COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE BORDEAUX
N° 02BX01192
M. Z.
M. Barros
Président
Mme Péneau
Rapporteur
M. Rey
Commissaire du Gouvernement
Arrêt du 18 mars 2003
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE BORDEAUX
(2ème chambre)
Vu la requête enregistrée le 20 juin 2002 au greffe de la cour administrative d’appel de Bordeaux sous le N° 02BX01192 présentée par M. Margueni Z. ;
M. Z. demande que la cour :
1°) annule le jugement en date du 19 avril 2002 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 22 juin 1999 du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie prononçant son licenciement pour insuffisance professionnelle ;
2°) annule l’arrêté du 22 juin 1999 du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie ;
3°) enjoigne à l’administration de le réintégrer dans ses fonctions dans un délai d’un mois à compter de la décision, le cas échéant sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;
4°) condamne l’Etat à lui verser la somme de 763 euros au titre des frais de procès non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 22 avril 1905 ;
Vu la loi N° 79-857 du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs ;
Vu la loi N° 83-634 du 13 juillet 1983 portants droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi N° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat ;
Vu le décret N° 69-444 du 14 mai 1969 modifié fixant le statut particulier des personnels enseignants des écoles supérieures des mines relevant du ministère de l’industrie ;
Vu le décret N° 94-874 du 7 octobre 1994 fixant les dispositions communes applicables aux stagiaires de l’Etat et de ses établissements publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 18 février 2003 :
le rapport de Mme Péneau ;
les observations de M. Z. ;
les conclusions de M. Rey, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. Z. a été nommé maître assistant stagiaire à l’école nationale supérieure des techniques industrielles et des mines d’Albi-Carmaux à compter du 1er mai 1997 par arrêté du 30 avril 1997 ; que, par arrêté du 12 février 1999, son stage a été prolongé pour une durée d’un an à compter du 1er juillet 1998 ; que par arrêté en date du 22 juin 1999, le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie a prononcé le licenciement de l’intéressé pour insuffisance professionnelle à compter du 1er juillet 1999 ; que M. Z. fait appel du jugement susvisé par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d’annulation :
Considérant d’une part qu’il ressort des pièces du dossier que la décision litigieuse a été prise en raison de considérations tenant à la personne de l’intéressé ; qu’une telle mesure ne pouvait, par suite, en vertu de l’article 65 de la loi du 22 avril 1905, être prononcée sans que M. Z. fût mis à même de demander la communication de son dossier ; qu’il est constant que cette formalité n’a pas été observée ;
Considérant d’autre part qu’aux termes de l’article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs :"les personnes physiques ou morales ont le droit d’être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui :... refusent un avantage dont l’attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l’obtenir..." ; qu’eu égard aux conditions dans lesquelles intervient normalement la titularisation des agents stagiaires ayant vocation à en bénéficier, la décision de licenciement pour insuffisance professionnelle en fin de stage d’un de ces agents, laquelle décision n’est pas différente d’un refus de procéder à sa titularisation, est au nombre de celles qui doivent être motivées sur le fondement des dispositions précitées ; qu’en l’espèce, l’arrêté du 22 juin 1999 du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie ne précise pas les circonstances de fait fondant la décision de licenciement de M. Z. ; qu’il ne satisfait pas dès lors aux exigences précitées de la loi du 11 juillet 1979 ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le requérant est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d’annulation de l’arrêté du 22 juin 1999 ;
Sur les conclusions à fin d’injonction :
Considérant qu’aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative :"Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure, assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution."et qu’ aux termes de l’article L 911-3 du même code :"Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l’injonction prescrite en application des articles L 911-1 et L 911-2 d’une astreinte qu’elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d’effet." ;
Considérant que M. Z. présente des conclusions tendant à ce qu’il soit enjoint à l’administration de le réintégrer dans ses fonctions ; que l’annulation de la décision de licenciement de M. Z. implique nécessairement cette réintégration ; qu’il y a lieu dès lors de prescrire cette dernière, dans le délai de deux mois suivant la date de notification de la présente décision ; qu’en revanche il n’y a pas lieu dans les circonstances de l’espèce d’assortir cette mesure d’une astreinte ;
Sur les frais de procès non compris dans les dépens :
Considérant qu’il y a lieu dans les circonstances de l’espèce de condamner l’Etat à verser à M. Z. la somme de 763 euros qu’il réclame au titre des frais de procès non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 19 avril 2002 est annulé.
Article 2 : L’arrêté du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie en date du 22 juin 1999 licenciant M. Z. est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie de réintégrer M. Z. dans ses fonctions à la date de son éviction illégale, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L’Etat est condamné à verser à M. Z. la somme de 763 euros au titre des frais de procès non compris dans les dépens.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.