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Tribunal administratif de Lyon, 5 avril 2000, Mme Donu Yilar

Il résulte des travaux préparatoires de la loi susvisée du 11 mai 1998 que le législateur a voulu, qu’avant d’opposer un refus de titre de séjour à ces étrangers, le préfet soit éclairé par l’avis de ladite commission et prenne connaissance des éléments présentés devant elle par les intéressés ; que, par suite, alors même que le préfet serait fondé à estimer, au vu dossier du demandeur, que celui-ci n’est pas au nombre des étrangers énumérés aux articles 12 bis et 15 susmentionnés, ou qu’une menace à l’ordre public fait obstacle à ce que lui soit délivré un titre de séjour, il est tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour.

TRIBUNAL ADMINISTRATIF de LYON

Mme Donu YILAR
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M. CHARLIN
Rapporteur
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M. GIMENEZ
Commissaire du gouvernement
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Audience du 3 avril 2000
Lecture du 5 avril 2000
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RéPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE LITIGE

Mme Dondu YILAR, demeurant chez M. Cafer YILAR, 691, route nationale  6 à ARNAS (69400), à saisi le tnibunal administratif d’une requête, présentée par Me FRERY, avocat au barreau de LYON, enregistrée au greffe le 3 mai 1999, sous le n0 9901725

Mme Dondu YILAR demande au tribunal :

- d’annuler pour excès de pouvoir la décision, en date du 2 mars 1999, par laquelle le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire,

- de condamner l’Etat à lui payer une somme de 6030 F au titre de l’article L.8-l du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;
 

L’AUDIENCE

Les parties ont été régulièrement averties de l’audience publique qui s’est tenue en formation plénière le 3 avril 2000 ;

A cette audience, le tribunal a entendu :

- le rapport de M. CHARLIN, conseiller,
- les observations de Me FRERY, avocat de la requérante
- les conclusions de M. GIMENEZ, commissaire du gouvernement ;

LA DéCISION

Après avoir examiné la requête de Mme YLAR, la décision en litige, les mémoires ainsi que les pièces produits par les parties avant la clôture de l’instruction, et vu les textes suivants :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales,

- l’ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi n° 98.349 du 11 mai 1998,

- le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié,

- le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983,

- le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel,, et la loi n° 86-14 du 6janvier 1986.

- les articles 1089 B et 1090 A du code général des impôts et l’article 10 de la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977, complétée par l’article 44 de la loi n° 93-1352 du 30 décernbre 1993 portant loi de finances pour 1994 ;

LE TRIBUNAL

Sur les conclusion tendant à 1’annulation de la décision attaquée :

Considérant qu’aux termes du 3ème alinéa de l’article 12 quater de l’ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée issu de l’article 7 de la loi n° 98-349 du 11 mai 1998 créant une commission dite "du titre de séjour" : La commission est saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l’article 12 bis ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné à l’article 15." ;

Considérant que le premier alinéa du même article prévoit que ladite commission est composée du président du tribunal administratif ou d’un conseiller qu’il délègue pour en assurer la présidence, d’un magistrat désigné par l’assemblée générale du tribunal de grande instance du chef-lieu du département et d’une personnalité qualifiée désignée par le préfet du département pour sa compétence en matière sociale ; que, dans les deux alinéas qui suivent, ledit article prévoit que : "L’étranger est convoqué par écrit au moins quinze jours avant la date de la réunion de la commission qui doit avoir lieu dans les trois mois qui suivent sa saisine ; il peut être assisté d’un conseil ou de toute personne de son choix et être entendu avec un interprète.  L’étranger peut demander le bénéfice de l’aide juridictionnelle dans les conditions prévues par la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, cette faculté étant mentionnée dans la convocation ; l’admission provisoire à l’aide juridictionnelle peut être prononcée par le président de la commission. S’il ne dispose pas d’une carte de séjour temporaire ou si celle-ci est périmée, l’étranger reçoit, dès la saisine de la commission un récépissé valant autorisation provisoire de séjour jusqu’à ce que le préfet ait statué." ;
 

Considérant, d’une part, qu’eu égard à la composition de la commission du titre de séjour, au droit qui est reconnu aux étrangers mentionnés aux articles 12 bis et 15 de l’ordonnance du 2 novembre 1945 d’être entendus par elle avec un interprète,  en se faisant assister d’un avocat ou d’une personne de son choix, et enfin à la possibilité qui leur est ouverte de bénéficier de l’aide juridictionnelle, l’examen par cette commission de leur demande de titre de séjour constitue une garantie dont ils ne sauraient en aucun cas être privés ; que d’autre part, il résulte des travaux préparatoires de la loi susvisée du 11 mai 1998 que le législateur a voulu, qu’avant d’opposer un refus de titre de séjour à ces étrangers, le préfet soit éclairé par l’avis de ladite commission et prenne connaissance des éléments présentés devant elle par les intéressés ; que, par suite, alors même que le préfet serait fondé à estimer, au vu dossier du demandeur, que celui-ci n’est pas au nombre des étrangers énumérés aux articles 12 bis et 15 susmentionnés, ou qu’une menace à l’ordre public fait obstacle à ce que lui soit délivré un titre de séjour, il est tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour ;

Considérant qu’il résulte des pièces du dossier que Mme YILAR, ressortissante turque, est entrée en France le 19 octobre 1998 sous couvert d’un visa de 90 jours ; que, le 8 janvier I 999, elle a déposé une demande de carte de séjour temporaire  en se prévalant des dispositions du 7° de l’article 12 bis de l’ordonnance précitée ; que, faute d’avoir saisi la commission du titre de séjour du Rhône avant de lui opposer le refus qu’elle conteste, le préfet de ce département a entaché sa décision d’un vice de procédure substantiel ; qu’il y a lieu, en conséquence, d’en prononcer l’annulation

Sur les conclusion tendant à ’application de l’article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel  :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. le juge tiens compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation."  ; que dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de condamner l’Etat à payer à Mme YILAR une somme de 5000 F au titre des frais qu’elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens et à rejeter le surplus des conclusions de sa requête sur ce point ;

DéCIDE

Article 1er : La décision du 2 mars 1999 par laquelle le préfet du Rhône a refusé de délivrer à Mme YILAR une carte de séjour temporaire est annulée.

Article 2  : L’Etat est condamné à verser à Mme YILAR la somme de cinq mille francs (5000 F) au titre de l’article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel.

Article 3  : Le surplus des conclusions de la requête de Mme YILAR est rejeté.

Article 4 : Le présent jugement sera notifie’ conformément aux dispositions de l’article R. 211 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel.
 

Délibéré à l’issue de l’audience du 3 avril 2000, où siégeaient : M. LOPEZ, M. LANZ, M. FONTANELLE, M. RICHER, M. CHANEL, M. FOUCHET, M. WYSS, M. CHARLIN, Mme VERLEY-CHEYNEL, M. CLOT, M. DURAND, Mme MARGINEAU-FAURE, M. MARTIN, M. KOLBERT, M. COUTURIER, M. JOSSERAND-JAILLET, M. DUCHENE, M. PURAVET, M. PICARD, M. BOUCHUT, M. ARBARETAZ, M. DAVESNE, M. SEILLET, M. BARNIER, M. PRIETO, Mme LEDEY, Mme VERSOL, conseillers assistés de M. RIOOTE, greffier en chef

 


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