COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE NANTES
N° 00NT01780
Commune de Saint-Vaast-la-Hougue
Commune de Reville
M. DUPUY
Président de chambre
Mme STEFANSKI
Rapporteur
M. LALAUZE
Commissaire du Gouvernement
Séance du 8 avril 2003
Lecture du 13 mai 2003
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE NANTES
(2ème chambre)
Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 26 octobre 2000, présentée pour la commune de Saint-Vaast-le-Hougue (Manche), représentée par son maire en exercice et pour la commune de Reville (Manche), représentée par son maire en exercice, par Me LAUNAY, avocat au barreau de Caen ;
Les communes de Saint-Vaast-la-Hougue et de Reville demandent à la Cour :
1°) d’annuler le jugement n° 00-308 du 4 juillet 2000 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant à l’annulation de la décision du 30 décembre 1999 par laquelle le préfet de la Manche a refusé la création entre elles d’une communauté de communes ;
2°) d’annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;
3°) de condamner l’Etat à leur verser une somme de 15 000 F au titre de l’article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 8 avril 2003 :
le rapport de Mme STEFANSKI, premier conseiller,
et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que dans leur demande dirigée, devant le Tribunal administratif de Caen, contre la décision du 30 décembre 1999 par laquelle le préfet de la Manche a rejeté leur demande de création d’une communauté de communes, les communes de Saint-Vaast-la-Hougue et de Reville ont soutenu que la décision contestée aurait dû être précédée d’un acte fixant la liste des communes intéressées, qu’elle était insuffisamment motivée et entachée d’erreur manifeste d’appréciation ; que le jugement attaqué n’a pas répondu à ces moyens et doit, par suite, être annulé ;
Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par les communes de Saint-Vaast-la-Hougue et de Reville devant le Tribunal administratif de Caen ;
Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la demande :
Considérant qu’aux termes de l’article L. 5211-5 du code général des collectivités territoriales : "I - (...) le périmètre de l’établissement public de coopération intercommunale peut être fixé par arrêté du représentant de l’Etat dans le département (...) 1° Soit, dans un délai de deux mois à compter de la première délibération transmise, à l’initiative d’un ou plusieurs conseils municipaux demandant la création d’un établissement public de coopération intercommunale ; 2° Soit à l’initiative du ou des représentants de l’Etat, après avis de la ou des commissions départementales de la coopération intercommunale concernées. Cet avis est réputé négatif s’il n’a pas été rendu à l’issue d’un délai de deux mois. Cet arrêté dresse la liste des communes intéressées (...) II - la création de l’établissement public de coopération intercommunale peut être décidée par arrêté du ou des représentants de l’Etat dans le ou les départements concernés (...)" ; qu’aux termes de l’article L. 5211-45 du même code, relatif à la commission départementale de la coopération intercommunale : "Le représentant de l’Etat dans le département la consulte dans les conditions fixées à l’article L. 5211-5 sur tout projet de création d’un établissement public de coopération intercommunale. Tout projet d’association de communes en vue de l’élaboration d’une charte intercommunale de développement et d’aménagement lui est communiqué. Ses propositions et observations sont rendues publiques." ; qu’il résulte de ces dispositions que l’avis que la commission départementale de la coopération intercommunale rend sur leur fondement, revêt le caractère d’un avis consultatif ;
Considérant que le préfet de la Manche a seulement indiqué, dans les motifs de la décision attaquée, qu’il avait saisi la commission départementale de la coopération intercommunale du projet des communes de Saint-Vaast-la-Hougue et de Reville tendant à la création d’une communauté de communes, dénommée "communauté de communes du Pont de Saire", que le débat devant la commission avait porté sur l’opportunité de la création de ce projet communautaire, que les membres de la commission avaient voté contre la création de cette communauté au regard du schéma départemental de coopération intercommunale en estimant que la taille des communes n’était pas suffisante pour répondre aux exigences économiques, et que conformément à cet avis, il ne donnerait pas une suite favorable au projet présenté par ces deux communes ; qu’il ressort des termes mêmes de cette décision, qu’en se bornant à rappeler les raisons à l’origine de la position adoptée par la commission départementale de la coopération intercommunale sur le dossier de cette demande, sans indiquer les motifs ayant déterminé son refus de donner une suite favorable au projet dont il était saisi, par ces communes, le préfet de la Manche doit être regardé comme s’étant estimé lié par l’avis défavorable émis par cette commission ; qu’il a, ainsi, méconnu l’étendue de sa compétence et entaché sa décision d’illégalité ; que celle-ci doit, dès lors, être annulée ;
Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, en application de ces dispositions, de condamner l’Etat à verser à chacune des communes de Saint-Vaast-la-Hougue et de Reville une somme de 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Caen du 4 juillet 2000 est annulé.
Article 2 : La décision du 30 décembre 1999 du préfet de la Manche est annulée.
Article 3 : L’Etat versera à chacune des communes de Saint-Vaast-la-Hougue et de Reville (Manche) une somme de 500 euros (cinq cents euros) au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Vaast-la-Hougue, à la commune de Reville et au ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.