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Conseil d’Etat, 17 novembre 2008, n° 301553, Jean-Yves B.

S’il appartient à la section des assurances sociales du Conseil national de l’ordre des chirurgiens-dentistes de vérifier notamment que, au titre de l’impartialité, les praticiens-conseils qui représentent les organismes d’assurance maladie au sein de la formation de jugement ne sont pas placés sous l’autorité hiérarchique directe de l’auteur de la plainte, aucune disposition ou règle générale du droit applicable en la matière ne l’oblige à mentionner dans sa décision la qualité des membres qui la composent ni, a fortiori, à indiquer les caisses de sécurité sociale auxquelles sont rattachés les praticiens-conseils qui représentent les organismes d’assurance maladie au sein de la formation de jugement.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N°s 301553, 301609

M. B.

M. Xavier de Lesquen
Rapporteur

Mme Catherine de Salins
Commissaire du gouvernement

Séance du 6 octobre 2008
Lecture du 17 novembre 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 5ème et 4ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 5ème sous-section de la section du contentieux

Vu 1°) sous le n° 301553, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 février 2007 et 9 mai 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Jean-Yves B. ; M. B. demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler la décision du 14 décembre 2006 par laquelle la section des assurances sociales du Conseil national de l’ordre des chirurgiens-dentistes a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision du 25 janvier 2006 de la section des assurances sociales du conseil régional Rhône-Alpes lui infligeant la sanction de l’interdiction de donner des soins aux assurés sociaux pendant trois mois dont deux mois avec sursis, a décidé que ladite sanction sera applicable du 1er avril 2007 au 30 avril 2007 inclus et a condamné le requérant à verser la somme de 4 011, 69 euros aux organismes de sécurité sociale ;

2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter la plainte formée à son encontre devant le conseil régional de l’ordre des chirurgiens-dentistes Rhône-Alpes ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°) sous le n° 301609, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 février 2007 et 9 mai 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Jean-Yves B., demeurant centre commercial le Pont de Doux à Saint-Jean-de-Muzols (07300) ; M. B. demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler la décision du 14 décembre 2006 par laquelle la section des assurances sociales du Conseil national de l’ordre des chirurgiens-dentistes a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision du 25 janvier 2006 de la section des assurances sociales du conseil régional Rhône-Alpes lui infligeant la sanction de l’interdiction de donner des soins aux assurés sociaux pendant trois mois dont deux mois avec sursis, a décidé que ladite sanction sera applicable du 1er avril 2007 au 30 avril 2007 inclus et a condamné le requérant à verser la somme de 4 011, 69 euros aux organismes de sécurité sociale ;

2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter la plainte formée à son encontre devant le conseil régional de l’ordre des chirurgiens-dentistes Rhône-Alpes ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Xavier de Lesquen, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de M. B.,

- les conclusions de Mme Catherine de Salins, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les conclusions de M. B., enregistrées par erreur sous deux numéros distincts, constituent un pourvoi unique, sur lequel il y a lieu de statuer par une seule décision ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 145-1 du code de la sécurité sociale : " Les fautes, abus, fraudes et tous faits intéressant l’exercice de la profession, relevés à l’encontre des médecins, chirurgiens-dentistes ou sages-femmes à l’occasion des soins dispensés aux assurés sociaux, sont soumis en première instance à une section de la chambre disciplinaire de première instance des médecins ou des chirurgiens-dentistes ou des sages-femmes dite section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance et, en appel, à une section de la chambre disciplinaire nationale du Conseil national de l’ordre des médecins ou des chirurgiens-dentistes ou des sages-femmes, dite section des assurances sociales du Conseil national de l’ordre des médecins ou section des assurances sociales du Conseil national de l’ordre des chirurgiens-dentistes ou section des assurances sociales du Conseil national de l’ordre des sages-femmes. " ; qu’aux termes de l’article L. 145-2 du même code : " Les sanctions susceptibles d’être prononcées par la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance ou par la section spéciale des assurances sociales du Conseil national de l’ordre des médecins ou des chirurgiens-dentistes ou des sages-femmes sont : / 1°) l’avertissement ; / 2°) le blâme, avec ou sans publication ; / 3°) l’interdiction temporaire ou permanente, avec ou sans sursis, du droit de donner des soins aux assurés sociaux ; / 4°) dans le cas d’abus d’honoraires, le remboursement à l’assuré du trop-perçu ou le reversement aux organismes de sécurité sociale du trop-remboursé, même s’il n’est prononcé aucune des sanctions prévues ci-dessus " ;

Sur la régularité de la décision attaquée :

Considérant que s’il appartient à la section des assurances sociales du Conseil national de l’ordre des chirurgiens-dentistes de vérifier notamment que, au titre de l’impartialité, les praticiens-conseils qui représentent les organismes d’assurance maladie au sein de la formation de jugement ne sont pas placés sous l’autorité hiérarchique directe de l’auteur de la plainte, aucune disposition ou règle générale du droit applicable en la matière ne l’oblige à mentionner dans sa décision la qualité des membres qui la composent ni, a fortiori, à indiquer les caisses de sécurité sociale auxquelles sont rattachés les praticiens-conseils qui représentent les organismes d’assurance maladie au sein de la formation de jugement ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée du Conseil national de l’ordre des chirurgiens-dentistes serait irrégulière faute d’une telle mention doit être rejeté ;

Sur le bien-fondé de la décision attaquée :

En ce qui concerne la sanction de l’interdiction temporaire de donner des soins aux assurés sociaux :

Considérant que, ainsi qu’il a été dit ci-dessus, aucune disposition ou règle générale du droit applicable n’obligeait la section des assurances sociales du conseil régional de l’ordre des chirurgiens-dentistes de Rhône-Alpes à mentionner dans sa décision la qualité des membres qui la composent ni a fortiori à désigner les caisses de sécurité sociale auxquelles sont rattachés les praticiens-conseils qui représentent les organismes d’assurance maladie au sein de la formation de jugement ; que, par suite, le conseil national n’a pas commis d’erreur de droit en ne relevant pas d’office l’absence de ces indications sur la décision qui lui était déférée ;

Considérant que la section des assurances sociales du Conseil national de l’ordre des chirurgiens-dentistes a relevé que M. B. avait réalisé dans des dossiers qu’elle a identifiés par leurs numéros, quatre-vingt onze actes que l’état des patients ne justifiait pas et qu’il avait retenu, dans huit dossiers également identifiés par leurs numéros, une cotation de plusieurs " Z6 " pour des " radiographies réalisées au cours de la même séance pour des dents ou des groupes de dents contigües " ; qu’elle a ainsi suffisamment motivé sa décision sur les griefs reprochés au praticien ;

Considérant qu’après avoir ainsi relevé les faits reprochés à M. B., par une appréciation souveraine des circonstances de l’espèce exempte de dénaturation qui n’est pas susceptible d’être discutée devant le juge de cassation, la section des assurances sociales du Conseil national de l’ordre des chirurgiens-dentistes ne leur a pas donné une qualification juridique erronée en estimant qu’ils étaient constitutifs de fautes, abus et fraudes au sens de l’article L. 145-1 du code de la sécurité sociale ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. B. n’est pas fondé à demander l’annulation de la décision de la section des assurances sociales du Conseil national de l’ordre des chirurgiens-dentistes en date du 14 décembre 2006, en ce qu’elle lui a infligé la sanction de l’interdiction temporaire de donner des soins aux assurés sociaux pendant trois mois, dont deux mois avec sursis ;

En ce qui concerne la sanction du reversement aux organismes de sécurité sociale du trop-remboursé :

Considérant que ne constituent des honoraires abusifs au sens de l’article L. 145-2 du code de la sécurité sociale que ceux qui sont réclamés pour un acte facturé sans avoir jamais été réalisé, pour un acte surcoté, pour un acte réalisé dans des conditions telles qu’alors même qu’il a été effectivement pratiqué il équivaut à une absence de soins, ou encore ceux dont le montant est établi sans tact ni mesure ; qu’il ne ressort pas de la décision attaquée que la section des assurances sociales du Conseil national de l’ordre des chirurgiens-dentistes ait recherché si les honoraires qu’elle a jugé abusifs remplissaient l’une de ces conditions ; qu’ainsi, cette section n’a pas légalement fondé sa décision sur ce point ; que M. B. est par suite fondé à en demander l’annulation en tant qu’elle le condamne à reverser un trop-remboursé de 4 011, 69 euros aux organismes de sécurité sociale ;

Sur les conclusions de M. B. tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l’Etat qui n’est pas partie dans la présente instance le versement d’une somme au titre des frais exposés par M. B. et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Les productions enregistrées sous le n° 301609 seront rayées du registre du secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat pour être jointes au pourvoi n° 301553.

Article 2 : L’article 3 de la décision du 14 décembre 2006 de la section des assurances sociales du Conseil national de l’ordre des chirurgiens-dentistes est annulé.

Article 3 : L’affaire est renvoyée, dans la limite de la cassation prononcée, à la section des assurances sociales du Conseil national de l’ordre des chirurgiens-dentistes.

Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi de M. B. est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Yves B., au médecin-conseil auprès de la caisse primaire d’assurance maladie d’Annonay, à la caisse primaire d’assurance maladie d’Annonay et au Conseil national de l’ordre des chirurgiens-dentistes.

 


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