CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
N° 301719
M. et Mme B.
M. Alexandre Lallet
Rapporteur
M. Luc Derepas
Commissaire du gouvernement
Séance du 13 février 2008
Lecture du 7 mars 2008
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 1ère et 6ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 1ère sous-section de la Section du contentieux
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 février et 21 mai 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. et Mme Martial B. ; M. et Mme B. demandent au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler le jugement du 19 décembre 2006 par lequel le tribunal administratif d’Amiens a rejeté leur demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 29 mai 2004 par lequel le maire de la commune de Barzy-sur-Marne leur a délivré une autorisation de travaux pour la réalisation d’une charreterie sur un terrain situé lieudit " La Fontaine Chandelue " à Barzy-sur-Marne, en tant qu’il a assorti celle-ci de certaines prescriptions ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Barzy-sur-Marne la somme de 2 400 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l’urbanisme ;
Vu le décret n° 2001-260 du 27 mars 2001 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de M. Alexandre Lallet, Auditeur,
les observations de Me Le Prado, avocat de M. et Mme B. et de Me Hemery, avocat de la commune de Barzy-sur-Marne,
les conclusions de M. Luc Derepas, Commissaire du gouvernement ;
Sur le jugement attaqué :
Considérant, d’une part, qu’il résulte du 8° de l’article L. 123-1 du code de l’urbanisme, alors applicable, que le plan d’occupation des sols ou le plan local d’urbanisme peut fixer les emplacements réservés aux voies et ouvrages publics, aux installations d’intérêt général ainsi qu’aux espaces verts ; que l’article L. 423-1 du même code, dans sa rédaction applicable en l’espèce, dispose : " Lorsqu’un emplacement est réservé par un plan d’occupation des sols rendu public ou approuvé (.), et que la construction à édifier a un caractère précaire, le permis de construire peut exceptionnellement être accordé sur avis favorable de la collectivité intéressée à l’opération " ;
Considérant qu’il résulte de ces dispositions que, hors le cas des constructions conformes à la destination de l’emplacement réservé par un plan d’occupation des sols rendu public ou approuvé, seules les constructions présentant un caractère précaire peuvent être légalement autorisées sur un tel emplacement par un permis de construire ou, en vertu des dispositions combinées du dernier alinéa de l’article L. 422-1 et du premier alinéa de l’article L. 421-3 du même code dans leur rédaction alors en vigueur, par une autorisation de travaux, avec l’accord de la collectivité intéressée à l’opération, et que les constructions qui ne satisfont pas à ces conditions ne peuvent légalement être édifiées qu’à l’extérieur de l’emprise de l’emplacement réservé ; que, dans ce dernier cas, il appartient à l’autorité compétente qui entend autoriser une telle construction de prescrire son édification à une distance minimale de la limite séparative suffisante pour prévenir un empiètement sur l’emplacement réservé, et, lorsque la construction ne pourrait, du fait d’un tel emplacement réservé, jouxter la limite parcellaire, sans que cette distance puisse être inférieure à la distance minimale prévue à l’article R. 111-19 du code de l’urbanisme alors en vigueur ou, le cas échéant, par les dispositions du plan d’occupation des sols ayant le même objet ;
Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article UB 7 du règlement du plan d’occupation des sols de la commune de Barzy-sur-Marne : " lorsque la construction ne joint pas une limite séparative de propriété, la distance horizontale entre tout point du bâtiment à édifier et le plus proche point bas de la limite séparative doit être au moins égale (.) / - à la moitié de la différence de niveau entre ces deux points avec un minimum de quatre mètres (.) " ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté en date du 29 mai 2004, le maire de Barzy-sur-Marne a accordé à M. et Mme B. une autorisation de travaux en vue de la construction d’une charreterie sur une parcelle leur appartenant, sous réserve que celle-ci soit édifiée à au moins 6, 50 mètres de la limite séparative de leur parcelle, afin de prévenir un empiètement de la construction sur un emplacement réservé pour la réalisation d’une voie d’accès à une maison de retraite en projet ;
Considérant que, pour écarter le moyen tiré de ce que le maire de Barzy-sur-Marne ne pouvait légalement imposer un recul supérieur à la distance de quatre mètres mentionnée à l’article UB 7 du règlement du plan d’occupation des sols de la commune, le tribunal administratif d’Amiens, après avoir souverainement constaté, sans dénaturer les pièces du dossier, l’existence d’un emplacement réservé empiétant sur une largeur de 6, 50 mètres sur le bord de la propriété de M. et Mme B., s’est fondé sur les dispositions de l’article R. 123-32 du code de l’urbanisme aux termes desquelles : " Sous réserve des dispositions de l’article L. 423-1, la construction est interdite sur les terrains, bâtis ou non, compris par le plan d’occupation des sols dans les emplacements réservés pour des voies et ouvrages publics (.) " et en a déduit que le maire pouvait légalement prescrire que la construction projetée soit édifiée à une distance minimale de 6, 50 mètres de la limite séparative de la parcelle, afin de prévenir un empiètement sur l’emplacement réservé ; que, cependant, les dispositions de l’article R. 123-32 du code de l’urbanisme précitées ont été abrogées par le décret du 27 mars 2001 modifiant le code de l’urbanisme et le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique et relatif aux documents d’urbanisme ; qu’en se fondant sur ces dispositions, qui n’étaient pas applicables au litige qui lui était soumis, le tribunal administratif d’Amiens a commis une erreur de droit ;
Considérant toutefois qu’il résulte des dispositions combinées du 8° de l’article L. 123-1 du code de l’urbanisme et de l’article L. 423-1 du même code que les constructions non conformes à la destination de l’emplacement réservé par un plan d’occupation des sols rendu public ou approuvé ou ne présentant pas un caractère précaire ne peuvent légalement être édifiées qu’à l’extérieur de l’emprise de l’emplacement réservé, règle que l’article R. 123-32 de ce code ne faisait que rappeler ; que, dès lors, le maire de Barzy-sur-Marne pouvait légalement assortir l’arrêté du 29 mai 2004 de la prescription litigieuse ; que ce motif, qui est d’ordre public et qui n’appelle de la part du juge de cassation aucune constatation nouvelle de fait, doit être substitué à celui retenu par le tribunal administratif d’Amiens, dont il justifie légalement le dispositif ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. et Mme B. ne sont pas fondés à demander l’annulation du jugement attaqué, qui est suffisamment motivé ;
Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu’une somme soit mise à la charge de la commune de Barzy-sur-Marne, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance ; qu’il y a lieu de mettre à la charge de M. et Mme B. le versement d’une somme de 1 500 euros à ce titre au profit de la commune de Barzy-sur-Marne ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme B. est rejetée.
Article 2 : M. et Mme B. verseront à la commune de Barzy-sur-Marne une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme B. et à la commune de Barzy-sur-Marne.
Copie en sera adressée pour information au ministre d’Etat, ministre de l’écologie, du développement et de l’aménagement durables.