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Cour administrative d’appel de Bordeaux, 12 novembre 2003, n° 01BX00661, Etablissement français du Sang c/ Consorts B. et Mutualité sociale agricole

Une présomption d’imputabilité est établie dans le cas d’une contamination par le virus de l’hépatite C survenant après des transfusions de produits sanguins, présomption qu’il appartient à la partie défenderesse de renverser, soit en apportant la preuve de l’innocuité desdits produits transfusés, soit en établissant l’existence d’une cause étrangère dans la contamination virale.

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE BORDEAUX

N° 01BX00661

ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG
c/ Consorts B. et mutualité sociale agricole de la Charente maritime

M. Chavrier
Président

Mme Roca
Rapporteur

M. Rey
Commissaire du Gouvernement

Arrêt du 12 novembre 2003

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE BORDEAUX

(2ème chambre)

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 14 mars 2001 et complétée le 9 avril 2001, présentée pour le centre hospitalier régional universitaire de Poitiers, dûment représenté par son directeur et dont le siège est situé 350, avenue Jacques Cœur 86000 Poitiers, et pour l’ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG, représenté par le président du conseil d’administration et domicilié 100, avenue de Suffren 75015 Paris, par la S.C.P. d’avocats Haie-Pasquet-Veyrier ;

Le centre hospitalier régional universitaire de Poitiers et l’ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG demandent à la cour :

- d’annuler le jugement du 28 décembre 2000 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a condamné le centre hospitalier régional universitaire, d’une part, à verser diverses indemnités à Mme Arlette B., à M. Bernard B. et à la mutualité sociale agricole de la Charente maritime à la suite du décès de M. Gaston B. atteint d’une hépatite C, d’autre part, à supporter les frais d’expertise ;

- de rejeter les demandes en indemnités des consorts B. ainsi que les conclusions de la mutualité sociale agricole de la Charente maritime et de mettre les frais d’expertise à la charge des premiers ;

- de condamner solidairement les consorts B. à verser au centre hospitalier régional universitaire de Poitiers la somme de 10 000 F au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- d’ordonner une expertise complémentaire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 14 octobre 2003 :
- le rapport de Mme Roca ;
- les observations de Me Roger de la S.C.P. Haie Pasquet Veyrier pour l’ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG ;
- les observations de Me Sirou du cabinet de Me Novion pour Mme Arlette B. et M. Bernard B. ;
- et les conclusions de M. Rey, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’aux termes de l’article 102 de la loi du 4 mars 2002 susvisée : " En cas de contestation relative à l’imputabilité d’une contamination par le virus de l’hépatite C antérieure à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n’est pas à l’origine de la contamination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Le doute profite au demandeur. Cette disposition est applicable aux instances en cours n’ayant pas donné lieu à une décision irrévocable. " ;

Considérant qu’il résulte des dispositions précitées qu’une présomption d’imputabilité est établie dans le cas d’une contamination par le virus de l’hépatite C survenant après des transfusions de produits sanguins, présomption qu’il appartient à la partie défenderesse de renverser, soit en apportant la preuve de l’innocuité desdits produits transfusés, soit en établissant l’existence d’une cause étrangère dans la contamination virale ;

Considérant que le 8 novembre 1984 M. Gaston B., alors âgé de 54 ans, a subi une intervention chirurgicale au centre hospitalier Camille Guerin de Chatellerault pour la mise en place d’une prothèse de la hanche ; qu’au cours de cette opération, 5 lots de produits sanguins fournis par le centre de transfusion sanguine de Poitou-Charentes, alors géré par le centre hospitalier régional universitaire de Poitiers, lui ont été administrés par voie de transfusion ; qu’au mois de janvier 1997 une hépatite C était diagnostiquée ; que M. Gaston B. est décédé le 5 février 1998 des suites d’une cirrhose ; que l’ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG, venant aux droits du centre hospitalier régional universitaire de Poitiers en sa qualité de gestionnaire du centre de transfusion sanguine précité, conteste le jugement du 28 décembre 2000 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a retenu la responsabilité de l’hôpital dans la contamination de M. Gaston B. ; que les consorts B. demandent, par la voie de l’appel incident, une majoration des indemnités qui leur ont été accordées par les premiers juges tant en réparation du préjudice de la victime qu’au titre de leur préjudice personnel ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que les recherches entreprises concernant la sérologie des 5 donneurs correspondants, effectuées pendant les années 1996 à 1998 et dont les résultats se sont pas contestés, révèlent qu’aucun d’eux n’est porteur du virus de l’hépatite C ; qu’il ressort des écrits de la communauté scientifique figurant au dossier qu’un donneur atteint de ce virus lors de son don de sang et ultérieurement guéri, reste identifiable en tant que tel lors du contrôle du fait de la présence dans son sang, après la guérison, d’anticorps témoins de la contamination ; que l’hypothèse, admise par le tribunal administratif, d’une contamination de M. Gaston B. par un donneur entré en voie de guérison à la date du contrôle effectué, ne peut, dès lors, être retenue ; que, dans ces conditions, l’innocuité des produits sanguins administrés à M. Gaston B. doit être regardée comme établie ; qu’il suit de là que l’ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG est fondé à soutenir que le tribunal administratif de Poitiers a considéré à tort que la responsabilité du centre universitaire hospitalier de Poitiers était engagée à l’égard des ayants droit de M. Gaston B. et de la mutualité sociale agricole de la Charente maritime au titre des débours que celle-ci a engagés pour le compte de la victime ; que les conclusions incidentes présentées par les consorts B. ne peuvent, par voie de conséquence, qu’être rejetées ;

Sur les frais d’expertise :

Considérant qu’il y a lieu de mettre les frais d’expertise à la charge de Mme Arlette B. et de M. Bernard B. ;

Sur l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l’ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG, qui n’est pas la partie perdante, soit condamné à verser aux consorts B. une somme au titre des frais engagés non compris dans les dépens ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner les consorts B. à verser une somme à l’ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG en application de ces mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 28 décembre 2000 est annulé en ses articles 2, 3, 4 et 5.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Poitiers par Mme Arlette B. et M. Bernard B. en tant qu’elle concerne le centre hospitalier régional universitaire de Poitiers, leurs conclusions incidentes présentées en appel et les conclusions présentées en première instance par la mutualité sociale agricole de la Charente maritime sont rejetées.

Article 3 : Les frais d’expertise sont mis à la charge de Mme Arlette B. et de M. Bernard B..

Article 4 : Les conclusions de l’ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG tendant au bénéfice des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées

 


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