour le régime fiscal des sociétés de personnes et en a tiré les conséquences sur les revenus de M. et Mme J. en y réintégrant les montants des déficits enregistrés par la SARL que les contribuables avaient déduits au titre des années 1993, 1994 et 1995 et en mettant à leur charge les compléments d’impôts sur le revenu litigieux ;

Considérant que, par l’arrêt attaqué, la cour administrative d’appel de Douai a relevé que la SARL Verofrane s’était bornée, au cours de ces mêmes années, à prendre une participation dans le capital d’une société en nom commercial exploitant une résidence pour personnes âgées et avait ajouté à cette activité de nature civile une activité commerciale de location de mobilier à cette dernière société ; qu’ayant estimé que cette dernière circonstance ne permettait pas de qualifier de commerciale l’ensemble de l’activité de la SARL, elle en a déduit que le tribunal n’avait pas commis d’erreur de droit en jugeant bien fondées les impositions litigieuses résultant de la remise en cause du bénéfice de l’option de la SARL Verofrane pour le régime des sociétés de personnes ; qu’en jugeant ainsi qu’une telle option n’était ouverte qu’aux sociétés à responsabilité limitée familiales dont l’activité était exclusivement industrielle, commerciale ou artisanale, la cour a commis une erreur de droit ; que M. et Mme J. sont donc fondés à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ;

Considérant qu’il y a lieu, en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l’affaire au fond ;

Considérant en premier lieu que l’administration, qui n’a nullement regardé comme fictive l’activité de location de la SARL, ni soutenu être en présence d’un quelconque montage n’ayant d’autre but que d’éluder l’impôt, n’était pas tenue, ainsi que l’ont jugé à bon droit les premiers juges, de mettre en œuvre la procédure de répression des abus de droit ;

Considérant en second lieu que la SARL Verofane, dont l’objet social est l’exploitation directe ou indirecte d’hôtels, de résidences de tourisme et d’établissements d’accueil pour personnes âgées, avait pour activité, ainsi qu’il a été dit, la simple gestion d’une participation dans la société en nom collectif Reptory, sans aucune immixtion dans l’activité de cette dernière société ; qu’une telle activité constitue une activité de nature civile ; que, si elle a par ailleurs développé une activité de location de mobilier à la SNC Reptory, une telle circonstance ne permet pas, alors même que cette activité lui a procuré l’intégralité de ses recettes, de regarder la SARL comme une société dont l’activité principale serait de nature commerciale et dont l’activité civile de gestion de participation ne serait que l’accessoire indissociable de cette activité principale ; qu’elle ne remplissait donc pas les conditions pour exercer l’option prévue par l’article 239 bis AA du code général des impôts ; que les requérants ne sauraient par ailleurs invoquer, sur le fondement des dispositions de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, une réponse ministérielle à M. Dubernard du 23 octobre 1995, dès lors que celle-ci ne concerne pas les conditions dans lesquelles une SARL familiale peut exercer l’option pour le régime fiscal des sociétés de personnes ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. et Mme J. ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande de décharge des impositions litigieuses ;

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante, la somme que demandent M. et Mme J. au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L’arrêt de la cour administrative de Douai du 31 mai 2005 est annulé.

Article 2 : La requête de M.et Mme J. devant la cour administrative d’appel de Douai ainsi que leurs conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme J. et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

 


©opyright - 1998 - contact - Rajf.org - Revue de l'Actualité Juridique Française - L'auteur du site
Suivre la vie du site