COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE BORDEAUX
N° 99BX01426
M. Vincent L.
Mme Bonmati
Président
M. Samson
Rapporteur
M. Chemin
Commissaire du Gouvernement
Arrêt du 28 mai 2003
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE BORDEAUX
(4ème chambre)
Vu la requête n° 99BX01426, enregistrée le 14 juin 1999 au greffe de la cour, et le mémoire complémentaire enregistré le 27 janvier 2003, présentés pour M. Vincent L. ;
M. L. demande à la cour :
1°) d’annuler le jugement en date du 25 mars 1999 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande en décharge des suppléments d’impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1992 et 1993 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de condamner l’Etat à lui payer la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 30 avril 2003 :
le rapport de M. Samson, rapporteur ;
les observations de Mme Darroman représentant le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie ;
et les conclusions de M. Chemin, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’aux termes de l’article 83 du code général des impôts : " Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés : ... 3° les frais inhérents à la fonction ou à l’emploi lorsqu’ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales " ; qu’aux termes de ce même article, si " la déduction à effectuer du chef des frais professionnels est calculée forfaitairement en fonction du revenu brut, les bénéficiaires de traitements et salaires sont également admis à justifier du montant de leurs frais réels " ;
Considérant que les frais de transport que les contribuables exposent pour se rendre à leur lieu de travail ou en revenir sont, en règle générale, inhérents à leur fonction ou à leur emploi et doivent donc, à ce titre, être admis en déduction en vertu des dispositions précitées de l’article 83 du code général des impôts ; que, toutefois, il en va autrement lorsque, eu égard aux circonstances, l’installation ou le maintien du domicile dans un lieu éloigné du lieu de travail présente un caractère anormal, sauf justifications particulières ;
Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande de M. L. tendant à la décharge des suppléments d’impôts sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1992 et 1993 à la suite du refus de l’administration fiscale d’admettre la déduction, au-delà de la distance de 40 kms, les frais qu’il a exposés pour effectuer le trajet qui sépare la ville de Poitiers, où il résidait, de celle de Civray, distante de 52 kms, où il était affecté en qualité de professeur d’histoire-géographie depuis le 1er septembre 1991 ; que, pour contester ce jugement, M. L. fait valoir qu’il ne connaissait pas son affectation lorsqu’il a acquis sa maison d’habitation, que ses revenus ne lui permettaient pas de financer la location d’un logement à Civray, le coût de celle-ci s’avérant supérieur aux frais de transport litigieux, et qu’il avait signé le 19 juin 1991, un compromis de vente auquel il ne pouvait renoncer sans indemniser le vendeur ;
Considérant qu’il résulte de l’instruction que M. L. a été affecté à Civray par arrêté ministériel du 3 juillet 1991 sur un poste stable de professeur titulaire, dont il soutient n’avoir eu connaissance qu’à la fin du mois d’août 1991 ; qu’il a acquis un premier logement situé à Poitiers, par acte notarié du 23 septembre 1991 sans contracter d’emprunt à cet effet, logement qu’il n’a pas occupé en 1991, contrairement à ses allégations ; que, par suite, ses revenus auraient ainsi permis de financer la location d’un logement à Civray ; qu’en outre, le 17 juillet 1992, bien après son affectation à Civray, le requérant a acquis cette fois avec un emprunt, un second logement, également situé à Poitiers et qu’il occupait jusqu’alors en qualité de locataire ; qu’enfin, le requérant n’a demandé sa mutation vers Poitiers qu’en 1996 ; qu’il résulte des circonstances susrelatées que le choix qu’il a fait de résider à Poitiers en 1991 et 1992 n’est justifié par aucune circonstance particulière et apparaît dicté par de pures convenances personnelles ; que M. L. n’est, dès lors, pas fondé à soutenir que la fraction des frais de transport dont l’administration fiscale lui a refusé la déduction était inhérente à son emploi et, comme telle, déductible de son revenu imposable ;
Considérant, enfin, que l’instruction administrative du 21 juillet 1992 " 5F962 ", la DAD m 5F-2541 n° 19 du 1er juillet 1993 et la réponse ministérielle Rossi du 3 février 1992 p 533 n° 49308 invoquées ne font aucune interprétation de la loi fiscale contraire à la présente application de l’article 83 du code général des impôts ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. L. n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas dans le présent litige la partie perdante, soit condamné à verser à M. L. la somme qu’il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. Vincent L. est rejetée.